Nicolas Valsan est un empêcheur de penser en rond. Pour preuve, son livre, Travail social. L’art de se rendre inutile. Selon Eric Kérimel de Kerveno, éducateur spécialisé aujourd’hui retraité, anticonformiste et engagé, qui a écrit la préface : « Il y a dans cet ouvrage de la dénonciation et de l’énonciation. C’est une démarche politique assumée. La dénonciation est utile dans un temps où le tri des publics est en marche ; l’énonciation est salutaire car elle propose un nouvel élan à un travail social qui s’est égaré sur les chemins de la technicité et de la prestation. »
L’invitation au voyage est tentante. Elle interroge une notion, introduite en 2002 dans le secteur sanitaire, social et médico-social : la participation. Celle-ci n’a rien d’un caprice de technocrates, c’est « une lame de fond » qui veut que toute personne accompagnée soit autonome et capable de gérer sa propre vie. Au risque de la culpabiliser si elle échoue, chute ou renonce. La société n’est pas responsable, seul l’individu l’est, murmure le monde en pointant du doigt ceux qui coûtent et ne rapportent pas. Le discours est bien rôdé. Mais pour l’auteur, qui parle de « barbarie », la participation n’a rien d’individualiste. Au contraire, elle est collective. C’est « d’abord une histoire de regard, une manière d’inclure l’autre et de nous inclure nous-mêmes dans ce que j’appelle une “humanité commune”, tout en respectant ce que chacun est, dans toute sa complexité. » De nombreux travailleurs sociaux innovent, résistent au formatage, à l’infantili-sation, acceptent les différences et les subjectivités, luttent contre les exclusions… Alors l’art de se rendre inutile ? C’est rompre avec la verticalité du système, s’appuyer sur la force de la rencontre, se nourrir d’émotions, déconstruire les idées reçues et les protocoles figés, promouvoir le changement, se révolter contre les « silences meurtriers », ouvrir grand les fenêtres… Pour que Florianne ne déclare plus : « En voulant me protéger le travail social m’a mise exactement là où je ne voulais pas être ! »
« Travail social. L’art de se rendre inutile » – Nicolas Valsan – Ed. Champ social, 20 €.