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La prolongation d’office des détentions provisoires en raison de la crise sanitaire était contraire à la Constitution

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Au tout début de l’épidémie de coronavirus et à l’occasion du premier confinement, le gouvernement a prévu la prolongation de plein droit des détentions provisoires, au cours et à l’issue de l’instruction (ordonnance n° 2020-303 du 25 mars 2020). Cette mesure vient d’être déclarée contraire à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans une décision rendue le 29 janvier 2021.

Le 4 novembre dernier, le Conseil constitutionnel était saisi par la Cour de cassation d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). Elle demande si la prolongation automatique des détentions provisoires de l’article 16 de l’ordonnance du 25 mars 2020 était ou non conforme à la Constitution, et plus précisément à son article 66. Pour rappel, cet article dispose que « nul ne peut être arbitrairement détenu » et que « l’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi ».

Dans sa décision, le Conseil rappelle tout d’abord le principe de la liberté individuelle garanti par l’article 66 de la Constitution. Il précise ensuite que toutes les entraves à ce principe doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées aux objectifs poursuivis. Et relève que la prolongation des détentions provisoires a été décidée pour éviter des difficultés de fonctionnement de la justice en période de crise sanitaire. L’objectif poursuivi est, en l’espèce, la sauvegarde de l’ordre public et la recherche des auteurs d’infraction.

Les neuf Sages constatent cependant que ces dispositions maintiennent en détention, de manière automatique, des personnes dont la détention provisoire devait théoriquement s’achever. Ils en déduisent que l’objectif poursuivi ne justifie pas un maintien en détention sans contrôle du juge judiciaire. Le Conseil considère que l’intervention du juge aurait pu, elle aussi, faire l’objet d’aménagements procéduraux. C’est donc logiquement que le Conseil juge inconstitutionnelle la prolongation automatique des détentions provisoires.

S’agissant de la prise d’effet de l’inconstitutionnalité, il fait remarquer que la mesure prise lors du premier confinement ne s’applique plus : il décide en conséquence de son abrogation immédiate ce qui en définitive n’a pas de conséquence pratique. Il précise également que les personnes détenues ne peuvent contester un maintien en détention provisoire en ayant cette décision du 29 janvier comme fondement. Il justifie ce raisonnement au nom du maintien de l’ordre public et de la recherche des auteurs d’infractions, objectifs à valeur constitutionnelle.

La principale limite de la QPC est ici posée. En effet, il apparaît dans cette affaire que des dispositions d’exception peuvent être mises en œuvre puis abandonnées sans un contrôle rapide du juge constitutionnel. Celui-ci est limité par le fait que la QPC intervient a posteriori. Il doit donc se contenter d’une déclaration d’inconstitutionnalité alors même que la disposition litigieuse n’est déjà plus appliquée. Mais en attendant sa décision, des personnes placées en détention provisoire sont restées en prison en méconnaissance de la Constitution.

Conseil constitutionnel, décision n° 2020-878/879 QPC du 29 janvier 2021.

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