En 2016, une étude commandée par l’association Emmaüs Connect estimait que 83 % des intervenants sociaux jugeaient le numérique indispensable dans leur pratique professionnelle. Mais moins de 10 % déclaraient avoir reçu une formation au numérique dans leur cadre professionnel ou au cours de leur formation initiale. Et seulement 30 % se disaient en capacité de diriger un usager ayant des lacunes numériques vers un acteur proposant une formation adaptée. Aussi, face à la prolifération des outils numériques et au passage obligé qu’ils constituent désormais dans la relation entre le travailleur social et les usagers, de plus en plus de structures proposent un accompagnement à la maîtrise de ces outils.
En 2015, le plan d’action interministériel en faveur du travail social et du développement social prévoyait l’élaboration d’un « plan numérique pour le travail social ». Alors que, deux ans plus tard, pas l’ombre d’une ébauche de plan s’amorçait, le Haut Conseil du travail social (HCTS) a constitué un « groupe de travail sur l’usage du numérique dans le travail social » : à travers plusieurs publications de recommandations et fiches pratiques, il propose d’informer sur des thèmes tels que : « Pourquoi et comment les travailleurs sociaux se saisissent des outils numériques ? » ou « L’accompagnement social et éducatif individuel et collectif à l’ère du numérique ».
Début 2019, la Cnil (Commission nationale de l’informatique et des libertés) mettait à disposition des professionnels du secteur un « kit d’information » composé de fiches pratiques et de modèles de mandat destinés à « garantir le respect de la vie privée et la confidentialité des données » des bénéficiaires d’un service social. A la fin de la même année, le dispositif Aidants Connect entrait en phase de test : cette start-up d’Etat permet à des aidants professionnels de réaliser des démarches administratives à la place d’un usager, et ce, de façon sécurisée. Ce service opéré par l’Agence nationale de la cohésion des territoires est actuellement mis à disposition de 16 structures et pourrait s’ouvrir à d’autres acteurs s’il se révèle efficace.
D’autres organismes, de nature diverse, se sont depuis lancés dans la course à la formation numérique des professionnels de l’action sociale. Pour développer leurs capacités d’accompagnement numérique, la start-up WeTechCare conseille plusieurs collectivités locales, parmi lesquelles le département de la Seine-Saint-Denis. Situé en Ardèche, le syndicat mixte Numérian dispense aux travailleurs sociaux des formations aux outils numériques, et aide notamment à déployer la solution « Promeneurs du Net » (voir ASH n° 3102 du 15-03-19, page 30), qui assure une présence éducative des travailleurs sociaux sur Internet et les réseaux sociaux à destination des jeunes. La coopérative MedNum propose un accompagnement à la médiation numérique. L’association Emmaüs Connect veut lutter contre l’exclusion numérique…
A Nîmes, la caisse d’allocations familiales du Gard a inauguré fin janvier un projet novateur : la Maison de l’inclusion numérique (L@Min). « Il s’agit d’un tiers-lieu issu d’un partenariat entre la CAF du Gard, le département, Pôle Emploi, la Carsat, des associations et des centres sociaux, qui mettra en place des formations, des ateliers à destination des professionnels de ces structures et de leurs usagers », détaille François-Xavier Degoul, président de la CAF du Gard. Matthieu Perrot, son directeur général, ajoute : « C’est un endroit qui évolue très vite. Tous les jours, de nouvelles propositions émergent. L’idée est que cette maison devienne un véritable centre social numérique 3.0. » Un projet ambitieux, à la hauteur des enjeux liant le numérique au champ médico-social.
Les difficultés posées par la crise sanitaire depuis mars 2020 ont suscité des initiatives internes : ainsi, le Réseau breton des conseillères techniques en travail social (RCTTS) a élaboré un guide d’appui à l’accompagnement social à distance afin d’assurer la continuité du suivi des publics. Ce guide « vise à sécuriser nos pratiques actuelles tout en développant l’utilisation de nouveaux outils adaptés aux évolutions de l’usage du numérique. Il se veut pratique, évolutif, et constitue une base de réflexion pour permettre aux professionnels de s’adapter au contexte. Et peut être à une nouvelle forme d’accompagnement de proximité ». On n’est jamais mieux servi que par soi-même.