La dignité est un principe juridique qui dispose d’un champ d’application étendu. En effet, la dignité protège la personne humaine et veille ainsi au respect de l’intégrité, de l’indisponibilité du corps humain, de la non-patrimonialité de celui-ci et de l’intégrité morale. Toutefois, elle protège également l’être humain en son intégralité, ce qui permet d’intégrer notamment l’embryon ou encore la dépouille.
La notion de « dignité humaine » est consacrée tant au niveau national qu’au niveau international. Le Conseil constitutionnel a ainsi reconnu la valeur constitutionnelle du principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine (C. const. 27 juillet 1994, n° 94-343/344 DC, décision dite « bioéthique »).
Cette notion est fondamentale en matière de bioéthique comme le rappelle l’article 16 du code civil, qui dispose : « La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie. »
Le dossier reviendra sur la dignité à travers notamment des aspects de bioéthique. Il s’intéressera ainsi aux enjeux et à l’évolution de la législation en matière de procréation, de fin de vie et d’avortement.
Les questions relatives à la procréation font naître de nombreux débats en France, notamment en raison de l’évolution des techniques médicales. Le dossier reviendra ainsi sur la procréation médicalement assistée et la gestation pour autrui.
La procréation médicale assistée (PMA) – ou l’assistance médicale à la procréation (AMP) – est un ensemble de pratiques médicales récentes.
Ce n’est qu’en 1982 que naît le premier bébé français à la suite d’une fécondation in vitro. Il faudra ensuite attendre les lois dites « bioéthiques » de 1994 pour façonner une première législation sur ce thème.
En 2016, selon les chiffres publiés par l’Agence de la biomédecine, on recensait 147 730 tentatives d’AMP en France. La nouvelle loi « bioéthique » qui vient d’être promulguée marque un tournant important en ouvrant l’accès de ce dispositif à toutes les femmes. Les chiffres pourraient donc être amenés à évoluer à l’avenir…
L’assistance médicale à la procréation est définie par le code de la santé publique (CSP) comme l’ensemble « des pratiques cliniques et biologiques permettant la conception in vitro, la conservation des gamètes, des tissus germinaux et des embryons, le transfert d’embryons et l’insémination artificielle » (CSP, art. L. 2141-1).
Avant la promulgation de la loi « bioéthique », les conditions d’accès étaient posées par l’article L. 2141-2 du code de la santé publique, qui disposait : « L’assistance médicale à la procréation a pour objet de remédier à l’infertilité d’un couple ou d’éviter la transmission à l’enfant ou à un membre du couple d’une maladie d’une particulière gravité. […] L’homme et la femme formant le couple doivent être vivants, en âge de procréer et consentir préalablement au transfert des embryons ou à l’insémination. »
La loi du 2 août 2021 a apporté des bouleversements, en élargissant l’accès à la PMA aux couples de femmes et aux femmes non mariées. La rédaction nouvelle de l’article L. 2141-2 du code est désormais la suivante : « L’assistance médicale à la procréation est destinée à répondre à un projet parental. Tout couple formé d’un homme et d’une femme ou de deux femmes ou toute femme non mariée ont accès à l’assistance médicale à la procréation […].
Cet accès ne peut faire l’objet d’aucune différence de traitement, notamment au regard du statut matrimonial ou de l’orientation sexuelle des demandeurs. »
A noter : Le remboursement par l’assurance maladie de la PMA est ouvert aux femmes visées par la loi du 2 août 2021.
En pratique, la procréation médicalement assistée peut résulter :
• d’une insémination artificielle : le personnel médical dépose les spermatozoïdes du conjoint ou d’un donneur à l’intérieur de l’utérus de la femme. La fécondation a lieu directement dans le corps de la femme ;
• d’une fécondation in vitro (FIV) : le personnel médical injecte un spermatozoïde directement dans l’ovule afin de former un embryon. Ce dernier est ensuite introduit dans l’utérus de la femme. La fécondation a donc lieu en laboratoire ;
• d’un accueil d’embryon : le personnel médical introduit dans l’utérus de la femme l’embryon de donateurs anonymes.
