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Les contrats à impact social

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Financer des projets « innovants » portés par les acteurs de l’économie sociale et solidaire avec des fonds privés. C’est le mécanisme que proposent les contrats à impact social. Présentation du dispositif.

« Les contrats à impact social permettent de financer les actions s’inscrivant dans la politique générale de développement de l’économie sociale et solidaire prise en charge par des acteurs sociaux. Le mécanisme des contrats à impact social prévoir un financement initial du projet par un investisseur privé qui sera remboursé par la puissance publique en cas de succès  »(Convention du 19 décembre 2018 de délégation de gestion pour les contrats à impact social, J.O. du 30-12-18).

Les contrats à impact social (CIS) et leur développement dans le cadre du financement de projets sociaux depuis leur création en 2014 ont connu un accueil plutôt réservé. Le CIS est présenté dans une nouvelle version, le « contrat à impact » (dorénavant social ou écologique), depuis le mois de septembre 2020, l’occasion de revenir sur ce dispositif spécifique.

Les contrats à impact social font intervenir de nombreux acteurs qui relèvent de la sphère publique et de la sphère privée. Le cadre juridique de ce type de contrat pose quant à lui de nombreuses questions en pratique sur le véhicule juridique approprié.

I. Les acteurs du contrat

Le dispositif du contrat à impact social fait intervenir plusieurs partenaires relevant des secteurs public et privé. Il s’agit d’un mécanisme de partenariat financier par lequel la puissance publique mandataire présente un projet qui sera financé par des investisseurs privés et mis en œuvre par une association ou une entreprise sociale pour le compte du partenaire public.

A. Le partenaire public

Le partenaire public est en principe une autorité publique telle que l’Etat ou une collectivité territoriale. Cet acteur public va définir et cibler une politique sociale spécifique afin de permettre l’émergence d’un projet social qualifié d’« innovant ». L’Etat, en tant que partenaire public, procède par appel d’offres. Quant à l’objet, il devra s’agir d’une question de prévention d’un problème social tel que l’exclusion ou l’insertion, ou encore la précarité.

L’Etat aura ensuite pour mission de sélectionner le programme et de fixer des objectifs en termes d’impact social à atteindre. C’est le point névralgique du contrat à impact social, comme nous le constaterons dans la seconde partie du dossier juridique, consacrée au mécanisme juridique.

Ce n’est enfin que dans l’hypothèse d’une atteinte des objectifs préalablement fixés que les investisseurs seront rémunérés à l’issue du contrat.

B. Le porteur de projet

Le deuxième acteur principal de ce mécanisme est le porteur de projet, qui peut être une association ou une entreprise issue de l’économie solidaire. Il aura pour mission de présenter en premier lieu un projet lors de l’appel d’offres qui réponde aux objectifs du partenaire public, mais pour lequel il est libre du choix des moyens et de sa mise en œuvre. Il devra ensuite mener à bien l’exécution du projet dont les contours auront été déterminés par l’Etat.

A ce stade, tant le partenaire public que le porteur du projet ne prennent en charge le financement. C’est le rôle de l’investisseur privé, troisième partenaire du contrat à impact social.

C. L’investisseur privé

L’investisseur pourra être un institutionnel, une fondation ou encore de simples particuliers qui vont prendre en charge le coût du projet lancé par l’Etat et mis en œuvre par le porteur.

L’investisseur n’obtiendra remboursement et retour sur investissement que dans l’hypothèse de la réussite du contrat à impact social. Il faudra donc pouvoir fixer des objectifs chiffrés clairs et aisément identifiables pour que l’investisseur ait la connaissance appropriée du risque encouru. L’atteinte des objectifs chiffrés dans le cadre du CIS permettra à l’investisseur d’obtenir remboursement par le payeur final, l’Etat. Il est prévu également la possibilité d’obtenir un retour sur investissement ou un rendement en fonction du degré d’atteinte des objectifs et de paliers mis en place par un évaluateur indépendant.

