Directeur de la maison de retraite Bonnière-Saint-Aldric, en centre-ville du Mans (Sarthe), Benoît Le Moal l’affirme : « La reconstruction de notre établissement était incontournable. » Le bâtiment datait de 1959, ne respectait pas les normes actuelles et n’était plus adapté à la prise en charge de la grande dépendance. « Il allait donc disparaître », assure le directeur. S’il y avait urgence à entamer des travaux, ceux-ci ont été longuement pensés. En 2010, en collaboration avec Didier Salon, architecte spécialisé dans la (re)construction d’établissements sociaux et médico-sociaux, les premiers plans sont alors élaborés. La réflexion est collective – résidents, familles, bénévoles, salariés, direction – et les contraintes nombreuses. La principale ? Regrouper deux Ehpad en un.
Le bâtiment initial, la maison de retraite de Bonnière, qui accueillait 64 pensionnaires, a fusionné avec une petite structure de 22 places, l’Ehpad Saint-Aldric qui, lui, a été rasé. Avec la création d’une unité spécialisée Alzheimer, la capacité totale de cet Ehpad associatif à but non lucratif a été portée à 100 lits. Permis de construire déposé en 2014, premier coup de pioche en 2016, inauguration en septembre 2019. Coût total de l’opération : 15 millions d’euros. « Le chantier a été complexe, lâche Benoît Le Moal. Intellectuellement, il a fallu imaginer les différentes phases des travaux : démolir un bout de bâtiment, reconstruire, transférer des résidents, démolir à nouveau, reconstruire, transférer d’autres résidents… » L’ensemble se divise aujourd’hui en cinq maisonnées. « Le but n’est pas de cloisonner les personnes âgées, mais de permettre à chacun d’avoir son espace, son petit chez-soi dans un grand “chez les autres” », souligne Benoît Le Moal. « Avant, il n’y avait pas de douche dans les chambres. Certaines n’avaient même pas de lavabo, relate Isabelle Douetté, la cadre de santé de l’établissement. Il n’y avait qu’une salle de bains par niveau. Le résident devait donc traverser le couloir, faire sa toilette dans la grande salle de douche. C’était très compliqué. »
Chaque maisonnée dispose d’une salle à manger. Les résidents prennent donc leurs repas avec leurs « colocataires » et n’ont plus à descendre au sous-sol comme auparavant. Autre transformation de taille : l’Ehpad compte désormais trois ascenseurs. Un changement qui améliore grandement les conditions de travail des professionnels, selon Isabelle Douetté : « Avant, il n’y avait qu’un ascenseur pour 64 résidents. Et il tombait régulièrement en panne, ce qui nous obligeait à porter les personnes âgées avec des chaises. Nous nous cassions le dos. Désormais, il n’y a plus ces transferts et nous constatons une baisse des troubles musculosquelettiques. »
Le nouvel aménagement a aussi modifié l’organisation de la prise en charge des résidents. Chaque professionnel est désormais attaché à une maisonnée. Résultat de cette fidélisation : il connaît parfaitement les résidents qu’il accompagne et se sent plus à l’aise dans son service. Revers de la médaille : « Quand une salariée est absente, il est difficile de lui trouver une remplaçante. A chaque fois, il faut négocier car personne ne veut changer de maisonnée. C’est problématique. J’ai donc pour projet de revoir ce fonctionnement au cours de l’année », souligne la cadre de santé. Après deux ans de fonctionnement, celle-ci n’a qu’un regret : l’absence d’une grande salle permettant de réunir l’ensemble des résidents et leur famille pour un repas festif, comme pour Noël, par exemple. Mais pour le directeur, les objectifs sont atteints : « En comparaison avec l’ancien bâtiment, c’est le jour et la nuit. Nous voulions un Ehpad à la fois écologique, économique, sobrement beau et ergonomique pour les personnels. Nous l’avons. Je suis très satisfait. »