« On n’en peut plus de devoir batailler pour notre reconnaissance. La seule chose qui nous fait tenir, c’est de savoir qu’on peut venir en aide aux enfants. » A l’instar de Rachel, les assistants familiaux sont en colère. La grogne n’est pas nouvelle, mais la coupe semble déborder. Les professionnels entendent se battre pour la revalorisation de leur profession, qui regroupe environ 37 000 salariés et représente le premier mode d’accueil des enfants et des jeunes majeurs confiés à l’aide sociale à l’enfance (ASE). Au cœur de leurs revendications : leurs conditions de travail, à commencer par la rémunération, qui varie selon les départements et qu’il s’agit d’harmoniser au plan national (page 8). Les assistants familiaux ont aussi besoin de soutien pour rompre l’isolement dans lequel ils font face aux difficultés à gérer au quotidien avec des enfants en souffrance. Chaque jeune est suivi par un éducateur spécialisé comme référent, mais dont la charge de travail est tellement élevée qu’il ne peut l’accompagner régulièrement, pointe Valérie (page 8). Les professionnels ont également besoin de répit. Or trop peu de départements leur accordent un week-end par mois pour souffler un temps, alors que, selon Sarah, ce devrait être « systématique » (page 9). Résultat : ils s’épuisent et les recrutements sont à la peine. Surtout, les assistants familiaux ont changé : un tiers d’entre eux ont un niveau bac + 3. Loin d’être de simples exécutants, ils estiment avoir leur mot à dire. Mais si la loi du 27 juin 2005 les reconnaît comme partie intégrante des équipes de l’ASE, ils se sentent délaissés. Une situation d’autant plus difficile à vivre que la pression des signalements pour prévenir la maltraitance pèse de plus en plus sur eux, comme en témoigne Angélique (page 10). Afin de « rénover » le métier et de susciter de nouvelles vocations, des discussions sont engagées depuis un an entre les organisations professionnelles et Adrien Taquet, secrétaire d’Etat à l’enfance et à la famille. Les conclusions de ce groupe de travail chargé d’effectuer des propositions pour réformer le statut d’assistant familial sont attendues pour fin février. Avec une moyenne d’âge de la profession de 53 ans, et face à l’accroissement d’enfants placés au fil des années, il y a urgence. Pour Christian Allard, ancien responsable du placement familial dans le Val-de-Marne, l’alerte a été donnée il y a dix ans, et rien n’a bougé. En cause, un management néolibéral des institutions qui nie les besoins réels des enfants (page 12) : « Les familles d’accueil en ont marre qu’on maltraite les enfants, et elles avec. »
L’événement
Des professionnels entre colère et détresse
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