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L’inaptitude professionnelle

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Les métiers du secteur social et médico-social sont très touchés par les accidents du travail et les maladies professionnelles qui peuvent conduire à une déclaration d’inaptitude professionnelle. Dans ce cas, l’employeur a une obligation de reclassement du salarié, et le licenciement pour ce motif ne peut intervenir qu’après une procédure bien encadrée. Présentation.

Auxiliaires de vie, assistants de vie ou ménagers, aides-soignants ou encore infirmiers, ces différents acteurs du secteur de l’aide et des soins à la personne sont confrontés quotidiennement à toutes sortes de risques professionnels : risques psychosociaux, infectieux ou liés à l’activité physique (ex. troubles musculosquelettiques…).

Ces risques professionnels, et notamment les risques psychosociaux sont accentués par plusieurs facteurs :

• l’intensité et le temps de travail (imprévisibilité des horaires de travail, journées de travail longues et fragmentées, objectifs difficilement réalisables…) ;

• les exigences émotionnelles (contact régulier avec la souffrance, mauvaises relations avec le public…) ;

• le manque d’autonomie (possibilité d’évolution, développement des compétences…) ;

• les rapports sociaux au travail dégradés (relations avec les autres salariés, manque d’attention et d’écoute…) ;

• les conflits de valeurs (activité effectuée contraire aux valeurs du salarié) ;

• l’insécurité de la situation de travail (contrats de travail précaires, risques de changement des conditions de travail…).

Ces facteurs de risques psychosociaux peuvent se manifester par des indicateurs individuels (fatigue, agressivité, absence, déclaration d’accident du travail, inaptitude…) ou collectifs (violences, tensions, conflit, manque de communication, désinvestissement, turn-over…) qu’il convient d’évaluer et de réparer.

Le personnel est parfois confronté à l’usure professionnelle. Il arrive par exemple que le salarié ne soit pas suffisamment formé ou que la charge de travail soit trop importante. Il incombe alors à l’employeur de mettre en place des actions de prévention ciblées (ex. entretien professionnel pour réfléchir sur des formations ou une évolution professionnelle…).

Selon un rapport de l’assurance maladie, les risques professionnels dans le secteur de l’aide et des soins à la personne sont en constante augmentation. Elle précise notamment qu’en 2017, sur l’ensemble des accidents du travail recensés, plus de 16 % étaient répertoriés dans le secteur de l’aide et des soins à la personne alors que ce secteur d’activité regroupe seulement 11 % des effectifs globaux du monde salarié. Cette progression de la sinistralité connaît un essor important chez les salariés qui exercent leur activité auprès des personnes âgées ainsi qu’au domicile des particuliers. Un nombre « presque trois fois plus élevé que dans tous les autres secteurs d’activité, y compris les hôpitaux et cliniques », selon l’assurance maladie.

De surcroît, l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) fait un constat alarmant. Il estime que la réduction du temps de séjour des patients dans les établissements hospitaliers fait peser sur le secteur de l’aide et des soins à domicile des prises en charge de plus en plus lourdes et accentue ainsi les différents risques professionnels(1).

Le nombre croissant d’accidents du travail et de maladies professionnelles a des conséquences importantes à la fois sur les salariés mais également sur le fonctionnement des entreprises et des associations du domaine social et médico-social. En effet, dans certaines hypothèses, les employeurs doivent faire face à l’inaptitude de leurs salariés.

Notre dossier s’intéressera plus précisément à la procédure de constatation de l’inaptitude professionnelle et non professionnelle, qui se déroule en trois phases distinctes : la constatation de l’inaptitude, le reclassement et le licenciement du salarié inapte.

I. Le constat de l’inaptitude du salarié

La constatation de l’inaptitude d’un salarié intervient après la réalisation d’au moins une visite médicale organisée par le médecin du travail et l’accomplissement de plusieurs formalités légales.

A. La visite médicale

Depuis le 1er janvier 2017, un seul examen médical suffit à constater l’inaptitude du salarié. Néanmoins, le médecin du travail peut, s’il l’estime nécessaire, réaliser un second examen médical dans un délai maximal de 15 jours à compter du premier examen (code du travail [C. trav.], art. R. 4624-42).

