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La nationalité française

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La nationalité française

Crédit photo Alison Dahan, Clarisse Girard
Comment devient-on Français ? Il existe plusieurs manières d’accéder à la nationalité française, entre attribution et acquisition. Mais cette citoyenneté peut être retirée dans certains cas. Panorama des principales dispositions applicables à la nationalité française régies par le code civil.

Les états sont souverains pour déterminer les conditions d’attribution de leur nationalité aux ressortissants étrangers. Néanmoins, la Cour internationale de justice (CIJ) est venue consacrer un principe dans son célèbre arrêt Nottebohm du 6 avril 1955. Elle retient en effet que « la nationalité est un lien juridique ayant à sa base un fait social de rattachement ». En conséquence, au regard du droit international, l’octroi de la nationalité repose sur l’existence d’un lien réel entre l’Etat et la personne concernée.

En droit français, les conditions d’entrée dans la communauté française sont posées par le code civil qui prévoit également des hypothèses dans lesquelles la nationalité peut être retirée.

Le présent dossier dressera un panorama des différents mécanismes d’entrée et de sortie de la communauté nationale. Il sera suivi d’un focus sur la question des titres de séjour.

I. Entre acquisition et attribution de la nationalité française

En France, les individus peuvent se voir attribuer la nationalité dès la naissance ou l’acquérir au cours de leur vie pour l’avenir.

A. Attribution de la nationalité française

1. Le droit du sang

« Est français l’enfant dont l’un des parents au moins est français ? » (code civil [C. civ.], art. 18). Dès lors, la nationalité française est attribuée dès la naissance par la filiation avec au moins un parent de nationalité française. Il convient d’apprécier la nationalité du ou des parents de l’enfant au jour de la naissance de ce dernier.

A noter : Il importe peu que l’enfant soit né en France ou que les parents de ce dernier soient ou non mariés.

Le droit du sang s’applique également aux enfants qui ont été adoptés plénièrement. Pour mémoire, l’adoption est dite plénière lorsque le lien de filiation entre l’adopté et sa famille d’origine est remplacé par le nouveau lien. Au contraire, elle est dite simple lorsque l’adoption ne supprime pas le lien d’origine.

2. Le droit du sol

La naissance sur le territoire française confère, dès sa naissance, la nationalité française à l’enfant né en France :

• de parents inconnus (C. civ., art. 19) ;

• de parents apatrides (C. civ., art. 19-1) ;

• de parents étrangers pour lequel les lois étrangères de nationalité ne permettent en aucune façon qu’il se voie transmettre la nationalité (C. civ., art. 19-1) ;

• dont l’un au moins des parents est né en France (C. civ., art. 19-3).

En dehors de ces quelques situations, la naissance sur le territoire français ne permet pas l’attribution automatique de la nationalité française. En effet, le législateur est venu poser des conditions spécifiques en fonction de l’âge de l’enfant afin de restreindre l’accès à la nationalité par le droit du sol (voir tableau ci-dessous).

A noter : Lorsque l’enfant est né à Mayotte, il est soumis à une condition supplémentaire. Il ne peut acquérir la nationalité française que si, à la date de sa naissance, l’un de ses parents au moins résidait en France de manière régulière et ininterrompue depuis plus de 3 mois (C. civ., art. 2493).

B. Acquisition de la nationalité française

1. La naturalisation

La naturalisation est l’un des principaux mécanismes d’acquisition de la nationalité française. Elle s’adresse aux personnes majeures (C. civ., art. 21-22) qui résident habituellement en France depuis au moins 5 ans (C. civ., art. 21-17).

La résidence est entendue de façon très large dans la mesure où les autorités vérifient si le demandeur a le centre de ses intérêts en France. Ils prennent notamment en compte les liens familiaux et les intérêts professionnels de la personne. En conséquence, si un ressortissant étranger est marié et a des enfants qui ne résident pas sur le territoire français, sa demande de naturalisation a peu de chance d’aboutir dans la mesure où le centre de ses intérêts familiaux se situe à l’étranger.

