Pour la sociologue Nathalie Chapon, c’est une « révolution » qui suit son cours. Alors qu’ils étaient 2 % en 2010, les assistants familiaux masculins représentent 9 % des effectifs, d’après l’échantillon de plus de 6 300 professionnels que cette enseignante-chercheuse à l’université d’Aix-Marseille a analysé dans le cadre d’une recherche : « Aujourd’hui, on parle de compétences non plus maternelles mais parentales. Au départ, ces hommes devenaient assistants familiaux en suivant leurs femmes, au moment de la retraite. On voit désormais la seconde étape : des hommes qui font ce choix de manière indépendante. »
Le département du Nord comptait 6 % d’assistants familiaux en 2019, un taux en hausse depuis quelques années. Commerciaux, carrossiers, bouchers… « Il n’y a pas de filière type qui amène une personne et sa famille à devenir famille d’accueil », constate Aurélie Pruvost, responsable du pôle « accueil familial ». Pour favoriser le recrutement d’hommes, le département rappelle, dans ses plans de communication, que cette profession s’adresse aux deux sexes. « Il faut dire que les hommes sont bienvenus, montrer des témoignages différents. Et mettre en avant le plaisir associé à cette profession », ajoute-t-elle. A Pôle emploi, 60 conseillers ont aussi été briefés à l’occasion d’un webinaire sur ce métier peu connu de leurs services. « On leur demande de ne pas cibler les femmes qui voudraient s’occuper d’enfants », précise Aurélie Pruvost.
A 37 ans, Fouad Benbahlouli s’est reconverti en assistant familial, suivant l’exemple de sa mère, qui a aussi embrassé cette profession après son départ du foyer familial. « Ses petits s’entendaient bien avec mes enfants, ils voulaient venir dormir à la maison. J’ai sauté le pas en me disant : pourquoi pas moi ? » Intéressé par le métier d’éducateur depuis la vingtaine et attiré par la dimension « humaine », il obtient son agrément voilà cinq ans et accueille aujourd’hui deux enfants de 5 et 12 ans, tandis que sa femme – qui lui a ensuite emboîté le pas – s’occupe d’un troisième garçon de 6 ans. Selon lui, il devrait y avoir plus d’hommes dans le métier « car beaucoup d’enfants recherchent une figure paternelle ». S’il met en avant une intégration plutôt fluide dans le métier, le fait d’être un homme n’a pas été complètement neutre. « Certaines questions qu’on nous adresse n’auraient pas forcément été posées à des femmes. On m’a interrogé durement sur mes capacités en tant qu’homme. »