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Négociations : la convergence en chantier

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Au sein des conventions collectives nationales 51 et 66, des discussions sont entamées entre partenaires sociaux pour les réformer. Et, parallèlement, de premiers textes sont sur la table pour aller au-delà et proposer des dispositions communes à l’ensemble du secteur privé non lucratif. Les prémices d’une convention unique ?

Il y a les optimistes, les volontaristes… Comme Dorothée Bedok, directrice générale adjointe de Nexem : « Le temps des branches n’est pas celui des entreprises. On avance plutôt bien sur l’échelle du temps d’une branche. » Et il y a les insatisfaits, impatients. « Une convention unique devrait assurer de meilleures garanties sociales et de travail à l’ensemble des salariés dans toutes les catégories professionnelles. Mais, pour le moment, c’est un vœu pieux », peste Sergine Heckel, négociatrice CFE-CGC pour la convention collective nationale (CCN) 51. Autrement dit, selon elle, on en reste à un accord étendu, pas à l’amorce d’une branche. Un observateur extérieur mais fin connaisseur plaisante : « La convergence des conventions collectives ? J’en entends parler depuis que je suis dans le secteur. » Et de souligner que l’Opco (opérateur de compétences) « santé » n’a lui-même pas réussi lors de sa création en 2019 à rassembler tout le monde sous sa bannière, 300 000 salariés environ ayant été agrégés à l’Opco des entreprises de proximité. Il ajoute qu’en l’espèce le champ de ces conventions collectives est, en outre, soumis à de fortes contraintes économiques et à une dépendance à l’égard des financements publics, ce qui complique la donne. Selon lui, une fusion de branches se met en place rapidement ou ne se réalise jamais.

En dépit du scepticisme ambiant, Axess, confédération des employeurs du secteur sanitaire, social et médico-social non lucratif (Nexem, Croix-Rouge française, Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne privés non lucratifs, Unicancer), tente de progresser vers une convergence des conventions collectives, principalement les CCN 51 et 66. En vue, à terme, de construire une branche unique. Mais comme personne ne croit au « grand soir » en la matière, des négociations sont menées dans chacune des branches pour commencer à les réformer, si possible en allant dans le même sens. « Nous formulerons des propositions cohérentes, dans les deux champs », indique Benjamin Vitel, secrétaire fédéral CFDT chargé du secteur associatif sanitaire et social, même s’il regrette que des négociations parallèles soient menées plutôt qu’une discussion commune. En même temps que ces négociations propres à chaque branche, des accords sont toutefois négociés pour l’ensemble, pour bâtir, avant la branche commune, un premier socle partagé. Une stratégie en deux temps que défend Dorothée Bedok, tant les dispositions sont historiquement divergentes, en particulier en matière de rémunération ou de classification (voir page 8). « Dès lors que le cap fixé est bon, il est en effet possible d’utiliser des jalons intermédiaires », appuie Loïc Saroul, senior manager chez Alixio, le cabinet conseil qui accompagne la démarche de rapprochement des conventions collectives autant que certaines négociations propres aux conventions encore existantes, la CCN 51 en particulier.

Rude négociation ?

A la manœuvre pour celle-ci du côté employeur, la Fehap. Intitulé « Un parcours professionnel pour tous », l’accord en négociation poursuit plusieurs objectifs, explique son directeur général, Antoine Perrin. Tout d’abord, « évoluer vers un outil qui valorise les parcours professionnels, dans un métier mais aussi entre plusieurs ». La fin du seul avancement à l’ancienneté, en somme. Ensuite, les revalorisations de salaires, dont certains sont inférieurs au Smic. Troisième enjeu, un équilibre entre ancienneté et évolution des compétences est aussi souhaité. De même – quatrième point, selon Antoine Perrin – que des adaptations possibles de ce cadre commun aux spécificités géographiques afin, par exemple, de favoriser l’attractivité d’un métier particulièrement en tension dans une région donnée. « Il faudrait pour cela, précise-t-il, que le cadre national permette de valoriser des professionnels différemment pour les attirer. »

Initialement espérée fin mars, la conclusion de ces accords ne devrait pas intervenir avant l’été. La prochaine rencontre est, pour l’heure, fixée au 22 décembre. Mais la crise sanitaire avait déjà provoqué précédemment un report de réunion. Surtout, à en croire certains observateurs, la négociation pourrait s’avérer rude, la Fehap voulant, selon eux, discuter à coûts constants. « On ne négocie plus rien, abonde Sergine Heckel, de la CFE-CGC. On émet seulement des décisions unilatérales, puisque les seuls financements sont ceux qui viennent des pouvoirs publics. »

De son côté, Nexem a entamé des discussions pour réformer la CCN 66, en même temps que s’y intègre la CCN 79, une fusion réalisée à 90 %. La fusion avec celle des centres d’hébergement et de réinsertion sociale devrait être à nouveau examinée dans les six mois à venir. En somme, plusieurs fronts sont engagés simultanément. Avec toujours, en guise de volonté affichée chez Nexem, celle de structurer le secteur et de le rendre plus attractif. « Quelle que soit l’issue des démarches respectives de négociation, un mouvement a été enclenché dans l’ensemble du secteur », apprécie Loïc Saroul.

La pose de premiers jalons

Il en va de même pour négocier le socle commun, prélude à une convention unique. Nexem propose à ses partenaires qu’y figurent la formation professionnelle, la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, la qualité de vie au travail, l’égalité professionnelle, les nouveaux métiers…

Dans ce cadre, le 9 septembre dernier, un premier accord sur « la formation et le développement des compétences » a été signé, puis étendu deux mois plus tard aux membres de la branche sanitaire, sociale et médico-sociale à but non lucratif (Bass). Il s’inscrit dans la perspective du rôle accru des branches en matière de développement de l’apprentissage et des politiques de certifications, porté par la loi sur la liberté de choisir son avenir professionnel de septembre 2018.

Chef de file, Nexem annonce que les deux prochains sujets communs de négociation traiteront, d’une part, de la qualité de vie au travail (QVT) et, d’autre part, des nouveaux métiers. « On commence par des sujets qui ne préexistaient pas et par ce qui coûte moins d’argent », note Benjamin Vitel.

La marche est longue et la route étroite, mais les premiers jalons d’une convergence des conventions collectives dans le secteur privé à but non lucratif sont posés. Personne ne se risque à donner une date plausible de naissance d’un accord unique, mais certains décideurs s’emploient à avancer pas à pas et de façon pragmatique. Ces derniers ne nient pas qu’il existe encore des tensions au sein même d’Axess, mais ont décidé d’y croire. A raison ? « Je sens une certaine sincérité à vouloir converger qui était peut-être moins évidente il y a ne serait-ce qu’un an », conclut Loïc Saroul.

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