Le recours à un tiers donneur est soumis aux principes de gratuité et d’anonymat du don. De plus, le donneur doit avoir procréé et il convient de recueillir son consentement exprès et, s’il est en couple, celui de l’autre membre du couple (CSP, art. L. 1244-2).
La gestation pour autrui (GPA) est un contrat conclu entre une mère porteuse et un couple, ou éventuellement un individu, qui souhaite avoir un enfant. La mère porteuse s’engage à porter l’enfant puis à le remettre au couple ou à l’individu. L’enfant né dans le cadre d’une GPA porte les gamètes des deux membres du couple désirant l’accueillir appelés « parents d’intention », d’un seul ou alors d’aucun des deux membres du couple.
Dans les faits, il peut s’agir d’une GPA offerte de manière altruiste mais dans la plupart des cas, celle-ci est impulsée par l’appât du gain et s’est développée comme une source de revenus ou même parfois comme un moyen de subsistance dans de nombreux pays pauvres comme la Roumanie ou encore l’Inde.
Les débats autour de la GPA sont éminemment d’actualité. En effet, cette pratique est en augmentation croissante à travers le monde et de nombreux Etats ont d’ores et déjà légiféré sur ce sujet. Tel est le cas du Canada, des Etats-Unis ou encore du Nigeria.
A ce jour, en Europe, la GPA est autorisée ou du moins tolérée dans neuf pays : Royaume-Uni, Roumanie, Pays-Bas, Slovaquie, Pologne, Grèce, Irlande, Belgique et Portugal, et les législations sont très différentes d’un Etat à un autre. A titre d’illustration, le Portugal autorise la GPA uniquement pour les couples hétérosexuels lorsque la femme ne peut porter l’enfant. Au Royaume-Uni, elle n’est autorisée que si elle est réalisée de manière altruiste.
En l’absence de législation sur le sujet, la Cour de cassation a eu à se prononcer dès 1991 sur le processus de la gestation pour autrui. La charge est revenue à l’assemblée plénière de la Cour de cassation de poser la première pierre de cet édifice en mettant immédiatement un terme à cette pratique. Elle retient en effet que, celle-ci contrevient tant au principe d’ordre public de l’indisponibilité du corps humain, qu’à celui de l’indisponibilité de l’état des personnes (Cass. ass. plén., 31 mai 1991, n° 90-20105). Cette position jurisprudentielle a par la suite été confortée par la doctrine sur le fondement du principe de non-patrimonialité du corps humain.
Quelques années plus tard, en 1994, le législateur est venu conforter la position des juges de la Cour de cassation dans le cadre de la première loi « bioéthique ». En effet, deux nouveaux articles ont été créés au sein du code civil visant spécifiquement la GPA pour éviter une patrimonialisation du corps humain :
• article 16-5 : « Les conventions ayant pour effet de conférer une valeur patrimoniale au corps humain, à ses éléments ou à ses produits sont nulles » ;
• article 16-7 : « Toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui est nulle ».
Ces deux articles du code civil trouvent leur pendant au sein du code pénal qui sanctionne fermement cette pratique : « Le fait de provoquer soit dans un but lucratif, soit par don, promesse, menace ou abus d’autorité, les parents ou l’un d’entre eux à abandonner un enfant né ou à naître est puni de 6 mois d’emprisonnement et de 7 500 € d’amende […].
Est puni des peines prévues au deuxième alinéa le fait de s’entremettre entre une personne ou un couple désireux d’accueillir un enfant et une femme acceptant de porter en elle cet enfant en vue de le leur remettre » (code pénal, art. 227-12).
Si la position du droit français a été clarifiée tant par les juges que par le législateur, une interrogation persiste : que se passe-t-il pour les enfants issus de GPA réalisées à l’étranger quand ils reviennent sur le territoire hexagonal, posant notamment des difficultés d’établissement de filiation, de transcription sur les registres français de l’état civil ?
