Au Groupement des associations partenaires d’action sociale (Gapas), le « virage inclusif » s’est accéléré en 2017. Pour préparer le terrain, il a démarré par de la formation « à des concepts qui ne constituent pas le socle de base des éducateurs », témoigne Mélina Konrad, directrice « hébergement » de cette association de 32 établissements et services, et d’un pôle multiservices autour de l’habitat et de l’accompagnement à domicile. Pour partir des besoins des personnes accompagnées et être au service de leur choix de ne pas vivre en foyer, l’association a misé sur la sensibilisation de ses professionnels. Au programme : les questions d’autodétermination, de valorisation des rôles sociaux, de qualité de vie et de processus de production du handicap. Jusqu’alors éducatrice spécialisée dans la maison d’accueil spécialisée de la Gerlotte dans le Nord, Emeline Bendou a pris le train en marche. Depuis l’an dernier, elle est coordinatrice. Au même titre que quatre collègues, elle est chargée de l’élaboration du projet d’une trentaine de personnes accompagnées, qu’elles soient en foyer ou en logement. « L’éducateur a pour mission première d’être référent technique. Face à des personnes qui ont vécu toute leur vie en institution, il pense et fait à leur place. Là, on inverse la logique. On définit avec la personne un certain nombre d’objectifs mesurables. On transmet ensuite ce projet au coordinateur de ressources qui organise le plan d’action avec les éducateurs », explique-t-elle. Ce poste permet à Emeline Bendou de se concentrer sur une composante essentielle du métier : la conception des projets éducatifs, parfois laissée de côté dans le feu de l’action. Un changement de posture très attendu par la professionnelle, qui, quand elle travaillait en institution, était frustrée de ne pas toujours pouvoir s’adapter aux rythmes et préférences des personnes handicapées. « J’ai toujours eu cette fibre d’individualisation », indique-t-elle. Travailler dans un contexte plus inclusif transforme la forme, mais pas le fond du métier d’éducateur, estime-elle. En revanche, le Gapas a dû se réorganiser et diviser autrement les tâches entre les coordinateurs de projet, de parcours et de ressources, d’une part, et les éducateurs chargés de mettre en œuvre le projet de vie, d’autre part. Une réorganisation à effectifs constants. Le pari de la structure : que les éducateurs se libèrent de cette phase de conception et que la personnalisation des interventions, moins calées sur des rythmes et contraintes collectives, leur dégage du temps.
Management
Des éducateurs devenus « coordinateurs »
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