A noter : La durée minimale de 5 ans est réduite à 2 ans pour l’étranger qui a par exemple accompli avec succès 2 années d’études supérieures en vue d’acquérir un diplôme délivré par une université ou un établissement d’enseignement supérieur (C. civ., art. 21-18). De surcroît, le code exclut toute condition de durée dans certaines hypothèses limitativement énumérées. Tel est le cas notamment si l’étranger a le statut de réfugié ou s’il a rendu des services exceptionnels à la France (C. civ., art. 21-19).

En outre, pour obtenir la naturalisation, il convient d’être « de bonnes vie et mœurs » et ne pas avoir fait l’objet d’une condamnation pour crimes ou délits constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation ou un acte de terrorisme ou ne pas avoir été condamné à une peine égale ou supérieure à 6 mois d’emprisonnement non assortie d’une mesure de sursis (C. civ., art. 21-23 et 21-27).

En outre, le ressortissant étranger doit justifier de son assimilation à la communauté française notamment en démontrant qu’il a une connaissance suffisante de la langue, de l’histoire et de la société française et qu’il a adhéré aux principes et aux valeurs essentielles de la République (C. civ., art. 21-24). L’intéressé est également tenu de signer une charte des droits et devoirs du citoyen français qui rappelle les principes, les valeurs et les symboles essentiels de la République française.

A noter : En vue de justifier d’une connaissance suffisante de la langue française, le demandeur doit fournir une attestation de réussite à un test linguistique ou un diplôme français de niveau B1 comme par exemple le diplôme national du brevet ou « un diplôme français sanctionnant un niveau au moins égal au niveau 3 de la nomenclature nationale des niveaux de formation »(1).

Après réception du dossier, l’administration mène une enquête et reçoit le ressortissant étranger en entretien avant de rendre une décision motivée. En cas de décision défavorable, l’intéressé est en droit de formuler un recours administratif auprès du ministre chargé des naturalisations dans un délai de 2 mois à compter de la notification de la décision (décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993, art. 45).

2. Le mariage

Un ressortissant étranger peut obtenir la nationalité française lorsqu’il est marié avec une personne de nationalité française sous réserve de remplir certaines conditions légales (C. civ., art. 21-1 et s.).

Le mariage avec un ressortissant français doit avoir été célébré au minimum 4 ans avant la demande d’acquisition de la nationalité. Le délai est porté à 5 ans notamment lorsque le ressortissant étranger ne justifie pas avoir résidé de façon ininterrompue et régulière pendant au moins 3 ans en France à compter du mariage.

De surcroît, la communauté de vie tant affective que matérielle ne doit pas avoir cessée entre les époux depuis le mariage (C. civ., art. 21-2). En outre, comme pour la naturalisation, le demandeur doit justifier d’une connaissance suffisante de la langue française et ne pas faire l’objet de condamnation pénale antérieure (C. civ., art. 21-2).

A noter : Le gouvernement a souhaité reconnaître l’engagement des ressortissants étrangers pendant l’épidémie de la Covid-19. Ainsi l’accès à la nationalité française des personnes exerçant une profession dite « particulièrement exposée ou indispensable à la continuité de la nation pendant la période de crise sanitaire » est facilité si elles peuvent justifier d’un engagement professionnel actif du 24 mars au 10 juillet 2020 ou 17 septembre pour Mayotte et la Guyane, et du 17 octobre 2020 au 1er juin 2021. Afin de justifier d’une activité professionnelle au cours de cette période, il convient de produire une attestation (en ligne sur le site Internet immigration.intérieur.gouv.fr) et des pièces justificatives (ex. : copie contrat de travail ou déclarations sociales).

Avec ces nouvelles mesures dérogatoires, la naturalisation peut être sollicitée si la personne réside régulièrement en France depuis au moins 2 ans et remplit toutes les autres conditions légales. De même, la procédure déclarative à la suite d’un mariage avec un ressortissant français peut également être accélérée. Cette mesure exceptionnelle est en vigueur jusqu’au 15 septembre 2021.

