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« Je préfère parler de comportement défensif »

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Agressivité, agitation, trouble du comportement… La terminologie est variable pour désigner la violence émanant des résidents en Ehpad. Selon Anne-Laure Butault, auteure d’un mémoire sur le sujet, celle-ci s’apparente davantage à une réponse qu’à une intention.
Dans votre mémoire, vous parlez de « comportement défensif » et non de violence. Pour quelle raison ?

Le mot « violence » a du mal à être entendu dans le secteur. Quand on l’emploie à propos des résidents, une opposition se crée systématiquement. Il y a d’un côté le soignant, qui est la victime, et de l’autre l’usager, qui incarne le méchant. Cela n’est pas très constructif. L’idée est d’essayer de savoir ce qui se cache derrière cette violence, de rechercher pourquoi il y a eu des menaces, des coups ou des incivilités. C’est pourquoi, plutôt que de parler de violence, je préfère utiliser les termes de « comportement défensif ». Cette pulsion représente davantage une réponse qu’une intention. Le résident ne souhaite pas forcément se montrer agressif. Parfois, certaines personnes âgées n’ont plus les mots pour exprimer une douleur, une peine ou une souffrance. Alors, elles le formulent en serrant les poignets d’un professionnel, par exemple. Cela résulte surtout des fragilités physiques, psychiques cognitives ou sociales, liées au vieillissement. L’ennui est que la question est souvent occultée. A l’école, en formation, personne ne nous en parle. On met l’accent sur la maltraitance exercée par le personnel. C’est comme si la violence des résidents n’existait pas. Qu’elle soit nommée « agressivité » par les psychothérapeutes ou « agitation » par les médecins, elle est bien réelle.

L’Observatoire national des violences en milieu de santé (ONVS) hiérarchise la violence en quatre niveaux. A quoi correspondent-ils ?

Tout d’abord, il est important de souligner que le processus est gradué de l’agressivité à l’agression. Et que la réponse diffère selon l’établissement, le contexte, le résident et l’acte commis. Le niveau 1 correspond aux injures, insultes, provocations, menaces et nuisances. Le niveau 2 représente les menaces d’atteinte à l’intégrité physique. Le troisième échelon s’applique aux violences volontaires et à l’atteinte à l’intégrité physique. Le dernier stade étant celui de la violence avec arme. On différencie aussi les violences physiques des violences psychologiques parce que les solutions à apporter ne sont pas nécessairement les mêmes. Dans tous les cas, la prise en charge dépend aussi beaucoup de la manière dont chaque personne vit la situation. Celle-ci peut être ressentie comme violente pour l’un et pas pour l’autre. C’est extrêmement subjectif. Il arrive qu’une insulte soit plus blessante et traumatisante qu’un coup.

L’environnement institutionnel peut-il pousser le résident à être agressif ?

Par nature, l’institution peut, en effet, générer de l’agressivité ne serait-ce que parce qu’elle regroupe un collectif qui n’est pas homogène. La violence du résident relève parfois d’une réaction à des émotions désagréables qu’il perçoit à travers un environnement inadapté. Par exemple, le fait pour une personne âgée d’entrer en établissement alors qu’elle ne le désire pas peut susciter un comportement de défense. C’est parce qu’elle est malheureuse de cette situation qu’elle réagit de cette manière. D’ailleurs, on observe fréquemment ce phénomène depuis le début de la crise sanitaire : quand les contraintes imposées ont du mal à être acceptées par certains résidents, elles provoquent chez eux des tensions et des crispations. Comprendre ce qui les motive est essentiel pour les prévenir et assurer une qualité d’accompagnement aux résidents et une qualité de vie au travail des professionnels.

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