Vendredi 19 février. Cyril Pierreval est mort. A Pau, ce travailleur social âgé de 46 ans, responsable du pôle « asile » d’un centre d’accueil pour migrants, a été poignardé par un homme d’origine soudanaise. Ce dernier a été mis en examen pour assassinat. Selon nos confrères de La Dépêche du Midi, qui citent le procureur de la République, l’intentionnalité du geste fait peu de doute : l’assaillant a reconnu qu’il nourrissait des rancœurs contre la victime après s’être vu convoqué par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides en vue de lui supprimer son statut de protection. Une démarche qui fait suite à deux condamnations pénales pour violences. Voilà pour les faits.
Ce drame nous édifie pourtant à bien des égards. Il met d’abord en lumière le racisme latent de certains médias qui instrumentalisent la nationalité de l’agresseur. Non, cette tragédie ne peut pas servir à réduire l’ensemble des demandeurs d’asile à la fonction de meurtrier. Nombre d’acteurs de la vie politique n’ont pas hésité à franchir la limite de la décence et de l’honneur en surfant sur les relents sécuritaires malheureusement récurrents en période électorale. Cette attitude ne doit rien au hasard à seulement quatorze mois du prochain scrutin présidentiel et alors que se profilent dès le 13 juin prochain les élections régionales et départementales.
Il nous édifie aussi sur la perception réelle des travailleurs sociaux et médico-sociaux de notre pays. Ce ne sont ni leur abnégation quotidienne, ni les conditions particulièrement dégradées de travail dans lesquelles ils exercent qui les propulsent à la « une » de la presse nationale. Il faut pour cela la disparition tragique de l’un d’entre eux pour que la réalité apparaisse : oui, ce sont bien des hussards de la République. Des hussards en première ligne sur le front de la pauvreté économique et de la misère sociale.
A l’aune du décès de Cyril, cette évidence n’est apparue qu’en filigrane, écrasée par le goût morbide du fait divers et la puanteur de la xénophobie.
Son expertise et son dévouement méritaient évidemment mieux.