Un panier percé. Voilà l’image qui vient à l’esprit pour évoquer la situation de la protection maternelle et infantile (PMI). L’affaire n’est pas nouvelle mais, aujourd’hui, ce service public mis en place en 1945 traverse une crise sans précédent. L’idée ayant présidé à sa création était pourtant généreuse : accueillir gratuitement les enfants de moins de 6 ans, les femmes enceintes et les parents ayant besoin d’aide. En 2019, dans un rapport remis au gouvernement, la députée Michèle Peyron prévenait déjà d’une fin possible de ce système d’ici à dix ans sans mesures urgentes de l’Etat. Son alerte et ses propositions sont restées depuis quasiment sans effet. Inquiets, les professionnels ont lancé un appel au secours dans une pétition nationale. Mais malgré le déploiement de quelques subsides, les moyens financiers continuent de manquer à l’appel. Selon Pierre Suesser, président du Syndicat national des médecins de PMI, en dix ans, ce dispositif a perdu 25 % de son budget. Et comme dans d’autres structures des secteurs sanitaire, social et médico-social, les professionnels aussi circonspects qu’épuisés commencent à quitter un navire qui prend l’eau. Résultat des courses : les services sont obligés de concentrer leurs missions sur les situations les plus urgentes et les familles les plus démunies (page 8). Le risque, dans ces conditions, serait que la PMI soit contrainte d’abandonner son rôle préventif au profit du diagnostic, estime Servane Legrand, présidente de l’Association nationale des psychologues pour la petite enfance (A.na.psy.pe), invitée de notre podcast SMS de la semaine. L’herbe n’est guère plus verte chez nos voisins européens. Toutefois, à la différence de la France, la Belgique, avec l’Office de la naissance et de l’enfance, a su maintenir sa dimension universaliste en continuant de recevoir aussi bien les familles aisées que celles en grande précarité. La recette ? Une subvention de 500 millions d’euros octroyée par les pouvoirs publics, contre 100 millions sur trois ans chez nous. Un soutien inestimable pour les professionnels belges, au regard de l’accroissement des situations parentales et sociales complexes (page 10). Investir dans la petite enfance rapporte à long terme, rappelle le pédopsychiatre Patrick Ben Soussan, qui, par ailleurs, déplore la « déresponsabilisation des politiques » autour de ces questions et l’insuffisance de lieux « ressources » pour les parents (page 12). Le projet de loi relatif à la protection de l’enfance sera examiné au Sénat le 14 décembre prochain. La crainte plane que les logiques quantitatives et économiques, qui affectent tous les services sociaux, l’emportent, cette fois encore.
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