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Enfance : la révolution du travail social de l’après-pandémie aura-t-elle lieu ?

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La Covid-19 a mis à mal le fonctionnement traditionnel des organisations, obligeant les professionnels à se questionner. Certains ont su tirer les leçons de cette période singulière. D’autres, pas encore, au risque de compromettre davantage la qualité des prises en charge.

Mars 2020. Dans cette MECS de Haute-Savoie, la révolution est en marche. Exit le fonctionnement habituel, trop fragmenté et source de confusion pour les enfants accueillis. Place à une présence continue des équipes, qui se relaient désormais par tranche de quatre jours. « Cette décision, nous l’avons prise de façon collaborative avec les personnels. Et l’effet sur leur bien-être au travail a été immédiat », détaille l’ex-directeur de la structure, Raphaël Primet, aujourd’hui à la tête du dispositif de prévention spécialisée à la Sauvegarde de l’enfance et de l’adolescence des Savoie, association basée à Chambéry.

La crise a en effet obligé les organisations à faire preuve d’agilité. Laquelle a favorisé l’adaptation rapide des pratiques, permettant à certains professionnels de se recentrer sur le cœur de leur métier. Conséquence sur les enfants protégés : un apaisement avéré pendant le premier confinement. « L’arrêt de la course aux rendez-vous a permis de redécouvrir combien les interactions sociales sont un élément essentiel du développement des enfants. Nous avons aussi compris le besoin de lutter contre l’isolement, notamment parental, dont les plus vulnérables sont les premières victimes, abonde Thierry Couvert-Leroy, de la Croix-Rouge. En nous obligeant à aller vers les familles, cette crise nous a également donné l’occasion de valoriser leurs compétences et de mieux les inclure dans notre accompagnement. » De fait, un meilleur équilibre entre les professionnels, les familles et les enfants a pu être trouvé, avec des postures plus égalitaires favorisant une relation de confiance.

De la visio, mais pas trop

Sur la question de l’« aller vers », des dispositifs ont aussi vu le jour. Lieux d’accueil éphémères, aide alimentaire, don de matériel informatique, actions de soutien à la parentalité par téléphone ou visioconférence… Autant de solutions qui ont quasiment disparu à la levée du confinement. « Si cette période a pu apparaître comme un moment suspendu, le fonctionnement dégradé par les contraintes sanitaires a eu raison des fragiles tentatives vers une transformation durable de l’action sociale dans le secteur de l’enfance », résumait Marie-Agnès Féret, chargée d’études à l’Observatoire national de l’action sociale, lors de son intervention aux Assises nationales de la protection de l’enfance en juin dernier.

Deux pratiques sortent toutefois leur épingle du jeu : l’usage du numérique et son corollaire, l’accompagnement à distance. Mais se manifestent d’ores et déjà des professionnels partagés sur les bienfaits de cette métamorphose à long terme. « D’un point de vue managérial, c’est un gain de temps et des économies sur les déplacements, mais pour les professionnels de terrain, nettement moins enthousiastes, c’est une crainte de voir les relations se détériorer si l’accueil physique ne reprend pas rapidement. Nous exerçons un métier de relation, il ne faut pas l’oublier », prévient Anne Mallet, directrice d’un lieu de vie pour enfants placés à l’île d’Yeu (Vendée).

Coopération

Autre impératif mis en évidence par la crise : la nécessité de s’appuyer sur des alliances éducatives. Lorsque ces alliances étaient défaillantes, comme dans la Mecs à laquelle cette assistante familiale est rattachée en Dordogne, elles le sont tout simplement restées. « A part un suivi sporadique par la psychologue et l’orthophoniste externes au service, je n’ai reçu aucun signe de vie des référents de placement familial de l’aide sociale à l’enfance pendant le premier confinement, déplore Désirée de Lange. J’étais littéralement abandonnée à mon sort, alors que mes collègues au sein de mon institution ont bénéficié du renfort des éducateurs des établissements voisins. »

Certaines organisations ont ainsi raté une belle occasion de sortir du cadre traditionnel, en « oubliant » une part des acteurs incontournables de la protection de l’enfance. Est-il toutefois trop tard pour rectifier le tir ? Pas forcément, estime Raphaël Primet qui, au passage, leur glisse un conseil : « Faisons confiance à l’expertise de ceux, professionnels et pairs, qui accompagnent les enfants au quotidien et autorisons-les à participer de façon proactive à l’amélioration de nos structures. »

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