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Les deux Etats et la crise

C’est un mirage auquel nous avons été nombreux à croire. Lors du premier confinement, provoqué par la pandémie de Covid-19, puis face aux multiples conséquences liées à l’arrêt brutal de l’économie mondiale, le retour de l’Etat bouclier a été présenté comme une évidence, un flagrant basculement de l’histoire.

Alors que le second confinement peine à prendre fin et qu’une troisième vague n’est plus exclue par personne, il apparaît clairement que le « quoi qu’il en coûte » martelé par Emmanuel Macron ne résonne pas de la même manière aux oreilles de l’ensemble des composantes de la société française. Un patron du CAC 40 ne peut décemment pas se plaindre d’avoir été ignoré par l’exécutif. Il en va bien différemment de tous les professionnels qui constituent le maillage social de notre pays. Les travailleurs sociaux et médico-sociaux, éléments essentiels du filigrane qui sert en réalité de colonne vertébrale au tissu socio-médico-éducatif, ont désormais dépassé leurs propres limites. Sous-payés, maltraités, relégués, ils souffrent collectivement d’une image dégradée.

Le temps long de la prise en charge des plus fragiles pèse peu face à l’immédiateté de l’époque, portée par un néolibéralisme qui ne cesse de mettre en exergue la performance, la rapidité, tout en ringardisant ceux qui coûtent « un pognon de dingue ». Une telle dichotomie n’est évidemment pas tenable, ni à court ni à long terme.

D’abord, parce que les services d’aide à domicile et les établissements sont chaque jour plus désertés par les aides-soignants, les éducateurs, les AESH… Ensuite, parce que les « winners » de demain auront tôt ou tard besoin des « losers » qu’ils méprisent aujourd’hui. Il est aussi à espérer que, poussés dans leurs retranchements, les travailleurs sociaux parviennent enfin à s’unir pour créer un véritable rapport de force avec un pouvoir politique qui, incapable de penser le bien commun, ne peut être que contraint à tenir sa promesse : ne laisser personne sur le bord du chemin.

Le frémissement qui s’est emparé du secteur apparaît pour ce qu’il est : une lueur d’espoir dans un marasme dont nous devons tout faire pour nous extraire.

Éditorial

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