L’étau se resserre. En septembre dernier, un chômeur a été radié de Pôle emploi pour avoir envoyé sa candidature à des employeurs par courrier recommandé et non par mail. Il percevait 507,30 € par mois d’allocation de solidarité spécifique. L’homme, qui n’a pas de connexion Internet, a saisi le tribunal administratif. Révélée par un confrère le 29 décembre, l’affaire s’avère hautement symbolique. A quelques mois de l’élection présidentielle, les chômeurs doivent disparaître des statistiques. Emmanuel Macron l’avait annoncé : sans justification d’une recherche active d’emploi, l’allocation chômage sera suspendue.
Depuis le 1er décembre 2021, les contrôles se sont donc renforcés. Nadine a peur. A presque 64 ans, elle est inscrite à Pôle emploi mais ne perçoit plus d’indemnisation. Au 1er avril prochain, elle pourra bénéficier de sa retraite à taux plein. Si tout va bien… Car, début décembre, elle a reçu une convocation pour un entretien en visio avec sa conseillère afin de faire le point sur ses recherches. Un rendez-vous prévu le 28 décembre, en pleine trêve des confiseurs, qu’elle a pu décaler à la mi-janvier. Nadine a eu beau chercher du travail depuis son licenciement économique en 2015, elle n’a rien trouvé. Trop vieille. Trop chère. Alors, depuis quelques mois, elle a un peu lâché prise. Elle risque gros : sa radiation de Pôle emploi et, dans son sillage, l’impossibilité d’avoir les trimestres validés, indispensables à sa retraite.
Un exemple parmi des milliers d’autres, illustrant l’absurdité et la violence d’un système qui pense d’abord à punir et vise avant tout les plus fragiles de la société. Ceux qui, à force d’être stigmatisés, finissent par avoir honte d’eux-mêmes. La chasse aux pauvres n’est pas nouvelle, mais elle s’accélère, comme s’intensifie la chasse aux migrants à chaque période électorale. En France, 10 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté. Un sondage de la Fédération des acteurs de la solidarité, rendu public le 6 janvier, indique qu’un quart de la population a connu une période de précarité au cours des trois dernières années et que plus de la moitié redoute d’être exclue.
Or la peur n’est jamais bonne conseillère. En ce début 2022 propice aux vœux, la lutte contre les inégalités sociales constitue « la » priorité absolue. Au lieu de cela, l’Etat choisit-il d’enfoncer davantage sous l’eau la tête de ceux qui l’ont déjà ? Et particulièrement celle des demandeurs d’emploi, dont une partie ont vu leurs revenus diminuer depuis la mise en place de la réforme de l’assurance chômage au 1er octobre dernier.
La bonne année !