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Brésil : Vers la mort de l’État social

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Brésil : Vers la mort de l’État social

Crédit photo Étienne Cassagne
Au prétexte d’une économie laminée par la crise sanitaire, le président Jair Bolsonaro a détruit les aides aux plus démunis mises en place par son prédécesseur Lula.

Le 23 janvier dernier, à l’appel des partis de gauche et des associations mobilisées dans la lutte contre la pauvreté, ils étaient des dizaines de milliers à manifester dans plusieurs villes du Brésil pour dénoncer la gestion de la crise sanitaire et l’effondrement économique en cours, au cœur de l’ex-locomotive de croissance du continent sud-américain. « Le pays est en faillite, je ne peux rien faire », déclarait le 6 janvier le président Jair Bolsonaro, rejetant la responsabilité du marasme sur « ce virus alimenté par la presse », à l’heure où prenaient fin les aides d’urgence qui ont provisoirement sauvé des dizaines de millions de personnes de la misère.

« Au bord d’un gouffre social », selon Marcelo Neri, directeur du centre de politique sociale de la Fondation Getulio-Vargas, le Brésil subit la double pression d’une politique ultra-libérale mise en place par le chef de l’Etat, et celle des marchés financiers « inquiets » du niveau élevé du déficit et de la dette du pays. En dépit d’environ 180 milliards de dollars de réserves de devises et d’un excédent de plus de 50 milliards de dollars de sa balance commerciale, le gouvernement brésilien a acté au moins jusqu’au mois de mars la fin de l’aide d’urgence mise en place à l’automne dernier et qui a bénéficié à environ 48 millions de personnes. Il a aussi restreint l’accès au « Benefício de Prestação Continuada » pour les personnes de plus de 65 ans privées de retraite, ainsi que pour les personnes handicapées, fixant le seuil d’éligibilité au quart du salaire minimum, lui-même équivalent à 230 € mensuels.

La « Bolsa Familía » liquidée

Jair Bolsonaro avait pourtant inauguré personnellement, à l’automne 2020, un nouveau programme social global, autant pour freiner sa chute dans les enquêtes de popularité que pour liquider la légendaire « Bolsa Familía », créée en 2004 sous le règne du président de gauche Lula, qui a permis à 28 millions de Brésiliens de sortir de la pauvreté, et dont continuaient à bénéficier 1 Brésilien sur 5. En ligne de mire : sa réélection en 2022 et la fidélisation ponctuelle d’un électorat populaire susceptible de retourner dans le giron du Parti des travailleurs (PT) de Lula. Ce dernier avait d’ailleurs ironisé le 2 octobre dernier : « Bolsonaro souhaite en finir avec la Bolsa Familía parce qu’il n’admet pas que le peuple se souvienne du PT. »

Mais la gestion calamiteuse de l’épidémie de Covid, qui a tué plus de 200 000 Brésiliens, aggravée par l’incapacité du gouvernement à mettre en place un programme de vaccination cohérent, place le président brésilien et son gouvernement d’extrême-droite au pied du mur. Ancien de l’armée et conscient des risques de déstabilisation liés à une explosion sociale, Jair Bolsonaro déclarait fin janvier à ses partisans : « Nous, les militaires, sommes le dernier rempart contre le socialisme. Ce sont les forces armées qui décident si un peuple vivra dans une démocratie ou une dictature. »

Les associations mobilisées

Partisan déclaré de Donald Trump, il prépare les esprits à une contestation farouche des prochains scrutins électoraux, voire à un coup d’Etat pour « sauver » le Brésil d’un retour aux politiques sociales, lesquelles avaient pourtant transformé l’un des pays les plus inégalitaires du monde en exemple sud-américain de lutte contre les inégalités, tout en offrant les garanties de croissance à même de « rassurer » les marchés.

En attendant le verdict des urnes et en l’absence des aides de l’Etat, ce sont les ONG et associations qui prennent le relais pour soutenir la population. La Banque alimentaire de São Paolo multiplie les initiatives pour amplifier la récupération des denrées consommables jetées par les grandes surfaces et les entreprises, quand l’Unas, active dans le bidonville d’Héliopolis (120 000 habitants), revendique la distribution de 40 000 paniers de nourriture en plus des 230 000 articles d’hygiène, près de 400 000 masques de protection et 2 000 bouteilles de gaz. D’autres, comme Orgãnico, se sont spécialisés dans la livraison de produits « frais et sains » à des milliers de familles en situation de vulnérabilité sociale, aggravée par la pandémie.

…et d’ailleurs

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