II. Perte et déchéance de la nationalité

A. La perte de la nationalité

Le code civil prévoit que le ressortissant français qui se comporte comme « le national d’un pays étranger » peut, s’il a la nationalité de ce pays, perdre la qualité de français (C. civ., art. 23-7).

A noter : Cette possibilité n’est pas ouverte à l’encontre des ressortissants français qui partent combattre aux côtés de Daech par exemple dans la mesure où cette organisation n’a pas à ce jour la qualité d’Etat.

B. La déchéance de la nationalité

En tout premier lieu, il convient de préciser que le mécanisme de déchéance de nationalité s’applique uniquement aux ressortissants qui ont acquis la nationalité française et qui disposent d’une double nationalité dans la mesure où la déchéance ne peut avoir pour résultat de rendre un individu apatride (C. civ., art. 25). Elle ne concerne donc pas les individus à qui la nationalité a été attribuée par le droit du sang ou le droit du sol.

La déchéance de nationalité est un dispositif légal qui a été très médiatisé en 2015 à la suite des différents attentats perpétrés sur le sol français.

Ce mécanisme est strictement encadré et opposable uniquement à l’encontre des individus (C. civ., art. 25) :

• condamnés pour un acte qualifié de crime ou délit constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation ou pour un crime ou un délit constituant un acte de terrorisme ;

• exerçant une fonction publique condamnés pour une atteinte à l’administration publique ;

• condamnés pour s’être soustrait aux obligations résultant pour eux du code du service national ;

• qui se sont livrés au profit d’un Etat étranger à des actes incompatibles avec la qualité de français et préjudiciables aux intérêts de la France.

Les faits reprochés au ressortissant français doivent avoir été commis avant l’acquisition de la nationalité ou dans un délai de 10 ans suivant l’acquisition de la nationalité. Ce délai est porté à 15 ans lorsqu’une atteinte a été portée aux intérêts fondamentaux de la nation (C. civ., art. 25-1).

La déchéance de nationalité doit être notifiée au ressortissant français avec les motifs de droit et de fait justifiant cette mesure. A compter de la notification de ces motifs, l’intéressé dispose ensuite d’un délai de 1 mois pour faire parvenir ses observations en défense. Ce n’est qu’à l’expiration de ce délai de 1 mois que le gouvernement peut déclarer par décret motivé pris sur avis du Conseil d’Etat que le ressortissant a perdu la nationalité française (décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993, art. 61).

Point actualité : En 2015, le gouvernement avait déchu cinq binationaux de la nationalité française. Les cinq ressortissants avaient été condamnés pour avoir apporté un soutien matériel et financier à une organisation qui avaient été en lien avec les auteurs d’un attentat à Casablanca (Maroc) en 2003. Un recours avait été porté devant la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH). Elle s’est prononcée le 25 juin 2020 et a validé les déchéances de nationalité en estimant que ces dernières n’avaient pas eu de conséquences disproportionnées sur leur vie privée (CEDH, 25 juin 2020, aff. Ghoumid et autres c/France, nos 52273/16, 52285/16, 52290/16, 52294/16 et 52302/16).

Le défaut d’assimilation à la communauté française

L’assimilation à la communauté française est une condition de recevabilité de la demande de naturalisation (C. civ., art. 21-24). Le défaut d’assimilation d’un ressortissant étranger à la communauté française constitue ainsi un obstacle à l’acquisition de la nationalité française par cette voie.

Le défaut d’assimilation à la communauté française peut également constituer le fondement d’une opposition à l’acquisition de la nationalité française. Le gouvernement peut par exemple s’opposer à l’acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger dans un délai de 2 ans à compter de la délivrance du récépissé de déclaration de nationalité (C. civ., art. 21-4 et 26).

