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Formation : des programmes cousus main

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Pour aborder les questions de deuil et de fin de vie, la règle s’est imposée de dispenser des enseignements sur-mesure. L’objectif étant de répondre aux besoins spécifiques des structures qui entendent préparer leurs équipes. Même si celles-ci commencent à s’en saisir, reste que cette thématique doit être davantage présente dans les plans de formation des services et établissements.

« Comment ai-je pu ne pas voir qu’il allait mourir ? » Voilà une de ces questions qui entretiennent un sentiment de culpabilité chez nombre de soignants, selon Samir Salman, psychiatre puis médecin généraliste, aujourd’hui intervenant à l’association strasbourgeoise Adèle de Glaubitz, au sein de sa formation « Approche de la mort et gestion du deuil ». « La mort fait peur, parce qu’elle comporte des résonnances personnelles et parce que l’on ne sait pas toujours comment réaliser ces annonces à des résidents, surtout lorsqu’ils sont atteints de déficiences mentales », complète Sophie Dupin-Barrère, psychologue clinicienne et responsable d’APF Formation Nouvelle-Aquitaine et Occitanie. Tous les deux s’accordent à le dire : bien souvent, les professionnels ne sont pas suffisamment armés face aux enjeux de la fin de vie.

Aucun mode d’emploi

Pourtant, des formations existent depuis plusieurs années déjà, voire quelques décennies. Souvent, il leur a fallu du temps pour trouver leur public, le milieu des années 2010 semblant marquer un tournant, à en croire tant l’institut régional du travail social (IRTS) de Tours qu’APF Formation. Personne ne se risque par ailleurs à dire si la crise sanitaire et l’excès de décès qu’elle a entraîné augmenteront la demande dès 2021. Tout juste Odile Clincon, coordinatrice pédagogique chez Ades, un centre de formation du Lot-et-Garonne, note-t-elle que « cette thématique a été maintenue même lorsque d’autres demandes ont, elles, été annulées en 2020 ». Ce qu’appuie Frédéric Dos Santos, responsable du pôle « ingénierie Occitanie » au sein de l’Opco (opérateur de compétences) santé. Avant de souligner que la formation post-Covid « Accompagner le décès d’un collaborateur ou d’une personne accueillie en institution » mise en place à distance dès avril dernier a compté des inscrits malgré les urgences du moment.

A Tours, à Strasbourg… Partout en France, les instituts régionaux de formation en travail social ont mis au point des formations continues sur cette thématique. De même que des associations gestionnaires dotées d’un centre de formation, de Nexem à APF France handicap, en passant par l’alsacienne Adèle de Glaubitz. Une offre que vient compléter l’Opco « santé » par des propositions de formations collectives qui ne figurent pas au catalogue des centres de formation. C’est, par exemple, celle de « référent accompagnateur de fin de vie », qui ambitionne de former des personnes ressources au sein des établissements.

L’accompagnement du deuil des professionnels autant que des familles ou des résidents, une sensibilisation aux signes cliniques de la mort et même un enseignement des aspects successoraux ou une approche culturelle des rituels et religions… La matière à transmettre apparaît des plus vastes. Mais impossible, prévient Sophie Dupin-Barrère, de transmettre un mode d’emploi applicable partout et par tous. Voilà pourquoi, le plus souvent, ces formations sont proposées à la demande des établissements, en interne. Ce qui, justifie Evelyne Duveau, secrétaire générale de Nexem, « facilite les échanges avec l’intervenant, alors qu’une formation simultanée de professionnels issus de divers établissements causerait une certaine réserve ».

Autre condition indispensable, soulignée par Pierre-Yves Lhoumeau, responsable du pôle des formations continues de l’IRTS de Tours : les cours doivent être dispensés à de petits groupes. « Ce qui touche aux valeurs des personnes atteint une corde sensible, et il nous est arrivé qu’un stagiaire explose. Nous faisons assurer ces formations par deux intervenants simultanément pour parer à toute éventualité. »

Réalisées au sein d’un établissement, les formations sont donc adaptées à sa demande précise. Ainsi, selon qu’il s’agit d’une institution ou d’un service à domicile, le lien aux familles ne sera pas traité de façon identique. Souvent de courte durée (deux ou trois jours), ces cursus ne semblent pas imaginables à distance.

De l’avis de tous, les stagiaires viennent de structures de plus en plus diversifiées. Les professionnels des Ehpad (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) sont rejoints par de plus en plus d’intervenants auprès de personnes en situation de handicap, notamment en raison de leur vieillissement. Ainsi, parmi les six demandes pour cette formation en 2021, l’IRTS de Tours en compte cinq émanant de structures d’accompagnement de personnes handicapées. La dernière a été présentée par un service d’hospitalisation à domicile. Des services qui, dans certaines régions, constituent le plus gros bataillon des apprenants, comme chez Ades, située au cœur d’une zone rurale.

Former des équipes pluridisciplinaires

Quant aux métiers exercés, ils rassemblent l’ensemble des intervenants de terrain, plus que d’encadrement, sans prédominance particulière. Le centre de formation de l’association Adèle de Glaubitz incite d’ailleurs fortement les établissements à former à cette question des équipes pluridisciplinaires.

« Ce que nous avons ressenti des attentes de nos adhérents n’était pas tant un besoin de technicité des actes de soin, indique Frédéric Dos Santos. Mais ils cherchaient plutôt à avoir une réflexion sur la posture et le positionnement du professionnel. » Ils ont aussi besoin de « déposer des choses », soutient Odile Clincon, en particulier lorsque le temps d’analyse des pratiques professionnelles leur fait cruellement défaut. Caroline Mertz, psychologue et intervenante à l’Eseis (Ecole supérieure européenne de l’intervention sociale), à Strasbourg, remarque une demande de « réflexion éthique » et des questionnements autour des directives anticipées.

« Se mettre à la bonne distance n’empêche pas les émotions », prévient Sophie Dupin-Barrère, qui voudrait voir se généraliser ces formations, y compris pour ceux qui œuvrent aux côtés des enfants. Une demande que soutient Samir Salman, qui voudrait que ces enseignements se développent de façon préventive. Et puisque le secteur est en passe de recruter de nouveaux professionnels, parfois issus de reconversions, il conviendra de les développer davantage encore, prévoit Frédéric Dos Santos.

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