Crise sanitaire : l’isolement des personnes âgées aggravé. En France, les 300 000 personnes âgées se trouvant en situation de « mort sociale » – elles ne rencontrent quasiment jamais personne (réseau familial, amical ou associatif, voisins) – ont été fortement pénalisées par l’épidémie de Covid-19. C’est le constat dressé par Les Petits Frères des pauvres dans un rapport publié le 30 mars.
Pour le président de l’association, Alain Villez, cette enquête, réalisée en collaboration avec le Cercle Vulnérabilités et Société, établit que « les personnes âgées ne vivent pas la crise de la même manière en fonction de leurs ressources et de leur habitat ». Ainsi, 45 % de celles percevant des revenus mensuels inférieurs à 1 000 € ont mal vécu le confinement, contre 18 % de celles touchant plus de 2 000 €.
Autre constat : le confinement a globalement été mieux vécu en résidence qu’à domicile ou en Ehpad (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes). Enfin, 47 % des personnes habitant en résidence autonomie ou services seniors l’ont plutôt bien vécu, contre 25 % à domicile et 27 % demeurant en établissement. « Si les projecteurs ont été braqués sur la souffrance des personnes âgées en Ehpad, notre étude montre bien que, à domicile aussi, la situation a été vécue très douloureusement », affirme Alain Villez. L’association recommande donc d’améliorer l’offre en développant l’habitat alternatif et en priorisant l’approche domiciliaire dans les Ehpad. « Car ces habitats offrent une voie médiane entre l’isolement absolu et total du domicile et l’environnement contraignant des Ehpad », détaille-t-il.
« Ce rapport montre aussi que la crise a aggravé la fracture générationnelle, souligne Gérard Ribes, psychiatre et gérontologue. La personne âgée est stigmatisée, perçue comme quelqu’un de fragile. » Une fragilité imposant des mesures sanitaires contraignantes à l’ensemble de la population. Mais la pandémie a permis l’émergence de nombreuses actions solidaires (service civique solidarité seniors, livraison des courses à domicile, appels téléphoniques…). Les Petits Frères des pauvres invitent donc à « soutenir et valoriser l’engagement citoyen et les initiatives intergénérationnelles ». « Le risque de guerre des âges existe bien mais nous avons tellement d’exemples de solidarité que je pense qu’on peut être optimiste pour le monde d’après », veut croire Alain Villez.
Cese : les représentants des pauvres sur le banc de touche. La publication du décret relatif à la réforme du Conseil économique, social et environnemental (Cese) suscite la colère des acteurs de la lutte contre la pauvreté et l’exclusion. Parmi les 175 nouveaux sièges prévus, seulement deux sont attribués aux représentants de cette partie de la population. C’est un de moins que lors du précédent mandat. Le collectif Alerte et ATD quart monde dénoncent une « sous-représentation » des personnes les plus démunies. Marie-Aleth Grard, présidente d’ATD quart monde, a répondu à nos questions. Elle a rappelé que 15 % des Français vivent sous le seuil de pauvreté, et que des associations comme la sienne ont produit dans ces assemblées d’importants rapports qui ont permis ensuite des avancées législatives comme la création du revenu minimum d’insertion (RMI) à la fin des années 1980 inspirée du rapport « Wresinski ». « Nous attendons du gouvernement qu’il change le décret de ce matin et qu’il montre sa volonté de lutter contre la pauvreté dans notre pays », conclut-elle.