Plusieurs types de visites médicales permettent de déclarer un salarié inapte.

1. Visite d’information et de prévention

Tous les salariés bénéficient dans un délai de 3 mois à compter de leur prise de poste d’une visite d’information et de prévention (C. trav., art. R. 4624-10).

Cette visite a notamment pour objet (C. trav., art. R. 4624-11) :

• l’interrogation du salarié sur son état de santé ;

• son information quant aux risques éventuels auxquels il sera exposé à son poste de travail ;

• la sensibilisation du salarié sur les moyens de prévention à mettre en place ;

• l’identification si l’état de santé du salarié ou les risques auxquels il est exposé nécessitent une orientation vers le médecin du travail ;

• l’information sur les modalités de suivi de son état de santé par le service.

• Cette visite d’information et de prévention remplace l’ancienne visite médicale à l’embauche, qui devait être réalisée avant l’embauche ou au plus tard avant l’expiration de la période d’essai par le médecin du travail, et qui avait pour objectif de vérifier l’aptitude du salarié à son poste de travail (C. trav., art. R. 4624-10 en vigueur avant le décret du 27 décembre 2016).

A noter : Les salariés affectés à des postes à risque ont obligatoirement un examen médical d’aptitude à l’embauche (salariés exposés au plomb, au risque de chute de hauteur, aux rayons ionisants…) (C. trav., art. R. 4624-24).

2. Suivi individuel

Tout au long de la relation contractuelle, les salariés doivent bénéficier de visites médicales périodiques. La périodicité de ce suivi varie selon les conditions de travail, l’âge et l’état de santé du salarié ainsi que selon les risques auxquels il est exposé mais elle ne peut en aucun cas excéder 5 ans (C. trav., art. R. 4624-16).

Les travailleurs handicapés, les travailleurs qui déclarent être titulaires d’une pension d’invalidité ou encore les travailleurs de nuit bénéficient d’un suivi médical selon une périodicité qui n’excède pas 3 ans.

3. Visite de reprise

L’examen de reprise est obligatoire (C. trav., art. R. 4624-31) :

• après un congé de maternité ;

• après une absence pour cause de maladie professionnelle ;

• après une absence d’au moins 30 jours pour cause d’accident du travail, de maladie ou d’accident non professionnel.

Cette visite de reprise doit être programmée par l’employeur et avoir lieu au plus tard dans un délai de 8 jours suivant la reprise du travail.

Si l’employeur n’organise pas de visite de reprise, il manque à son obligation de santé et de sécurité (C. trav., art. L. 4121-1) et s’expose à des sanctions. Le salarié peut par exemple demander l’octroi de dommages et intérêts pour réparer le préjudice qu’il a subi (voir notamment Cass. soc., 13 avril 2016, n° 14-28293) ou prendre acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur (voir notamment Cass. soc., 5 décembre 2012, n° 11-21587).

4. Visite de préreprise

La visite de préreprise est réservée aux salariés en arrêt de travail depuis plus de 3 mois. Elle est organisée à l’initiative du médecin traitant, du médecin-conseil des organismes de sécurité sociale ou du travail (C. trav., art. R. 4624-29). L’employeur ne peut donc pas en être à l’initiative.

L’objectif de cette visite est de favoriser le maintien du salarié dans son poste de travail. A l’issue de la visite, le médecin du travail peut ainsi proposer au salarié des aménagements et adaptations de son poste de travail, des préconisations de reclassement ou encore des formations professionnelles (C. trav., art. R. 4624-30).

A noter : Cette visite ne dispense pas l’employeur d’organiser une visite de reprise à la fin de l’arrêt de travail du salarié (voir notamment Cass. soc., 12 novembre 1997, n° 94-43839). En effet, elle se distingue de la visite de reprise dans la mesure où elle intervient avant la reprise du travail.

B. La procédure de constat de l’inaptitude du salarié

Avant de prononcer un avis d’inaptitude, le médecin du travail doit procéder à différentes formalités légales (C. trav., art. R. 4624-42) :

• la réalisation d’une étude du poste de travail du salarié ;

• la réalisation d’une étude des conditions de travail et l’indication de la date à laquelle la fiche d’entreprise a été actualisée ;

• l’organisation d’un échange par tout moyen avec l’employeur.

