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« Les entreprises ne trouvent pas de candidats. Il faut les fabriquer »

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Devant les besoins massifs en personnels, Thibaut Guilluy défend l’accent mis sur l’intérim d’insertion comme l’inclusion par le travail indépendant, qui peut répondre aux souhaits de certains publics.
Va-t-on compter 240 000 emplois d’ici 2022 ?

On peut se montrer confiant sur l’atteinte de cet objectif, même si de nombreux éléments entrent en jeu. 60 000 emplois créés d’ici à 2022, ce serait déjà énorme. L’ouverture de postes ne dépend pas uniquement des budgets publics, mais aussi de la capacité à développer du chiffre d’affaires. Avec le « Pacte d’ambition pour l’IAE », on agit non seulement sur le levier des aides financières mais aussi sur de la simplification, de la fluidification, afin de lever des freins à la croissance. On avance de façon inédite sur l’achat inclusif, avec des ambitions chiffrées, des moyens, un plan d’action détaillé. Mais cela prend du temps. Le pacte ne date que de septembre 2019 et celui qui concerne l’intérim d’insertion a été signé début 2020. Alors que la crise aurait dû détruire des emplois, l’inverse s’est produit. Les entreprises de travail temporaire d’insertion (ETTI) doivent développer leurs implantations et obtenir leurs agréments.

Ces créations d’emploi seront-elles financées ?

Le budget 2022 couvre tout le potentiel de croissance : on a mis en place la fongibilité des aides pour répondre aux créations supplémentaires. Si tous les emplois étaient créés dans les ateliers et chantiers d’insertion, il faudrait en effet doubler les budgets. Mais d’autres formes, comme les associations intermédiaires ou l’intérim d’insertion, en consomment moins.

N’y a-t-il pas un risque de retour en arrière budgétaire après l’élection présidentielle ?

Un décideur public qui organiserait la chute massive des budgets prendrait la responsabilité de mettre en faillite des structures. Ma préoccupation sera de défendre la vision d’une société plus inclusive. Les entreprises ne trouvent pas de candidats ; or la baisse du chômage ne bénéficie pas aux plus exclus.

Que répondez-vous à ceux qui craignent la concurrence locale de l’intérim d’insertion ?

Même si l’on y multiplie les emplois par deux, les ETTI [entreprises de travail temporaire d’insertion] ne sont pas du tout à l’échelle des besoins. Les entreprises recherchent du monde en permanence, et commencent à comprendre que les personnes qu’elles recherchent n’existent pas. Il faut les fabriquer. Certains patrons des réseaux d’intérim me disent qu’ils échouent à pourvoir 20 à 30 % des missions.

Quels sont les enjeux autour de l’accompagnement des publics en insertion ?

Le montant des aides au poste est pensé pour effectuer ce travail d’accompagnement global. L’enjeu réside désormais dans la montée en compétences. Le métier d’accompagnateur socioprofessionnel requiert énormément de savoirs et de compétences. S’ils sont très bons sur la formation et l’emploi, ils ne sont pas forcément préparés à l’accompagnement des personnes de nationalité étrangère ou à des problématiques de santé mentale. C’est pourquoi nous avons développé la communauté de l’inclusion, qui permet les échanges entre professionnels.

Le gouvernement annonce 40 000 inclusions par le travail indépendant. Est-il raisonnable de soutenir la création d’entreprise comme levier d’accès à l’emploi durable ?

La création d’entreprise n’a jamais été reconnue comme une forme d’insertion par l’activité économique. C’est l’association pour le droit à l’initiative économique (Adie) qui l’a fait émerger et qu’on a choisi de soutenir. Les structures comme l’Adie ou les boutiques de gestion affichent en effet de bons taux d’insertion. Leurs publics recoupent en partie ceux de l’insertion par l’activité économique : ils sont demandeurs d’emploi, bénéficient des minima sociaux, voire viennent des quartiers prioritaires des politiques de la ville. Or vous pouvez être bénéficiaire du RSA et souhaiter créer une entreprise. Dans un tiers des cas, cela fonctionne. Pour les deux tiers restants, il faut donner la possibilité de poursuivre un parcours. Quant au risque d’ubérisation, il s’agit d’une caricature : de nombreuses formules sont possibles en fonction de qui vous êtes.

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