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La solitude des directeurs d’établissement face à la gestion du risque

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Confrontée à la violence d’un résident, la direction d’un établissement est dans l’obligation d’assurer la sécurité de son personnel et des autres personnes accompagnées. Elle dispose pour cela de certains outils mais reste souvent seule face à la gestion du risque.

Prévenir la violence des usagers est indispensable. Mais comment réagir après le passage à l’acte ? Malgré la diversité des établissements qui accueillent et accompagnent des personnes, des recommandations communes existent. Ainsi, la première chose qu’un directeur doit mettre en place est le recueil de la parole du professionnel. « Dans un premier temps, il ne s’agit pas d’essayer de comprendre ce qui s’est passé, mais de s’intéresser au ressenti du salarié, à ses éventuelles douleurs. On ne lui pose pas la question de savoir s’il est victime ou non. On part du principe qu’il l’est », assure Emmanuel Martineau, directeur général de l’association Kervihan, qui gère neuf établissements dans le Morbihan.

Pour autant, ce n’est pas si simple. Parfois, le professionnel considère qu’il n’a pas été agressé. Il banalise, minimise l’insulte ou le coup reçu en estimant que ce sont les « risques du métier ». Pire, il culpabilise et se considère comme responsable de la situation. « Récemment, une salariée a été gravement mordue. Elle s’est sentie coupable. Elle imaginait avoir mal accompagné l’usager. Non, la violence ne fait pas partie de la fonction ! Les salariés ne sont pas là pour se prendre des coups », s’insurge Emmanuel Martineau.

Dans ce contexte, l’équipe doit prendre le relais pour tenter de raisonner la « victime » afin que l’acte soit traité et que le salarié concerné ne soit pas pris en grippe par son agresseur. Par ailleurs, les effets indésirables doivent être consignés sur des fiches dédiées. Cependant, un certain nombre d’événements passent à la trappe. « Tout n’est pas déclaré, on signale surtout les violences physiques ou sexuelles. Les documents sont ensuite remis au directeur, qui les transmettra ou non aux autorités de tutelle », prévient Anaïs Harre, directrice adjointe du foyer Les Salines, à Dunkerque. Mais de même que d’autres professionnels, elle ne se sent pas suffisamment épaulé : « Quand on alerte les autorités, elles ne nous aident pas forcément. Plusieurs de nos déclarations restent sans retour. Ou alors on nous demande ce que nous avons mis en place pour prévenir la violence sans rien nous proposer pour que la situation s’améliore. Le responsable de l’établissement est abandonné à son propre sort. »

Police et gendarmerie encore peu réactives

En fonction du degré de gravité de la violence, un suivi psychologique est proposé au professionnel. Parallèlement, la famille du résident agresseur est contactée ainsi, éventuellement, que les forces de l’ordre. Dans son dernier rapport, l’Observatoire national des violences en milieu de santé (ONVS) encourage d’ailleurs les directeurs de structures à se rapprocher davantage des services de la police ou de la gendarmerie. Mais, là encore, ces derniers ne sont pas toujours réactifs. « Leurs services ont souvent du mal à comprendre l’urgence de la situation, affirme Emmanuel Martineau. Comme beaucoup de résidents sont sous curatelle ou sous tutelle, leurs actes ne sont pas pénalement répréhensibles. Nous sommes donc habitués à ce que la police ne se déplace pas, ou tardivement. Du coup, nous ne les appelons pas après chaque agression. »

Si besoin, le professionnel a aussi la possibilité d’exercer son droit de retrait. Très encadré, celui-ci n’est toutefois que rarement activé par les salariés. Directeur général de La Sauvegarde 56, association d’action sociale du Morbihan, Jean-Guy Hemono le certifie : « En quarante ans dans le secteur, je n’ai jamais eu à en gérer. » Il précise également qu’un résident violent envers un professionnel est rarement sanctionné. Et en aucun cas renvoyé de la structure : « Nous avons une obligation d’accompagnement. L’usager est déjà en situation précaire. En l’excluant, on risque d’aggraver sa situation ou son handicap. » En revanche, des sanctions disciplinaires sont prévues, principalement avec les enfants.

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