II. Le reclassement du salarié inapte

Par principe, l’employeur est obligé de chercher à reclasser sur un poste adapté à ses capacités un salarié déclaré inapte. Et ce que l’inaptitude soit d’origine professionnelle ou non professionnelle. Toutefois, le code du travail prévoit deux exceptions qui doivent être expressément mentionnées par le médecin du travail dans l’avis d’inaptitude (C. trav., art. L. 1226-2-1 et L. 1226-12) :

• lorsque « tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé » ;

• lorsque « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».

Dans ces deux hypothèses, l’employeur est en droit de rompre le contrat de travail du salarié inapte sans être obligé de rechercher un poste de reclassement. Il convient toutefois de préciser que cette mention doit être expressément reprise dans l’avis d’inaptitude pour dispenser l’employeur.

En l’absence de mention expresse, l’employeur est obligé de respecter la procédure de reclassement qui se déroule en plusieurs étapes successives.

A. La recherche d’un poste de reclassement

La proposition de reclassement doit être adaptée aux capacités du salarié et prendre en compte les conclusions écrites et les indications formulées par le médecin du travail (C. trav., art. L. 1226-2 et L. 1226-10).

De surcroît, le poste de reclassement doit être aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé par le salarié inapte. Le code du travail précise à ce titre que l’employeur peut, au besoin, procéder à une mutation, des aménagements, des adaptations ou des transformations de poste de travail et un aménagement du temps de travail (C. trav., art. L. 1226-2 et L. 1226-10).

A noter : Le caractère temporaire d’un poste n’interdit pas de le proposer (voir notamment Cass. soc., 5 mars 2014, n° 12-24456). L’employeur peut ainsi proposer au salarié un poste en contrat de travail à durée déterminée.

A défaut de poste disponible, la Cour de cassation rappelle de jurisprudence constante que l’employeur doit assurer l’adaptation du salarié à son poste de travail. En ce sens, il peut proposer le recours à une formation complémentaire si elle permet son reclassement dans un poste plus qualifié (Cass. soc., 7 juillet 2009, n° 08-40328).

B. La consultation du comité social et économique

Par principe, la consultation du comité social et économique (CSE) intervient postérieurement à la déclaration d’inaptitude du salarié mais préalablement à toute proposition de reclassement.

A noter : le Conseil d’Etat est venu préciser que l’employeur qui avait proposé des postes de reclassement sans consulter préalablement le CSE pouvait régulariser la procédure en demandant l’avis du comité avant de proposer de nouveau au salarié inapte les différents postes de reclassement (Conseil d’Etat, 27 février 2019, n° 417249). Cette position du Conseil d’Etat concernait la situation d’un salarié protégé et ne lie pas la Cour de cassation.

La consultation des représentants du personnel est obligatoire que l’inaptitude soit d’origine professionnelle ou non professionnelle et même en l’absence de poste de reclassement comme le rappelle un arrêt très récent de la Cour de cassation (Cass. soc., 30 septembre 2020, n° 19-16488). Par conséquent, seule la dispense légale de reclassement énoncée aux articles L. 1226-2-1 et L. 1226-12 du code du travail dispense également de consulter le CSE.

A noter : Dans l’hypothèse où la structure dispose de plusieurs établissements distincts, il convient de consulter le CSE de l’établissement dans lequel travaille le salarié inapte (Cass. soc., 13 novembre 2008, n° 07-41512).

Les modalités de consultation des membres du CSE ne sont pas fixées par le code du travail mais par la jurisprudence. L’employeur peut recueillir l’avis des membres au cours d’une réunion. On conseillera dans ce cas aux employeurs de faire figurer la consultation dans l’ordre du jour et dans le procès-verbal de la réunion si cette dernière a lieu au cours d’une réunion du CSE. Il peut également le faire de façon individuelle (voir notamment Cass. soc., 29 avril 2003, n° 00-46477). La jurisprudence a même récemment admis le recours à une conférence téléphonique (Cass. soc., 30 septembre 2020, n° 19-13122).

De surcroît, la Cour de cassation rappelle, de jurisprudence constante, que les membres du comité social et économique doivent disposer des informations nécessaires sur l’état de santé du salarié inapte et sur la recherche de reclassement afin que la consultation soit régulière (voir notamment Cass. soc., 15 décembre 2015, n° 14-14688).

