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Pour l’eau, une guérilla ordinaire

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Le 28 juillet 2010, à l’ONU, la France signait une résolution reconnaissant « le droit à une eau potable salubre et propre comme un droit fondamental, essentiel au plein exercice du droit à la vie et de tous les droits de l’Homme ».

Dans le Pas-de-Calais, tout n’est pourtant pas si simple. En ce matin ensoleillé du jeudi 16 septembre, Jade, une bénévole de l’association Calais Food Collective, vient d’obtenir son permis. Elle peut enfin se charger du « water drop », la distribution quotidienne d’eau pour les exilés du campement de Coquelles. En arrivant, Hassan, un habitant du camp, lui montre, dépité, la cuve d’eau de mille litres qu’elle s’apprêtait à remplir. La veille, lors de l’expulsion, « la police a mis un coup de couteau dedans. J’ai essayé de m’interposer mais ils m’ont arrêté puis fouillé ».

Depuis le début de l’année, la préfecture mène une guerre d’épuisement aux membres associatifs du Calais Food Collective. Les seuls à gérer sur ce campement de plus de 600 personnes la question primordiale de l’accès à l’eau. Jade déroule une à une les atteintes que le collectif a constatées ces derniers mois. Le 8 février, une première cuve est confisquée par la police. Remplacée le 14 février, elle disparaît de nouveau le 17. Plusieurs mails ont été envoyés à la préfecture pour réclamer des explications. A ce jour restés sans réponse. Le 16 juin, de nouveau, une autre cuve disparaît. Le 3 juillet, des premiers coups de couteau sont découverts dans l’une d’entre elles et, vingt jours plus tard, l’un des couvercles est volé. Le 22 août, nouvelle lacération lors du passage des CRS, qui gazent par la même occasion les exilés et leurs repas.

Presque à contrecœur, Jade confie : « Quand je suis arrivée à Calais, je m’attendais à une situation compliquée. Mais pas à ça. On se dit qu’en France, c’est impossible. » Malgré l’engagement des bénévoles, la lassitude gagne du terrain. Dans les corps et dans les esprits. Ces dernières semaines, pour empêcher les bénévoles de remplir l’une des cuves de Coquelles, la préfecture a fait installer des rochers sur le chemin, barrant ainsi l’accès de leur véhicule au point d’eau. Dégagés dans un premier temps par les exilés, la sous-préfecture en a fait installer de plus lourds. Quatre rochers pesant chacun entre une et trois tonnes. Solidaires, le Calais Food Collective et les habitants du campement, équipés de cordes, les ont déplacés en une soirée, à la seule force de leurs bras.

Jeudi 16 septembre, après le passage des gendarmes la veille, la cuve est retrouvée vidée, découpée au couteau. Le lendemain matin, de nouveaux rochers ainsi que des gravats empêchent désormais le remplissage d’une nouvelle cuve. Loin des discours policés de la préfecture, se poursuit une guérilla sourde et pernicieuse. Jusqu’à quand ?

Une saison en migrations

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