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« Combien de tirelires cassées ! »

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« L’enfant règne en cette époque de l’année avec son irrésistible despotisme et ses inconscientes exigences. Les parents font, pour ne pas décevoir des désirs longuement et lentement exprimés, des prodiges d’imagination. Combien de tirelires cassées, de livrets de caisse d’épargne sacrifiés ! » Publié le 22 décembre 1938 dans la revue d’inspiration communiste Regards, cet extrait d’article critiquait les créateurs de jouets et dénonçait les inégalités sociales, particulièrement violentes à l’époque. Il rappelait aussi que la période des fêtes de fin d’année peut être vécue par les plus modestes avec une certaine amertume face à l’injonction de s’amuser et d’offrir des cadeaux. Pourtant, quatre-vingts ans plus tard, d’aucuns expriment une autre critique dans le champ médiatique et politique : celle d’un mauvais usage des aides allouées, qui serviraient à des achats non essentiels.

La moralisation du comportement des classes populaires en matière de consommation ne date pas d’hier. Dès la fin du XIXe siècle, les réformateurs sociaux voient dans l’éducation des ménages une priorité. De peur que l’ouvrier ne boive sa paie ou que l’ouvrière ne dépense l’argent du foyer de manière irrationnelle, un enseignement ménager, à destination des femmes, voit le jour. Les jeunes filles apprennent à coudre, à cuisiner, à nettoyer, mais aussi à gérer leur budget. Le régime de Vichy consacre cette formation à travers la loi du 18 mars 1942, qui la rend obligatoire pour toutes les jeunes filles de 14 à 17 ans. A la même époque, les assistantes de service social se montrent très attentives à la manière dont sont tenus les comptes des familles visitées.

Mais les comportements des consommateurs sont aussi façonnés par l’offre et les stratégies de communication déployées par les marchands. C’est dans l’entre-deux-guerres, au cœur de la crise économique, que sont apparus de nouveaux lieux destinés à une clientèle moins aisée que celle des « grands magasins ». Inspirés des bazars américains, les « magasins à prix unique » voient ainsi le jour, tels Uniprix, Prisunic ou Monoprix. Le client n’y est pas servi personnellement, les objets étant mis à sa disposition dans des étals en libre service. Ces pratiques, que l’on retrouve plus tard dans les hypermarchés, contribuent incontestablement à l’évolution des manières d’acheter. Après la guerre, l’Etat s’intéresse de près à la consommation des familles et se dote de moyens pour analyser les comportements : c’est le rôle du Crédoc, fondé en 1953 par le Commissariat général à la productivité. Ses enquêtes nous apprennent ainsi que les dépenses de consommation ont fortement augmenté depuis les années 1960, mais surtout que la part dédiée à l’alimentation et à l’habillement a été largement réduite au profit de la santé, du transport et des loisirs. Une transformation, fruit des progrès économiques et sociaux, qui doit demeurer un acquis pour l’ensemble de la société.

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