Tout professionnel, quel qu’il soit, dispose d’une exception à son secret professionnel s’il concourt à la mise en œuvre de la protection de l’enfance. C’est en substance ce que dit la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 8 juin 2021.
Dans cette affaire, des professionnels de la protection de l’enfance avaient organisé une réunion de synthèse sur la situation d’un enfant, à laquelle participèrent deux médecins. Au cours de la réunion, ces deux médecins révélèrent des informations pouvant faire suspecter des privations, sévices ou violences psychologiques provoqués par la mère contre son enfant. La situation fut ensuite signalée au procureur de la République en vue de l’ouverture d’une mesure d’assistance éducative.
La mère de l’enfant assigna les deux médecins en justice pour violation du secret professionnel. A l’issue d’une information judiciaire, le juge d’instruction prononça un non-lieu. Une décision confirmée en appel.
Dans son pourvoi en cassation, la mère se référait à l’article 226-14 du code pénal qui liste les cas où le secret professionnel des médecins peut être levé. Pour la plaignante, le fait que les médecins aient révélé des informations dans une réunion de la protection de l’enfance n’était pas un signalement au sens de cet article. Sur ce point, la Cour de cassation lui donne raison.
En revanche, la Haute Juridiction explique qu’en vertu de l’article L. 226-2-2 du code de l’action sociale et des familles (CASF), « les personnes soumises au secret professionnel qui mettent en œuvre ou apportent leur concours à la politique de la protection de l’enfance sont autorisées à partager entre elles des informations à caractère secret afin d’évaluer une situation individuelle, de déterminer et de mettre en œuvre les actions de protection et d’aide dont les mineurs et leur famille peuvent bénéficier, après en avoir informé les personnes responsables du mineur ».
Pour la Cour de cassation, les conditions d’application de l’article L. 226-2-2 du CASF sont, dans cette affaire, réunies. Du fait de leur participation à la réunion, les deux médecins faisant l’objet du recours de la mère sont de fait inclus dans la catégorie des personnes « apportant leur concours à la politique de la protection de l’enfance ». Peu importe donc le statut des personnes soumises au secret professionnel qui participent aux réunions de la protection de l’enfance : si l’objet du partage est légitime et que les parents ont été préalablement informés, le secret professionnel peut être levé.
Cour de cassation, chambre criminelle, 8 juin 2021, n° 20-86000.