Certaines associations avaient pris les devants bien avant qu’Emmanuel Macron ne décrète qu’il ne voulait voir aucun Ukrainien dormir à la rue. Beaucoup de citoyens avaient conscience du devoir de solidarité bien avant que Robert Ménard ne batte sa coulpe, reconnaissant s’être trompé lorsqu’il placardait dans sa ville des photos de réfugiés, alors afghans, et appelait à les refouler hors des frontières hexagonales.
Mais l’un et l’autre de ces constats n’empêchent pas de s’inquiéter du sort réservé aux femmes et enfants, notamment, qui arrivent par milliers aujourd’hui. Car si le dispositif national relayé par les préfectures, les départements et les communes prévoit des réquisitions de locaux, bâtiments vacants, centres de colonies de vacances et autres logements inoccupés, il ne s’agit là que d’hébergement d’urgence. Alors qu’un véritable travail d’accompagnement psychosocial s’impose.
Lorsque le directeur de la Croix-Rouge juge la France capable de recevoir jusqu’à 100 000 personnes, comment ne pas imaginer le nombre de travailleurs sociaux nécessaires à un accueil digne de ce nom ? Sortir du chapeau l’hypothèse d’un accueil familial – qui n’a rien à voir avec l’accueil familial réglementé que l’on connaît – semble bien acrobatique, voire dangereux.
D’un point de vue que l’on peut qualifier de non-expert, oui, accueillir un maximum de personnes pour leur offrir le gîte et le couvert semble être un minimum. Bobos des villes et des campagnes ne se priveront pas d’apprendre à leurs enfants le sens de l’hospitalité, la différence de culture, et tout ce petit monde-là s’endormira bienheureux d’avoir apporté son grain d’humanité. Mais qui accueillera qui ? Les préfectures se donneront-elles réellement les moyens de faire la différence entre les victimes de cette guerre.
Car il y aura les plus fragiles, celles dont les traumatismes doivent très rapidement être pris en charge. Par qui, dans quelles structures médico-sociales déjà débordées ? Il y aura celles qui pourront être plus simplement confiées à des hôtes très bien sous tous rapports. Mais comment seront-ils choisis ?
Sans compter que, en période de campagne présidentielle, les termes de « protection temporaire » tombent fort bien. Pas trop effrayants. Engageants, même. Sauf que. Avant que des villes, des maisons, des écoles et des hôpitaux bombardés puissent être reconstruits, il faut bien compter quatre ou cinq ans… Le temps d’un deuxième mandat.