A noter : Pour mémoire, la mise en place d’un CSE est obligatoire dans toutes les entreprises ou les associations d’au moins 11 salariés (C. trav., art. L. 2311-2). Les entreprises et les associations devant mettre en place un CSE ne peuvent se soustraire à cette obligation que dans l’hypothèse où celles-ci disposeraient d’un procès-verbal de carence valablement établi. A défaut, le salarié sera en droit de demander une indemnisation.

La Cour de cassation estime que la consultation des membres du CSE est une formalité substantielle et considère que l’absence de consultation rend le licenciement sans cause réelle et sérieuse, que l’inaptitude soit d’origine professionnelle ou non professionnelle (voir notamment Cass. soc., 30 septembre 2020, n° 19-11974).

C. La proposition de postes de reclassement

1. Offre sérieuse de reclassement

L’offre de reclassement doit être sérieuse, précise et compatible avec les capacités du salarié et les conclusions du médecin du travail. Le législateur n’oblige pas l’employeur à effectuer la proposition par écrit. Toutefois, un écrit est préférable pour des raisons probatoires.

Après réception de l’offre de reclassement, le salarié dispose d’un délai de réflexion raisonnable pour prendre sa décision. S’il accepte et que cela entraîne une modification de son contrat de travail, il conviendra de conclure un avenant au contrat de travail du salarié. En revanche, s’il refuse le poste proposé, « l’obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l’employeur a proposé un emploi prenant en compte l’avis et les indications du médecin du travail » (C. trav., art. L. 1226-2-1 et L. 1226-12).

A noter : Dans un arrêt rendu en novembre 2020, la Cour de cassation a précisé que l’employeur n’est pas obligé de transmettre au salarié une liste de l’ensemble des postes disponibles dans la structure. Il peut proposer au salarié uniquement les postes compatibles avec les préconisations du médecin du travail (Cass. soc., 18 novembre 2020, n° 19-13521).

Pendant toute la période de recherche d’un reclassement, le salarié ne reçoit pas de rémunération. Si le salarié est inapte en raison d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, il peut prétendre au versement d’une indemnité temporaire d’inaptitude par la caisse primaire d’assurance maladie. Pour cela, il convient de remplir un formulaire remis par le médecin du travail.

2. Limites au reclassement

Dans le secteur des services à la personne et de l’aide à domicile, il est très fréquent que le médecin du travail qui déclare inapte un intervenant de terrain fasse des recommandations en vue de le reclasser sur un poste administratif. Cependant, dans de nombreux cas, les professionnels de terrain n’ont pas de formation dans le domaine administratif.

Dans cette hypothèse, on conseillera tout d’abord à l’employeur de se rapprocher du médecin du travail pour obtenir des précisions et formuler le cas échéant des réserves sur les recommandations compte tenu du manque de formation du salarié.

De surcroît, il convient de préciser les limites de l’obligation de reclassement incombant à l’employeur. Dans le cadre de la procédure de reclassement, l’employeur est tenu à une obligation d’adaptation du salarié à l’évolution de son emploi, au besoin en lui assurant une formation complémentaire. Toutefois, la Cour de cassation rappelle régulièrement les limites au recours à une formation professionnelle. L’employeur est ainsi soumis à une obligation d’adaptation et non à une obligation de fournir une nouvelle formation complète au salarié.

En ce sens, la Cour de cassation retient que « si l’employeur a l’obligation d’assurer l’adaptation des salariés à l’évolution de leur emploi, au besoin en leur assurant une formation complémentaire, il ne peut lui être imposé d’assurer la formation initiale qui leur fait défaut » (Cass. soc., 3 avril 2001, n° 99-42188). En outre, elle précise à titre d’illustration que l’employeur n’a pas l’obligation d’assurer une formation en matière administrative et commerciale à un menuisier qui n’a aucune compétence dans ce domaine (Cass. soc., 11 mai 2016, n° 14-12169).

De jurisprudence constante, la Cour de cassation rappelle ainsi que le poste qui requiert une formation initiale faisant défaut au salarié déclaré inapte ne constitue pas un poste « approprié » tel que défini par le code du travail.

