Près d’un mois qu’elle est demandée par Philippe, Anaïs, Ludovic et l’ensemble des associations mobilisées à Calais… Mais la « trêve hivernale », ce concept législatif solidaire qui veut qu’en hiver on ne met pas les gens dehors, ne s’applique désormais plus aux « squatteurs de terrains ou de domiciles ».
Devant l’église Saint-Pierre où, durant près d’un mois, les trois grévistes de la faim ont demandé l’arrêt des expulsions pendant la trêve hivernale, Didier Leschi, le médiateur envoyé par l’Etat, a été interpellé par un journaliste qui l’interrogeait sur la fin des expulsions durant cette période si particulière. Il n’en fallait pas moins à l’ancien préfet pour dérouler les éléments de langage diffusés à l’envi par le gouvernement. « Monsieur Leschi, y aura-t-il une trêve dans les expulsions à Calais ? », a demandé ce confrère de Nord Littoral. Ce à quoi le médiateur a répondu : « Il n’y aura pas de trêve dans les mises à l’abri. »
Ce lundi 1er novembre, cependant, alors que la pluie tombait déjà depuis quelques heures sur les campements de la ville, la gendarmerie est arrivée, comme à son habitude, pour confisquer les tentes qui subsistaient çà et là. Si l’hiver n’est officiellement pas encore installé, son vent froid et sa bruine perfide se font sentir sur le littoral. Face aux éléments, une tente, c’est élémentaire. Ainsi, sous les yeux hébétés des associatifs qui, sans grand espoir, espéraient tout de même un peu de répit, tentes et bâches se sont empilées dans la camionnette de la société de nettoyage mandatée par la préfecture.
Mais tout ce petit monde a décidé de ne pas en rester là. Mardi, nul fourgon ne sortit des casernes. Mercredi non plus. Alors jeudi, à l’occasion d’un petit déjeuner où le café chaud permet de tenir, les associatifs et les exilés se sont installés sur l’un des seuls chemins menant au campement dit de « Old Lidl ». La surprise fut lisible dans les yeux des bleus lorsqu’ils arrivèrent sur les lieux en petit nombre. Au mégaphone, face aux militants, exilés et journalistes, le commissaire a appliqué doctement les directives de l’Etat : « Vous avez quarante-cinq minutes pour prendre vos affaires et partir. » Nul n’a bougé. Les personnes présentes se sont même mises en ligne, bras dessus, bras dessous, pour dire qu’ici aussi la trêve hivernale doit s’appliquer. En un peu plus d’une heure, des renforts de CRS ont été dépêchés, accompagnés de représentants de la préfecture. Les gendarmes ont essayé de passer, non sans bousculades avec leurs boucliers. Sans succès. En quelques minutes, ils ont levé le camp et Old Lidl ne fut pas expulsé ce matin-là.
Ce dimanche, l’opération s’est répétée, mais, cette fois-ci, les forces de l’ordre sont venues en nombre, parvenant à expulser le campement. A Calais, point de trêve hivernale. Pendant ce temps, Anaïs et Ludovic, les deux grévistes de la faim qui continuent, martèlent encore cette demande, malgré le silence de l’Etat.