En 2013, la première chambre civile de la Cour de cassation a eu à se prononcer sur la reconnaissance paternelle d’un enfant né par GPA réalisée à l’étranger. Elle a annulé la reconnaissance paternelle, dans la mesure où elle a considéré que ce mécanisme correspondait à une fraude à la loi, étant donné que les parents étaient allés sciemment à l’étranger pour contourner la loi française qui prohibait la GPA en s’appuyant sur sa légalité dans un pays étranger.
Les juges ont donc refusé de faire produire des effets à une GPA faite à l’étranger, quand bien même l’un des deux parents de l’enfant était le parent biologique. En conséquence, la Cour a refusé d’octroyer des droits tant au parent d’intention qu’au parent biologique (Cass. civ. 1re, 13 septembre 2013, n° 12-18315).
Cette question a ensuite été portée devant la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) en 2014 avec la célèbre affaire Mennesson c/ France (CEDH, 5e section, 26 juin 2014, aff. n° 65192/11, Mennesson c/ France). Dans cette affaire, un couple de Français avait conclu une convention de gestation pour autrui en Californie. Des jumelles étaient nées en 2000 des suites de cette convention. La fécondation avait eu lieu grâce à des gamètes de l’époux et un ovule issu d’un don d’un tiers donneur. Autrement dit, seul le père d’intention était le père biologique de l’enfant. Au moment de la transcription des actes de naissance des enfants sur les registres français de l’état civil, le consulat français à Los Angeles a alors refusé de transcrire l’acte.
Devant la CEDH, les arguments des époux Mennesson reposaient sur « le principe de l’ordre public atténué » du droit international privé. Ce principe part du constat que l’ordre public français aurait vocation à s’appliquer de manière atténuée face à des situations légalement créées à l’étranger. En l’espèce, les époux Mennesson estimaient que la prohibition portée par l’article 16-7 du code civil ne devait pas être étendue aux enfants nés d’une GPA faite à l’étranger, lorsque cette filiation aurait été légalement établie à l’étranger. Or, en Californie, cette pratique était autorisée.
En défense, le gouvernement français se fondait sur l’article 16-7 du code civil, qui prohibe toute convention de gestation pour autrui, mais également sur les principes de l’indisponibilité du corps humain et de l’indisponibilité de l’état des personnes déjà avancés par les juges en 1991. Il utilisait également l’article 47 du code civil qui dispose que pour qu’un acte étranger fasse foi, celui-ci ne doit être ni irrégulier, ni falsifié et doit correspondre à la réalité. Si la réalisation de l’acte faisant foi de la GPA à l’étranger n’était ni falsifiée, ni irrégulière par rapport à la loi étrangère, le dernier point faisait défaut pour le gouvernement. En effet, le droit français est régi par des principes ancestraux tels que « mater semper certa est », littéralement : « seule la mère est certaine ». Autrement dit, le gouvernement français estimait que l’acte ne correspondait pas à la réalité, car c’est la mère d’intention et non la mère ayant accouché qui était mentionnée dans l’acte étranger.
La CEDH a tranché le débat en se focalisant sur la vie privée de l’enfant issu d’une GPA accomplie à l’étranger. Sur le fondement de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme, les juges européens ont retenu la violation du droit à la vie privée des enfants, en prenant en compte l’intérêt supérieur de l’enfant. Toutefois, la Cour reconnaît que la France est en droit de décourager ses ressortissants à pratiquer la GPA à l’étranger. En revanche, elle considère que les conséquences ne doivent être réservées qu’aux parents qui « seuls ont fait le choix des modalités de procréation que leur reprochent les autorités françaises ». Or, en l’état actuel des choses, refuser de reconnaître les liens de filiation aux enfants issus de GPA à l’étranger a des conséquences directes sur leur situation et leur droit à la vie privée est directement impacté.
A la suite de cette jurisprudence, la Cour de cassation a été contrainte de se mettre en conformité avec la décision de la CEDH (Cass. ass. plén., 3 juillet 2015, n° 14-21323). Elle a ainsi accepté de retranscrire l’acte de naissance d’un enfant né par GPA à l’étranger conformément à la réalité, c’est-à-dire en utilisant la conception française de la mère, à savoir celle qui accouche sur le fondement de l’article 47 du code civil. Ainsi, la Cour de cassation a choisi de reconnaître uniquement l’acte concernant le parent biologique.