En conséquence, dans cette hypothèse, sans que cela contrevienne à son obligation de reclassement, l’employeur n’est pas tenu de proposer une formation professionnelle complète au salarié et peut procéder à son licenciement pour inaptitude.

A noter : On conseillera aux employeurs de bien motiver la lettre de licenciement pour éviter que le salarié ne conteste la procédure et que la juridiction considère le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

III. Le licenciement du salarié inapte

La procédure de licenciement, contrairement aux indemnités dues au salarié inapte, est identique selon que l’inaptitude est d’origine professionnelle ou non.

A. La procédure de licenciement

Préalablement à l’engagement de la procédure de licenciement, l’employeur doit expliquer par écrit –  par lettre recommandée avec accusé de réception – au salarié inapte les motifs s’opposant à son reclassement (C. trav., art. L. 1226-2-1 et L. 1226-12). Cette première étape permet de retracer le déroulement de la procédure de reclassement et de justifier de son respect. A titre d’illustration, l’employeur doit indiquer que des postes de reclassement conformes à l’état de santé du salarié lui ont été proposés mais que ce dernier les a expressément refusés, ou préciser le cas échéant que le médecin du travail l’a dispensé de tout reclassement.

Ensuite, il convient de débuter la procédure de licenciement pour motif personnel en convoquant le salarié à un entretien préalable (C. trav., art. L. 1232-2).

La lettre doit indiquer précisément et de façon non équivoque qu’un licenciement est envisagé. De surcroît, elle doit faire mention de la date, de l’heure et du lieu de l’entretien (C. trav., art. R. 1232-1). L’entretien préalable ne peut avoir lieu « moins de 5 jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation » (C. trav., art. L. 1232-2). En outre, la lettre de convocation doit rappeler au salarié qu’il a la possibilité de se faire assister au cours de l’entretien « par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise ou, en l’absence d’institutions représentatives dans l’entreprise, par un conseiller du salarié » (C. trav., art. R. 1232-1).

A noter : En l’absence d’institutions représentatives du personnel, l’employeur doit préciser l’adresse des services où la liste des conseillers est tenue à la disposition du salarié (C. trav., art. L. 1232-4). Il convient à ce titre d’indiquer l’adresse de l’inspection du travail dont relève la structure et celle de la mairie du domicile du salarié s’il demeure dans le département de la structure ou celle de son lieu de travail s’il réside dans un autre département.

La présence du salarié lors de l’entretien préalable n’est pas obligatoire et son absence n’a pas d’incidence sur la suite de la procédure de licenciement.

A l’issue de l’entretien, l’employeur peut procéder à la notification du licenciement du salarié. Cependant la lettre de licenciement ne peut être expédiée moins de 2 jours après la date prévue de l’entretien préalable au licenciement (C. trav., art. L. 1232-6).

A noter : Le décret n° 2017-1820 du 29 décembre 2017 propose un modèle de lettre de licenciement pour inaptitude. Il n’est pas obligatoire d’utiliser ce modèle. Il permet de respecter toutefois l’ensemble des mentions légales obligatoires.

La rédaction de la lettre de licenciement doit clairement faire apparaître l’existence de l’inaptitude médicalement constatée et les raisons de l’impossibilité de reclassement. En effet, la Cour de cassation estime qu’en l’absence de mention de l’impossibilité de reclassement dans la lettre de licenciement, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse (voir notamment Cass. soc., 3 juin 2020, n° 18-25757).

A noter : L’employeur a la possibilité de préciser le motif du licenciement à son initiative ou à la demande du salarié. En effet, conformément à l’article R. 1232-13 du code du travail, le salarié peut demander des précisions sur les motifs de son licenciement dans un délai de 15 jours à compter de la notification de son licenciement. Dans ce cas, l’employeur dispose d’un délai de 15 jours à compter de la réception de la demande du salarié pour apporter des précisions sur les motifs énoncés dans la lettre de licenciement. A l’inverse, l’employeur peut prendre l’initiative de préciser les motifs de licenciement retenus à l’encontre du salarié dans un délai de 15 jours suivant la notification du licenciement.

