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Les aidants demandent à être accompagnés, pas remplacés

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Les aidants peinent à exprimer leurs besoins de soutien, souligne le sociologue et enseignant Arnaud Campéon. Selon lui, l’enjeu majeur consiste à mieux accompagner ces publics qui culpabilisent de confier leur proche à des tiers et ne trouvent pas leur compte dans l’offre existante.
Comment la figure de l’aidant s’est-elle affirmée dans la société ?

Pendant longtemps, la condition d’aidant n’a pas été reconnue. Les pouvoirs publics considéraient qu’une telle solidarité était naturelle, pour ne pas dire résiduelle, car relevant de la sphère privée. La thématique a émergé dans les années 1970 grâce à la mobilisation des associations, puis à la recherche, qui a rendu visible cet engagement « silencieux ». On sait aujourd’hui que la contribution des aidants, considérable, pourrait représenter entre 12,3 et 15,6 milliards d’euros, soit entre 0,6 et 0,8 % du produit intérieur brut. Ce sont autant de dépenses sociales en moins qui ne sont plus ignorées, les pouvoirs publics ayant pris conscience de la nécessité d’agir. En témoigne la reconnaissance d’un droit au répit, demandé depuis des années par les associations. D’abord pour l’entourage des personnes en situation de handicap, avec la loi pour l’égalité des droits de 2005 ; puis pour les aidants de personnes âgées, avec la loi d’adaptation de la société au vieillissement de 2015, qui accorde une aide de 500 € une fois atteint le plafond de l’allocation personnalisée d’autonomie.

Quels sont les besoins des aidants ?

Ils demandent à être accompagnés dans leur investissement, non à être remplacés. Le lien de filiation est puissant, a fortiori en France, où la norme familiale est forte. Par conséquent, ils ont besoin de services. D’autant que l’intervention de professionnels ne diminue pas le temps passé auprès de leurs proches mais modifie juste la nature de cet engagement : ils vont se consacrer à du temps récréatif, de partage, d’entretien de la dignité morale. L’enjeu tient donc à la limitation de leur épuisement, en les soutenant et en les déculpabilisant à l’idée de recourir à du répit. Leur libérer du temps s’avère également essentiel pour cultiver leur vie sociale et personnelle. Un autre élément clé est le maintien en emploi : les aidants perçoivent l’activité professionnelle comme une bouffée d’oxygène qui évite de s’enfermer dans la relation d’aide et ce qu’on appelle le « temps des servitudes ». Il convient enfin d’aller plus loin sur certaines initiatives : le congé de proche aidant, d’une durée de trois mois renouvelable dans la limite d’un an sur toute la carrière professionnelle, demeure mal connu et peu utilisé. Il reste dissuasif.

Que penser de l’offre d’aides qui est proposée ?

Depuis de nombreuses années, les établissements ont développé des accueils de jour et des solutions d’hébergement temporaire. Mais cette offre est inégale sur le territoire. Les conditions d’entrée sont compliquées et les délais d’attente parfois trop longs. Quant aux interventions à domicile, elles sont peu coordonnées et créent des trous que les familles doivent combler. La période nocturne, par exemple, demeure difficile : certains aidants logent chez leur proche pour assurer une présence et une aide, à défaut de pouvoir trouver un service adapté. L’accueil permanent de nuit, qui fait l’objet de quelques expérimentations, gagnerait à être davantage développé.

Comment l’offre médico-sociale devra-t-elle évoluer ?

Pour les aidants, l’organisation de l’aide est illisible et la recherche d’un service, coûteuse en temps et en énergie. Simplifier ce labyrinthe administratif devient urgent, ce qui est aussi tout l’enjeu des DAC [dispositifs d’appui à la coordination] destinés à faciliter les parcours en apportant une réponse coordonnée à l’ensemble des besoins des personnes et de leur proche. Conscients des sacrifices, les aidants eux-mêmes ne souhaitent pas placer leur proche dans cette situation : certains anticipent leur propre avenir en regardant les offres de logement alternatif, de colocation, loin du modèle proposé par les établissements médico-sociaux, vus comme des lieux de soins plutôt que de vie. Il y a donc intérêt à diversifier l’offre pour répondre aux futures attentes. Les habitats alternatifs, les Ehpad hors les murs comptent de ce point de vue parmi les initiatives intéressantes à systématiser et à soutenir.

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