La question brûlante qu’il s’agissait alors de trancher était celle du parent d’intention.
Le parent d’intention en France est le parent qui n’a pas de lien biologique avec l’enfant né de la GPA. La situation de ce dernier a été abordée par plusieurs arrêts de la Cour de cassation le 5 juillet 2017 (Cass. civ. 1re, 5 juillet 2017, nos 16-50025, 16-16901, 15-28597, 16-16495, 16-16455). Par ces arrêts, la Cour autorise le membre du couple qui ne dispose pas de lien biologique avec l’enfant à procéder à une adoption simple à condition qu’une filiation paternelle soit déjà établie avec l’enfant sur son acte d’état civil (Cass. civ. 1re, 5 juillet 2017, n° 15-28597).
En octobre 2018, la Cour de cassation a sollicité pour la première fois l’avis de la CEDH sur le fondement du protocole n° 16 de la Convention européenne des droits de l’Homme (Cass. ass. plén., 5 octobre 2018, n° 10-19053). Elle a alors interrogé la CEDH sur le point de savoir si sa jurisprudence relative à l’adoption était conforme ou non au droit européen.
La CEDH est venue préciser que le droit au respect de la vie privée de l’enfant, sur le fondement de l’article 8 de la convention, nécessite que le droit interne des Etats membres offre une possibilité de reconnaître un lien de filiation entre cet enfant et la mère d’intention (CEDH, avis consultatif, 10 avril 2019, n° P16-2018-00). Toutefois, elle a ajouté que le droit au respect de la vie privée de l’enfant ne requiert pas que la reconnaissance du lien de filiation s’effectue par la transcription sur les registres de l’état civil de l’acte de naissance légalement établi à l’étranger.
La reconnaissance d’un lien de filiation peut donc légitimement être réalisée par une autre voie, comme celle de l’adoption par la mère d’intention de l’enfant né d’une GPA. Néanmoins, la CEDH a précisé que les modalités prévues par le droit interne devaient garantir une effectivité et une célérité de mise en œuvre, conformément à l’intérêt supérieur de l’enfant.
Dans l’affaire Mennesson, l’assemblée plénière de la Cour de cassation a fait le constat qu’il s’agissait d’un contentieux ayant perduré pendant plus de 15 ans et que le critère de célérité n’était donc plus rempli. Ainsi, dans ce cas particulier, les juges suprêmes ont fait le choix de transcrire les actes de naissance établis à l’étranger sans restriction pour ne pas porter une atteinte disproportionnée au droit à la vie privée des enfants (Cass. ass. plén., 4 octobre 2019, n° 10-19053).
Alors que la position de la Cour de cassation avait, semble-t-il, été validée par les juges de la Cour européenne des droits de l’Homme, la première chambre civile de la Cour de cassation a revu sa copie dans un arrêt du 18 novembre 2020 (Cass. civ. 1re, 18 novembre 2020, n° 19-50043). En effet, dans cet arrêt, les juges ont estimé que le critère de réalité de l’article 47 du code civil ne devait pas se lire à l’aune des principes de droit français mais conformément à la loi étrangère régissant l’acte soumis à la transcription. Or, pour le droit étranger, la mère d’intention était en réalité la mère de l’enfant. Ainsi, les juges ont cassé l’arrêt d’une cour d’appel qui n’avait transcrit que partiellement l’acte de naissance d’un enfant issu d’une GPA au motif que : « En statuant ainsi, alors que, saisie d’une demande de transcription d’un acte de l’état civil étranger, elle constatait que celui-ci était régulier, exempt de fraude et avait été établi conformément au droit de l’Etat de Colombie britannique, la cour d’appel a violé les textes susvisés. »
Le projet de loi « bioéthique » revient sur la filiation des enfants nés par GPA à l’étranger et vient unifier la jurisprudence la Cour de cassation. Ainsi la transcription de l’acte d’état civil étranger est limitée au parent biologique. Le parent d’intention doit passer par l’adoption de l’enfant.