B. Les indemnités de licenciement

1. Indemnités communes aux deux types d’inaptitude

Conformément aux articles L. 1226-4 et L. 1226-11 du code du travail, lorsque, à l’issue d’un délai de 1 mois à compter de la date de l’examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n’est ni reclassé, ni licencié, l’employeur doit reprendre le versement du salaire.

Le délai de 1 mois est un délai préfix. De jurisprudence constante, la Cour de cassation rappelle qu’il n’est pas suspendu par le recours du salarié contre l’avis d’inaptitude (Cass. soc., 4 mai 1999, n° 98-40959), ni par la demande d’autorisation de licenciement formulée auprès de l’inspection du travail pour les salariés protégés (Cass. soc., 18 janvier 2000, n° 97-44939), ou encore par la délivrance d’un nouvel arrêt de travail postérieurement à l’avis d’inaptitude (voir notamment Cass. soc., 21 octobre 2020, n° 19-12674).

De surcroît, le versement du salaire doit reprendre même si la procédure de licenciement est en cours ou si le salarié a retrouvé un emploi quelques jours après la déclaration d’inaptitude (voir notamment Cass. soc., 4 mars 2020, n° 18-10719) et il est dû jusqu’à la présentation de la lettre de licenciement et la rupture du contrat de travail (voir notamment Cass. soc., 12 décembre 2018, n° 17-20801).

2. Indemnités consécutives à l’inaptitude d’origine professionnelle

Lorsque l’inaptitude du salarié est d’origine professionnelle, le salarié licencié peut prétendre à une indemnité spéciale de licenciement qui est égale, sauf disposition conventionnelle plus favorable, au double de l’indemnité légale de licenciement (C. trav., art. L. 1226-14). La Cour de cassation précise cependant que cette indemnité spéciale n’est due que si le licenciement est prononcé en raison de l’impossibilité de reclassement du salarié déclaré inapte ou du refus non abusif par le salarié inapte de l’emploi proposé. Dans ces conditions, dès lors que le refus du salarié est abusif, il ne perçoit pas d’indemnité de licenciement doublée (voir notamment Cass. soc., 8 avril 2009, n° 07-45234).

Par ailleurs, le salarié n’effectue pas de préavis mais bénéficie de plein droit d’une indemnité compensatrice d’un montant égal à l’indemnité compensatrice de préavis (C. trav., art. L. 1226-14).

A noter : Pour calculer l’ancienneté du salarié dans la structure et par voie de conséquence la durée du préavis, il convient de prendre en compte la période de suspension du contrat de travail (C. trav., art. L. 1226-7).

3. Indemnités consécutives à l’inaptitude d’origine non professionnelle

En cas d’inaptitude d’origine non professionnelle, les spécificités énoncées en cas d’inaptitude professionnelle ne trouvent pas application. En effet, le salarié perçoit une indemnité de licenciement légale ou conventionnelle et ne peut bénéficier d’une indemnité compensatrice d’un montant équivalent au préavis (C. trav., art. L. 1226-4). On notera toutefois qu’il existe des exceptions pour le préavis lorsque l’employeur n’a pas respecté son obligation de reclassement ou encore lorsqu’il n’a pas repris le versement des salaires.

A noter : La durée du préavis doit être prise en compte dans l’ancienneté du salarié licencié pour le calcul de son indemnité de licenciement (C. trav., art. L. 1226-4).

Les recours contre les décisions du médecin du travail

Le salarié ou l’employeur peut saisir le conseil de prud’hommes territorialement compétent selon la procédure accélérée au fond en vue de contester les avis, les propositions, les conclusions écrites ou les indications émis par le médecin du travail reposant sur des éléments de nature médicale (C. trav., art. L. 4624-7, I).

A titre d’illustration, un employeur pourrait contester un avis d’inaptitude dans l’hypothèse où aucune étude de poste n’aurait été effectuée par le service de santé au travail.

La contestation doit être effectuée dans un délai de 15 jours suivant la notification des actes contestés (C. trav., art. R. 4624-45).

Afin de l’éclairer dans sa prise de décision, le tribunal peut solliciter le médecin inspecteur du travail territorialement compétent (C. trav., art. L. 4624-7, II).

La décision rendue par le conseil de prud’hommes se substitue aux actes contestés (C. trav., art. L. 4624-7, III).