A titre d’illustration, le Conseil d’Etat a reconnu l’existence d’un défaut d’assimilation d’une femme qui avait refusé de serrer la main des représentants de l’Etat lors de la cérémonie d’accueil dans la nationalité française organisée à la préfecture (CE, 11 avril 2018, n° 412462). Très récemment, la Haute juridiction a estimé qu’un individu dont le mode de vie était caractérisé par la soumission de sa femme contrevenait aux valeurs de la société française et notamment au principe de l’égalité entre les sexes. De ce fait, elle a retenu le défaut d’assimilation à la société française de l’individu et a rejeté sa demande (CE, 9 novembre 2020, n° 436548).

Les modalités de résidence légale sur le territoire

Les titres de séjour

Les ressortissants étrangers âgés de plus de 18 ans qui ne remplissent pas les conditions légales pour acquérir la nationalité française doivent avoir un titre de séjour pour pouvoir séjourner sur le territoire français pour une durée supérieure à 3 mois. La législation française prévoit différents types de titres de séjour selon le motif. On retrouve ainsi des cartes de séjour « vie privée et familiale », « salarié », « visiteur » ou encore « retraité ». Les conditions d’octroi d’un titre de séjour diffèrent en fonction du motif de séjour.

Le 24 mars dernier, un décret est venu modifier la procédure de dépôt et d’instruction des demandes de certains titres de séjour (décret n° 2021-313 du 24 mars 2021 relatif à la mise en place d’un téléservice pour le dépôt des demandes de titres de séjour). Ainsi les ressortissants étrangers entrés sur le territoire français avec un visa de long séjour qui arrivent à la majorité ou qui souhaitent renouveler leur titre doivent à présent déposer leur demande au moyen d’un téléservice. Un téléservice avait également été mis en place pour les étudiants étrangers en novembre 2020. A terme, les autorités souhaitent que le téléservice s’applique à l’ensemble des demandes de titre de séjour. La Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) avait été saisie d’une demande d’avis par le ministre de l’Intérieur sur le projet de ce décret (délibération n° 2020-107 du 29 octobre 2020). Elle a estimé que le ministère devait mettre en œuvre des moyens permettant aux ressortissants étrangers d’accéder « véritablement » au téléservice. La dématérialisation des démarches administratives est très critiquée par les associations qui viennent en aide aux personnes sans papiers. Elles estiment notamment que ces nouvelles modalités fragilisent la situation des ressortissants étrangers qui rencontrent des difficultés en pratique.

Le regroupement familial

Les ressortissants étrangers qui disposent d’un titre de séjour peuvent demander, sous certaines conditions, à ce que leur conjoint majeur et leurs enfants mineurs les rejoignent sur le territoire français par le biais de la procédure de regroupement familial.

Pour prétendre à la mise en place de cette procédure, le ressortissant étranger doit résider en France depuis au moins 18 mois avec une carte de séjour d’au moins 1 an ou une carte de résident ou encore une carte de résident de longue durée UE. De plus, il doit prouver qu’il dispose de ressources suffisantes et d’un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant dans la même région géographique pour accueillir les membres de sa famille en France (code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile [Ceseda], art. L. 411-1 et s. jusqu’au 30 avril 2021/ Ceseda, art. L. 434-7 et s. à compter du 1er mai 2021).

Au cours de ces derniers mois, la procédure de regroupement familial a été impactée par une succession d’instructions prises par l’exécutif en raison de l’épidémie de la Covid-19. Toutefois, par une ordonnance du 21 janvier 2021, le juge des référés du Conseil d’Etat a suspendu une circulaire du Premier ministre du 29 décembre 2020 qui ne prévoyait pas de dérogations pour les titulaires d’un visa au titre du regroupement familial, mais également l’instruction donnée par le ministre de l’Intérieur de ne pas délivrer les visas demandés dans le cadre de ces procédures (CE, ord, 21 janvier 2021, n° 447878 et 447893). Depuis cette ordonnance, l’instruction a été abrogée et l’attestation de déplacement international prévoit à présent une dérogation pour les titulaires d’un visa long séjour délivré au titre du regroupement familial.

Notes

(1) Plus d’informations sur service-public.fr – https://bit.ly/2PwWyAC.

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