« Ce qu’on remarque d’abord, ce sont les marques de scarification sur leurs avant-bras. O., 34 ans. S., 22 ans. M., 20 ans, A., 26 ans. Syrien, Afghan, Kurde, Irakien. Tous égaux face au désespoir et à la rage qui monte un peu plus chaque jour. Devenus fous d’attendre et de tourner en rond. » Ainsi commence ce livre sur les réfugiés de Lesbos. Le nom de leur camp d’internement ? Moria, le plus grand de Grèce. Chaque jour, une centaine d’hommes, de femmes et d’enfants venus de Turquie y arrivent en bateau ou à la nage. Bientôt, ils remarqueront les barbelés et mangeront des moisissures. Interprète pour une ONG, l’auteure raconte les destins qui se croisent, ceux des exilés qu’elles n’osent plus regarder dans les yeux. Ceux des habitants de l’île, ouverts ou hostiles, comme ces cafés qui n’acceptent pas de servir les noirs. Ceux des bénévoles, telle Ingrid, une infirmière norvégienne qui passe son temps libre à tricoter des pulls. Jean-Paul, Camerounais de 24 ans, n’a pas eu le sien. Il est mort de froid. En septembre 2020, le Covid-19 a débarqué au camp. Moria a été brûlé.
« L’espoir piégé. Avec les réfugiés de Lesbos » – Mathilde Weibel – Ed. L’Harmattan, 17 €.