A noter : En pratique, cette procédure de recours est critiquée et très peu utilisée par les employeurs et les salariés.

Le reclassement dans un groupe ou une unité économique et sociale

Le reclassement du salarié doit être recherché au sein de l’ensemble des postes de l’entreprise ou de l’association concernée.

Lorsque l’entreprise appartient à un groupe ou à une unité économique et sociale (UES), la recherche s’effectue dans toutes les structures composant le groupe ou l’UES présentes sur le territoire national « et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel » (C. trav., art. L. 1226-2 et L. 1226-10).

Dans un arrêt très récent, la Cour de cassation est venue préciser que l’employeur qui propose quatre postes compatibles avec l’état de santé du salarié inapte satisfait à son obligation à condition qu’il puisse justifier avoir réalisé des recherches de reclassement « personnalisées et circonstanciées au sein des filiales du groupe » (Cass. soc., 2 décembre 2020, n° 19-19296).

On conseillera aux entreprises et aux associations qui disposent de plusieurs établissements ou qui appartiennent à une UES ou à un groupe d’adresser à leurs différentes structures une demande écrite précisant l’ancienneté du salarié, son niveau, ses compétences ainsi qu’une date butoir pour proposer des postes (attention à respecter un délai raisonnable). Pour des questions probatoires, les demandes et les réponses doivent nécessairement être formulées par écrit et conservées.

Même si aucun poste n’est disponible dans la structure, l’employeur doit être en mesure de justifier qu’il a effectué des démarches précises pour parvenir au reclassement du salarié (Cass. soc., 6 janvier 2010, n° 08-44177).

Le salarié en CDD déclaré inapte

En principe, le contrat de travail à durée déterminée (CDD) ne peut être rompu unilatéralement avant l’échéance du terme. Toutefois, l’article L. 1243-1 du code du travail énumère certains cas de rupture anticipée parmi lesquels figure notamment l’inaptitude du salarié. Il est donc possible de rompre un CDD si le salarié a été déclaré inapte par le médecin du travail.

Quid de l’obligation de reclassement ?

En cas d’inaptitude professionnelle, le législateur précise que l’employeur est tenu de chercher à reclasser le salarié et de consulter les membres du CSE (C. trav., art. L. 1226-20).

S’agissant de l’inaptitude d’origine non professionnelle, le code du travail ne précise pas si l’obligation de reclassement s’applique aux salariés en CDD. Néanmoins, la Cour de cassation considère que l’employeur doit chercher à reclasser le salarié inapte dans cette hypothèse (voir notamment Cass. soc., 19 mai 2010, n° 09-40633).

Quid de la procédure de rupture du contrat de travail ?

Par un avis en date du 21 octobre 2013, la Cour de cassation est venue préciser que la procédure de rupture d’un contrat de travail à durée déterminée à la suite de la constatation de l’inaptitude du salarié ne doit pas donner lieu à une convocation à un entretien préalable (Cass. avis, 21 octobre 2013, n° 15013).

De surcroît, il conviendra également de reprendre le versement du salaire du salarié inapte si, à l’expiration d’un délai de 1 mois à compter de l’examen médical, le salarié n’a pas été reclassé et que son contrat n’a pas été rompu (C. trav., L. 1226-4-2 et L. 1226-20).

Licenciement sans procédure de réclassement préalable

Lorsque l’employeur prononce le licenciement d’un salarié dont l’inaptitude est d’origine professionnelle sans respecter les règles de réintégration et de reclassement du salarié prévues par le code du travail, le juge peut (C. trav., art. L. 1226-15) :

• prononcer la réintégration du salarié dans l’entreprise ou dans l’association avec un maintien de ses avantages acquis ;

• octroyer une indemnité au salarié égale à au moins 6 mois de salaire si l’une des deux parties refuse la réintégration.

En cas d’inaptitude d’origine non professionnelle, le licenciement prononcé sans respecter les dispositions légales sera considéré comme sans cause réelle et sérieuse et donnera droit pour le salarié à une indemnité telle que prévue à l’article L. 1235-3 du code du travail.

Notes

(1) Pour plus d’informations voir « Santé et aide à la personne – Une prévention construite autour de la relation à l’autre » – INRS.

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