L’euthanasie est dite « active » lorsqu’une personne demande à un médecin ou à un tiers de provoquer sa mort pour mettre fin à ses souffrances.
A ce jour, en Europe, l’euthanasie active est autorisée aux Pays-Bas, en Belgique, au Luxembourg, et, depuis le 18 mars 2021, en Espagne, qui est devenue le sixième pays au monde à légaliser ce type de pratique.
Le droit français ne reconnaît pas l’euthanasie active et la considère comme un homicide volontaire. Le consentement du malade ne peut en aucun cas constituer un fait justificatif.
La Cour européenne des droits de l’Homme a été amenée à se prononcer sur ce sujet. Elle laisse une marge de manœuvre aux Etats et considère qu’il n’est pas possible de déduire de l’article 2 de la Convention européenne des droits de l’Homme, qui consacre le droit à la vie, un droit à mourir (CEDH, 29 juillet 2002, aff. n° 2346/02, Pretty c/ Royaume-Uni).
Deux grandes lois réglementent la prise en charge de la fin de vie :
• la loi relative aux droits des malades et à la fin de vie du 22 avril 2005, dite loi « Leonetti » ;
• la loi créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie du 2 février 2016, dite loi « Claeys-Leonetti »
Ces deux textes ont refusé d’autoriser l’euthanasie mais ils ont mis en place différentes procédures permettant de prendre en compte l’état des personnes.
Conformément à l’article L. 1110-5, alinéa 2, du code de la santé publique : « Toute personne a le droit d’avoir une fin de vie digne et accompagnée du meilleur apaisement possible de la souffrance. Les professionnels de santé mettent en œuvre tous les moyens à leur disposition pour que ce droit soit respecté. »
Les professionnels de santé doivent s’abstenir de toute obstination déraisonnable. Ils sont ainsi autorisés à ne pas mettre en œuvre ou à ne pas poursuivre des actes médicaux dans certaines hypothèses (CSP, art. L. 1110-5-1).
En premier lieu, les actes médicaux doivent être inutiles et/ou disproportionnés et/ou n’avoir d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie.
A noter : Depuis l’affaire Vincent Lambert, la nutrition et l’hydratation artificielles constituent des traitements qui peuvent être interrompus (CSP, art. L. 1110-5-1).
En second lieu, il convient de recueillir la volonté conforme du patient. Si ce dernier est hors d’état de l’exprimer, les professionnels de santé doivent se reporter à ses directives anticipées ou, à défaut, au témoignage de la personne de confiance ou, à défaut, de sa famille ou de ses proches.
En outre, lorsque la personne ne peut exprimer sa volonté, il convient de mettre en place une procédure collégiale en vue de vérifier le respect des conditions légales.
Depuis la loi « Claeys-Leonetti » de 2016, il est reconnu aux patients un droit à une sédation profonde et continue jusqu’au décès, associée à une analgésie et à l’arrêt de l’ensemble des traitements de maintien en vie.
Le recours à cette procédure peut être demandé par le patient dans deux hypothèses (CSP, art. L. 1110-5-2) :
• si le patient atteint d’une affection grave et incurable et dont le pronostic vital est engagé à court terme présente une souffrance réfractaire aux traitements ;
• si la décision du patient atteint d’une affection grave et incurable d’arrêter un traitement engage son pronostic vital à court terme et est susceptible d’entraîner une souffrance insupportable.
En outre, cette procédure peut être mise en œuvre par le médecin lorsque la personne est inconsciente et ne peut exprimer sa volonté, à condition toutefois qu’il n’y ait pas d’opposition de la part du patient dans ses directives anticipées ou à défaut de la part de la personne de confiance ou, à défaut, de la part de la famille ou des proches (CSP, art. L. 1110-5-2).
La sédation profonde et continue associée à une analgésie doit être réalisée après la mise en œuvre d’une procédure collégiale. Le décès n’est pas provoqué par la sédation mais par l’évolution naturelle de la maladie. La sédation permet seulement, par le biais de médicaments, de diminuer la vigilance en vue de faire disparaître la perception de la situation.
