L’école accessible et inclusive, la belle et bonne idée qui fait rêver. L’école pour tous les enfants, pour ceux qui entrent dans les cases, ceux qui en débordent un peu beaucoup, ceux qui n’entrent dans aucune case, ceux qui ont peur de tout et ceux qui n’ont peur de rien, ceux qui aiment et ceux qui détestent. L’école pour Souad et sa jambe en moins, pour Léo et son chromosome en plus. Et pour Jules. Parce que mon petit bonhomme, il est trop, trop top et trop tout, trop de gestes et trop de mots, trop de vie et trop, c’est trop !
A la maison, c’est compliqué, à l’école, c’est pas simple, et partout ailleurs, c’est pas trop ça. On a essayé, pourtant. On a fait tout comme on nous disait. On a vu des psychotrucs, des orthobidules et des ergochoses. On a réfléchi, parlé, ensemble, séparément, en groupe, avec des enfants, des parents, et encore avec des psychomachins. J’ai rempli des papiers, coché des cases, écrit des lettres. J’étais dans mes petits papiers pour celui qui n’entrait pas dans les cases et mélangeait les lettres. Il y a eu des tests, des résultats, d’autres tests, et à chaque fois l’attente, les questions et pas toujours de réponses.
Et il y a eu ces lettres : TDAH ! Quatre lettres pour des années de questions, et ce simple sigle asséné comme une réponse. Trublion démesurément attiré par les hurluberlus ? Non. Trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité. Moins poétique et plus laconique.
J’ai cru que la bataille était gagnée, nous avions un diagnostic, un espoir, une solution. Trop facile ? Trop naïve ! Il a fallu batailler avec d’autres sigles. MDPH, AEEH, AESH… Encore des papiers, encore des cases, encore des lettres. Pendant ce temps, Jules qui bouillonnait, traînait, explosait. Jules qui souffrait. Et en novembre, enfin, le courrier, le dossier accepté, quelques heures allouées. Elle s’appelle Alice, elle est pas vraiment formée mais pleine de bonne volonté, tout va bien se passer.
Coup de foudre. « Elle est gentille… elle est douce… elle gronde pas… », me raconte Jules avec ses yeux pleins d’étoiles. Coup de pouce. « Il est plus calme… plus concentré… plus souriant… », me dit la maîtresse avec son sourire plein de soleil. Coup de tonnerre. « Nous vous informons que Mme Alice est désormais nommée dans une autre école. A compter du mois de janvier, M. Jim accompagnera votre enfant », me dit le courrier avec ses mots plein de froid.
Tristement délétère, cette accessibilité hypothétique.
L’école accessible et inclusive, la belle et bonne idée qui nous a fait rêver. La porte s’est ouverte, puis refermée. Souad, Léo et Jules n’en ont pas la clé. Demain, Alice sera auprès d’un autre enfant et elle devra tout recommencer. Jules rencontrera Jim et il faudra s’apprivoiser. Demain, la porte s’ouvrira sur un nouveau projet. Un de plus. Un de trop.
Trahison dérisoire et amère habitude.