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De l’hospice à l’Ehpad

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La multiplication des plaintes à l’égard des groupes d’Ehpad privés a braqué les projecteurs sur ces institutions devenues essentielles ces dernières années dans la prise en charge du grand âge et de la dépendance. Réglementés notamment par la loi 2002-2, ces établissements s’inscrivent dans l’histoire de la construction sociale de la dépendance, dont les mutations se sont accélérées avec le vieillissement de la population.

En effet, avant d’être considérée comme un âge de la vie, la vieillesse est vue comme l’état d’incapacité au travail. Dans les congrès d’assistance qui se réunissent à la fin du XIXe siècle, le vieillard est souvent considéré comme un « invalide du travail ». Mais c’est au siècle précédent, marqué par les idées des Lumières, que cette image se modifie : la longévité, désormais, est perçue de manière positive, alors qu’elle était jusque-là considérée comme un signe de vanité. Le discours médical contribue aussi à la construction savante du vieillissement : la perspective médicale sur le corps et ses changements favorise l’émergence au XIXe siècle de discours sur la dégénérescence et la sénescence. Puis, c’est l’apparition au XXe siècle de la gériatrie comme spécialité.

Les solidarités familiales ont longtemps été primordiales dans la prise en charge des personnes âgées : dans une société où la notion de retraite n’existe pas encore, celles-ci vivent le plus souvent avec leurs enfants. Pourtant, des lieux spécifiques commencent à se développer au XIXe siècle. Appelés « hospices » ou « maisons de retraites » dans la loi de 1851 qui les distingue des hôpitaux, ils accueillent des individus âgés, parfois dans des dortoirs de plus de 100 personnes, en les séparant des malades. Lorsque leur état de santé se dégrade, on les dirige vers l’infirmerie.

Dans ces conditions, il n’est pas surprenant de voir se développer un ensemble de plaintes, émanant des résidents et des familles, à l’encontre de l’administration de ces structures. Elles témoignent d’une sensibilité croissante, au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, à l’égard de la qualité des soins et des conditions de vie. Dans les archives de l’Assistance publique de Paris, plusieurs affaires sont bien documentées et révèlent le désarroi des usagers et de leurs proches. L’historienne Mathilde Rossigneux-Méheust nuance ainsi l’image du mouroir, forgée au cours du XXe siècle, en montrant comment ces maisons sont aussi des lieux de vie, où la mort s’articule avec d’autres expériences. Elle étudie en particulier la part de négociation des vieillards en institution, qui s’organisent dans des associations pour défendre une vie et une mort décentes. Ces sociétés de secours mutuels accompagnent les personnes âgées dans leur fin de vie et leur permettent d’échapper à la dissection, en finançant un service funèbre. Bien que vulnérables et dépendants de l’institution, les anciens entendent faire valoir leurs droits. Aujourd’hui comme hier, c’est donc bien la défense de la dignité des personnes qui est en jeu.

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