A noter : Les dispositions légales relatives à l’arrêt des traitements ont été validées par le Conseil constitutionnel en 2017 (C. const., 2 juin 2017, n° 2017-632 QPC, Union nationale des associations de familles de traumatisés crâniens et de cérébro-lésés).
L’assistance au suicide et l’euthanasie active reviennent fréquemment dans le débat politique. Néanmoins, à ce jour, il se dégage un fort consensus sur le refus de légaliser ces mécanismes. Ils sont donc pour l’instant écartés de la législation française.
L’avortement – ou interruption volontaire de grossesse (IVG) – est un sujet extrêmement sensible, qui a évolué fortement au cours du XXe siècle en France.
Par une loi du 1er août 1920, le législateur était intervenu pour punir non seulement l’avortement mais également tout discours informatif sur ce sujet. Lorsque les discours informatifs sur l’avortement aboutissaient à l’avortement effectif d’une femme enceinte, ce comportement devenait un crime au regard de l’article 317 du code pénal.
Au cours de la Seconde Guerre mondiale, l’avortement devient un crime d’Etat passible de la peine de mort. Ce n’est qu’à la Libération que ce texte a été abrogé. Néanmoins, l’avortement restera un délit en France pendant encore plusieurs décennies.
Il faut attendre l’année 1975 pour obtenir une dépénalisation de l’interruption volontaire de grossesse à titre expérimental. A cette époque, le délai pour avorter était de 10 semaines et la femme souhaitant avorter devait se trouver en détresse. L’avortement fut ensuite définitivement légalisé en 1979.
Par la suite, la législation relative à l’avortement a subi plusieurs évolutions.
En 2001, le délai de 10 semaines est passé à 12 semaines de grossesse.
En 2013, la sécurité sociale est venue rembourser à 100 % ce dispositif et enfin, en 2014, le législateur a supprimé la condition de détresse de la femme qui souhaite avorter.
Plusieurs députés ont déposé en août 2020 une proposition de loi visant notamment à allonger de 2 semaines le délai légal pour avorter passant de 12 à 14 semaines de grossesse. Ce texte a été adopté en première lecture par l’Assemblée nationale puis rejeté par le Sénat le 20 janvier 2021.
Le législateur ne fixe pas de condition d’âge. Toutes les femmes, mêmes mineures, peuvent recourir l’IVG. Néanmoins, les jeunes femmes mineures doivent être accompagnées dans leur démarche par leur représentant légal ou, à défaut, par une personne majeure de leur choix (CSP, art. L. 2212-7).
L’IVG peut être réalisée selon deux méthodes : chirurgicale ou médicamenteuse. L’IVG chirurgicale est autorisée jusqu’à la fin de la 12e semaine de grossesse et ne peut être réalisée que par un médecin contrairement à l’IVG médicamenteuse qui peut être pratiquée par un médecin ou une sage-femme uniquement jusqu’à la fin de la 5e semaine de grossesse ou, éventuellement, jusqu’à la fin de la 7e semaine de grossesse lorsqu’elle est pratiquée en établissement de santé (CSP, art. L. 2212-1 et suivants).
Le médecin, ou la sage-femme, est tenu d’informer la femme des méthodes médicales et chirurgicales d’IVG, des risques encourus ainsi que des effets secondaires potentiels (CSP, art. L. 2212-3).
A noter : Les médecins comme les sages-femmes ne sont jamais tenus de pratique une interruption volontaire de grossesse mais ils doivent, sans délai, informer la femme de leur refus et lui communiquer immédiatement le nom de praticiens susceptibles de réaliser cette intervention (CSP, art. L. 2212-8). Le délit d’entrave à l’IVG est puni par le code de la santé publique de 2 ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende (CSP, art. L. 2223-2).
Au début des années 1990, des problématiques liées à l’évolution des pratiques médicales se sont posées. Une première loi relative à la bioéthique a ainsi été votée en 1994. Elle prévoyait une loi de révision obligatoire. Une deuxième loi de 2004 puis une troisième en 2011 ont ainsi été promulguées. La loi relative à la bioéthique du 7 juillet 2011 prévoyait une clause de révision dans un délai maximal de 7 ans.
