Des juges fédéraux nommés par Donald Trump ont décidé d’annuler les lois en vigueur dans l’État de Floride qui interdisent les « thérapies de conversion » visant les mineurs appartenant aux minorités LGBT+. Pour mémoire, ces traitements prônés par les communautés religieuses aux Etats-Unis – en particulier celles se revendiquant du courant évangéliste, un des piliers électoraux de Trump – visent à convertir les personnes homosexuelles à l’hétérosexualité.
Dans ce dossier précis, la responsabilité du président américain par le biais de sa politique de nominations au sein des juridictions fédérales s’avère écrasante. Selon les juges Britt C. Grant et Barbara Lagoa, tous deux appointés par Donald Trump, la « liberté de convertir » serait garantie par le premier amendement de la Constitution états-unienne, laquelle « n’a pas d’exclusion pour un discours controversé ». Plus significatif encore, les magistrats expriment leur scepticisme sur les preuves étayant la nocivité des thérapies de conversion, affirmant même qu’il n’y a pas eu suffisamment de recherches scientifiques sur le sujet. De manière ubuesque, la juridiction fédérale indique également que les organisations de praticiens opéreraient fréquemment des « volte-face » sur leurs points de vue, en s’appuyant notamment sur celle de l’American Psychiatric Association, qui a longtemps considéré l’homosexualité comme une déviance, une perversion ou une maladie mentale.
« S’il y a un principe fondamental sous-tendant le premier amendement, c’est que le gouvernement ne peut pas interdire l’expression d’une idée simplement parce que la société trouve l’idée elle-même offensante ou désagréable », justifie Britt C. Grant, en plaçant délibérément le débat juridique sur le plan des libertés et non sur le caractère potentiellement délictueux, voire criminel, de certaines pratiques associées aux thérapies de conversion. Ces dernières « constituent une fraude, et quels que soient vos efforts, vous ne pouvez pas changer l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’une personne. Cette soit-disant thérapie n’a fait que prouver qu’elle produisait des résultats négatifs pour la santé mentale et augmentait le risque de suicide », a réagi dans un communiqué Amit Paley, directeur exécutif de l’association Trevor Project, la plus importante organisation de prévention des suicides au sein de la jeunesse LGBT+.
A titre d’exemple, une vaste étude avait été publiée en septembre 2019 par un collectif de chercheurs affiliés au département d’épidémiologie de Harvard ou du département de psychiatrie de l’hôpital général de Boston (Massachusetts). Analysant les réponses aux enquêtes de plus de 27 000 adultes transgenres à travers les Etats-Unis, les personnes qui déclaraient avoir suivi une thérapie de conversion étaient deux fois plus susceptibles d’avoir tenté de se suicider. Un chiffre qui double encore chez les mineurs. Et ces « traitements » sont prescrits de manière massive sur le territoire américain. Selon le Williams Institute, un groupe de réflexion qui étudie les questions d’orientation sexuelle et d’identité de genre à l’université de Californie, près de 700 000 adultes et 350 000 enfants auraient été exposés à ces « psychothérapies » comprenant parfois l’infliction de douleurs physiques censées dissuader certaines « pensées » ou « comportements ». Une catastrophe qui a poussé de nombreux Etats à proscrire des interventions finalement considérées comme contre-productives et nuisibles, même si la prise de conscience s’est avérée très tardive : la Californie, pionnière dans le bannissement des thérapies de conversion, a attendu 2012 pour modifier sa législation.