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#EndTheTelethon

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C’est pas pour me vanter, mais j’ai connu la première retransmission de Miss France en direct ET le premier Téléthon. C’est vous dire à quel point je suis vieille. Revenons quelques années en arrière. 31 décembre 1986 : j’ai 9 ans, l’année se termine et j’ai sagement écrit mes bonnes résolutions dans mon petit carnet, ribambelle de promesses que je ne tiendrai pas. C’est le réveillon du Nouvel An, traditionnelle foire d’empoigne familiale. Chez nous, le vieux tonton raciste n’est pas qu’une légende urbaine, il est d’ailleurs accompagné de la tata reloue et des parents bourrés. La grande table est mise dans le petit salon, la dinde farcie n’a pas encore pris son envol (c’est une tradition chez nous, le lancer de dinde morte, on sait mettre l’ambiance dans les soirées) et Guy Lux (note pour les plus jeunes : c’est un animateur mort, mais à l’époque il était encore vachement vivant) annonce l’élection de Miss France. Je regarde la dinde, et ces superbes jeunes femmes qui défilent en maillot de bain. Je regarde ma vieille tata reloue, et me délecte des flamboyantes tenues régionales. Je regarde ma mère éméchée, et rêve sur les étincelantes robes de soirée. Y a pas à dire, la vie à la télé est bien plus enchanteresse que la mienne.

Mais, cette année, il y a une nouveauté : directement importé des Etats-Unis, le Téléthon fait une entrée remarquée à la télévision française. Rien à voir avec le défilé des Miss, les roulettes et le stress ont remplacé les paillettes et le strass. Larmes d’émotion et gros plan sur le petit myopathe, cet enfant compte sur vous, c’est un petit garçon très courageux qui ne se plaint ja-mais, allez, on tape tous dans ses mains (enfin, presque tous) !

Cette fois, je ne rêve pas. Je m’apitoie, et mon cerveau enfantin devient une sorte de guimauve dégoulinante de sucre et de bons sentiments, s’il te plaît maman, fais un don pour les petits enfants cloués dans leur fauteuil !

Les années passent et les alcooliques trépassent, Miss France et Téléthon se succèdent invariablement, Miss en gambettes et gosses à roulettes, et je me désintéresse du sujet, me contentant de regarder vaguement la tête de la nouvelle Miss tout en glissant une pièce dans la tirelire de l’animation locale.

Mais depuis quelques années, les enfants mignons des émissions télé sont devenus des adultes, et ils racontent ce qu’a été leur Téléthon. Loin des discours mièvres habituels, ils dénoncent la pensée validiste qui les a fait grandir entre l’image du pauvre enfant malheureux et celle du héros qui transcende son handicap. Choisis ton camp, camarade, mais n’espère rien d’autre que la pitié ou l’admiration.

Sujets de droits versus objets de dons, ils écrivent, témoignent et font gonfler le mouvement #EndTheTelethon, nous offrant enfin leur propre version du bullshit médiatique.

Allez, pour l’an prochain, faisons un rêve : que l’Etat fasse enfin sa part, que l’on n’ait plus besoin d’exhiber des enfants comme des appâts à dons, et que l’on cesse enfin nos discours pleins de bons sentiments.

Lire à ce sujet : bit.ly/3oEQgv0 et bit.ly/3n0M7kB.

La minute de Flo

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