Un nouveau projet de loi « bioéthique », objet de multiples, rebondissements a été définitivement adopté le 29 juin dernier et déclaré conforme à la Constitution le 29 juillet (C. const., 29 juill. 2021, n° 2021-821 DC).
La nouvelle loi n° 2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique élargit la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de femmes et aux femmes seules et donne de nouveaux droits pour les enfants nés d’une PMA. Ceux-ci pourront accéder à leur majorité à des données « non identifiantes » du donneur (ex. : ses caractères physiques ou encore son âge). Pour cela, il conviendra de saisir la nouvelle Commission d’accès aux données non identifiantes et à l’identité du donneur.
Par ailleurs, un nouveau mode de filiation est également prévu pour les couples de femmes. Ces couples peuvent procéder à une reconnaissance conjointe de l’enfant avant sa naissance devant notaire.
A noter : Le législateur est venu préciser que les couples de femmes qui ont eu recours à une AMP à l’étranger avant la publication de la loi « bioéthique » peuvent établir postérieurement une reconnaissance conjointe de l’enfant dont la filiation n’est établie qu’à l’égard de la femme qui a accouché. Elles disposent d’un délai de 3 ans à compter de la publication de la loi.
En outre, cette nouvelle loi « bioéthique » vient réglementer l’autoconservation des gamètes en dehors de tout motif médical en vue de recourir à une PMA par la suite. Ce mécanisme est désormais possible pour toutes les femmes et les hommes. On précisera que le législateur pose toutefois des limites. En effet, des conditions d’âge seront prévues par la suite par décret.
Le principe de l’interdiction de la gestation pour autrui (GPA) en France est maintenu par la loi nouvelle. Cependant, celle-ci apporte des nouveautés en matière de filiation des enfants nés d’une GPA à l’étranger. Elle vient unifier la jurisprudence de la Cour de cassation. La transcription de l’acte d’état civil étranger est donc possible mais limitée au parent biologique. Le parent d’intention devra recourir à une procédure d’adoption.
Les directives anticipées
Les directives anticipées peuvent être rédigées par toute personne majeure. Les majeurs protégés doivent solliciter l’autorisation du juge ou du conseil de famille.
Elles prennent la forme d’un document écrit, daté et signé qui recense les nom, prénoms, date et lieu de naissance de la personne concernée. Elles permettent d’exprimer par avance sa volonté sur sa fin de vie « en ce qui concerne les conditions de la poursuite, de la limitation, de l’arrêt ou du refus de traitement ou d’acte médicaux » (CSP, art. L. 1111-11, al. 1er).
Ces directives anticipées sont révocables à tout moment et sans formalités. Elles peuvent être conservées par la personne elle-même, une personne de confiance, le médecin ou être enregistrées dans le dossier médical partagé.
De surcroît, elles s’imposent au médecin excepté, dans deux situations :
• en cas d’urgence vitale pendant le temps nécessaire à une évaluation complète de la situation ;
• lorsque les directives anticipées apparaissent manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale.
La personne de confiance
Les personnes majeures peuvent, si elles le souhaitent, désigner une personne de confiance. Les majeurs protégés doivent solliciter l’autorisation du juge ou du conseil de famille. Ce rôle peut être assuré par un parent, un proche ou le médecin traitant (CSP, art. L. 1111-6).
La désignation doit être réalisée par écrit et cosignée par la personne désignée. Au même titre que les directives anticipées, ladite désignation peut être révisée et révoquée à tout moment.
La personne de confiance est consultée lorsque le patient est hors d’état d’exprimer sa volonté. Elle intervient en son nom. De surcroît, elle peut accompagner le patient dans ses démarches et assister aux entretiens médicaux si ce dernier le souhaite.
La loi du 1er août 1920 réprimant l’avortement interdisait également la propagande anticonceptionnelle. En 1967, le législateur autorisa l’accès à la contraception. Toutefois, elle n’était pas accessible aux mineurs sans l’accord de leurs parents et la publicité demeurait interdite. La contraception fut ensuite généralisée en 1974 en raison de son remboursement par la sécurité sociale.