Le clin d’œil à la photographie n’a rien de fortuit. Pointer l’objectif sur les « invisibles », sortis des radars institutionnels, c’est le but de Focale, programme mené depuis un an dans le quartier prioritaire Neuhof-Meinau, à Strasbourg. Les aider à révéler leur potentiel, reprendre confiance et développer leurs compétences dans un parcours à la carte de quinze mois en les associant à la démarche. On ne parle pas ici de bénéficiaires, mais de participants.
Focale est lauréat de l’appel à projets « 100 % inclusion – La fabrique de la remobilisation », lancé dans le cadre du plan d’investissement dans les compétences (PIC). Le projet est porté par la Maison de l’emploi de Strasbourg, mais déployé par un consortium local : centres socio-culturels, associations de prévention et d’éducation populaire, organismes de formation, entreprises d’insertion, mission locale… « Focale est né de l’envie d’étendre ou de proposer des démarches innovantes dans l’accompagnement des publics éloignés de l’emploi. L’appel à projets a permis une réflexion partagée », explique Liane Desseigne, coordinatrice du projet.
De fait, Focale s’appuie sur l’expérience du Dacip (dispositif d’accompagnement collectif et individuel de proximité) qui, depuis 2012, accompagne les jeunes de 16 à 25 ans. « A l’époque, nous constations qu’une partie des jeunes étaient hors de tous les dispositifs, raconte Hodeifa Megchiche, éducateur spécialisé et cofondateur du Dacip. Un simple partenariat ne suffisait pas. Il fallait une équipe dédiée à temps plein. » Et une manière de faire pour que ces jeunes se sentent compris, capables de mettre des mots sur leurs savoirs-faire. Par le biais d’ateliers partagés avec des chefs d’entreprise, par exemple.
Le Dacip a naturellement trouvé sa place dans le projet Focale. Avec cette fois, la possibilité d’accompagner des familles. Grâce à une équipe pluridisciplinaire d’éducateurs, d’animateurs et de conseillers en insertion professionnelle. « La boîte à outils reste le repérage dans les rues, clubs sportifs ou associations d’habitants, et l’animation socio-culturelle. Avec une pédagogie du droit à l’erreur », précise Hodeifa Megchiche, qui la coordonne.
Une pédagogie et une souplesse adoptées par tous. Ainsi Scoprobat, coopérative d’insertion, propose-t-elle des CDD formatifs pour découvrir les métiers de la propreté. Focale propose aussi des missions rémunérées de courte durée, comme équiper les habitants en informatique sous la houlette de la Cybergrange, un tiers-lieu partenaire. Mais également du coaching et du compagnonnage réflexif pour développer un réseau ou valoriser ses compétences.
« L’objectif de Focale est que 50 % des 400 personnes accompagnées sur trois ans accèdent à un emploi durable, explique Liane Desseigne. Et que les autres puissent s’inscrire dans un dispositif de droit commun, Pôle emploi ou école de la 2e chance. » Pour y parvenir, les référents de proximité se réunissent une fois par semaine et le collectif de partenaires une fois par mois. Histoire de croiser les regards sur chaque situation. Aujourd’hui, 145 personnes sont engagées dans la démarche et 20 ont décroché un emploi, une formation ou un service civique.