A noter : L’investisseur n’obtiendra remboursement qu’en cas d’atteinte des objectifs, ce qui induit l’absence totale de prise en charge par l’Etat du projet si le résultat n’est pas atteint.

D. L’évaluateur indépendant

Le dernier acteur que l’on peut intégrer au sein du mécanisme du contrat à impact social est l’évaluateur indépendant. Sa mission : évaluer les résultats du programme social.

En pratique, cet acteur est indispensable, car c’est lui qui définit l’objectif à atteindre et les paliers qui permettront à l’investisseur d’obtenir un rendement en fonction de la réussite du projet. L’évaluateur peut être une agence externe ou un institut de recherche et le rapport d’évaluation permettra de connaître les résultats du programme et surtout de définir si le coût du projet demeure à la charge de l’investisseur ou sera remboursé par le partenaire public.

Au sein des quelques contrats à impact social conclus à ce jour, on relève que l’évaluateur doit être associé à la définition des objectifs et à leur chiffrage ou mesurabilité. Des points d’étape sont prévus afin de suivre l’évolution du CIS. Il ne s’agit donc pas uniquement d’une évaluation au terme du contrat mais bien d’un suivi régulier.

II. Le montage juridique

Au-delà des aspects économiques et sociétaux du contrat à impact social, doit se poser la question, bien plus importante, des modalités de sa mise en œuvre. Dans la mesure où le contrat à impact social est, à ce jour, que peu développé en France (le premier date de 2016, voir page 21), la question de son montage juridique apparaît très complexe. On relève également que les contrats à impact social en droit français n’ont absolument pas la même « ampleur » que ceux qui ont pu être conclus au Royaume-Uni, par exemple. Les montants engagés sont en effet d’ampleur modeste et il est difficile de recourir à des montages juridiques utilisés pour les contrats étrangers qui peuvent avoir un coût très élevé au regard du montant global du contrat à impact social. On pourra citer à titre d’exemple le « special purpose vehicle » qui correspond en français à un véhicule de financement créé dans le cadre d’une opération de titrisation (anciennement les fonds communs de créances).

En pratique, si l’on évoque usuellement un contrat à impact social, en réalité, d’un point de vue juridique, de nombreuses conventions doivent être passées pour la mise en place d’un tel dispositif, au-delà de la convention-cadre tripartite qui doit être signée par l’opérateur social (association ou entreprise sociale), le tiers payeur (en principe l’Etat ou une instance publique) et le ou les investisseurs.

Ainsi, le dispositif contractuel doit également comprendre en pratique les différentes conventions suivantes :

• une convention de subvention bipartite, qui doit être signée entre le tiers payeur et l’opérateur social, indispensable du point de vue de la comptabilité budgétaire ;

• une convention bipartite régularisée entre les investisseurs et l’opérateur social, qui a vocation à régir le prêt ou l’émission obligataire ;

• une convention de nantissement de créance et de solde de compte, passée entre l’opérateur social et les investisseurs afin d’organiser les garanties.

Le haut-commissariat à l’économie sociale et solidaire et à l’innovation sociale, dans son rapport publié en juin 2019 sur le développement du contrat à impact social(1), fixe le cadre juridique de la dépense publique. A ce titre, il rappelle les obligations des opérateurs sociaux bénéficiant de contributions publiques et leur soumission :

• d’une part, au droit national, qui définit si le soutien public relève du régime d’une procédure de marchés publics ou d’une subvention ;

• et, d’autre part, au droit communautaire qui pose la définition des « aides d’Etat ». Il est alors question de respecter le cadre des services d’intérêt économique général (SIEG) et leur compatibilité nécessaire avec les règles de concurrence au sein du marché unique communautaire.

Le haut-commissariat précise, s’agissant du choix entre le régime de la subvention et la procédure de passation des marchés publics, que le CIS devait pouvoir relever plutôt du cadre de la subvention. Cette dernière pouvant être accordée au terme du processus de mise en place du contrat à impact social et donc être en cohérence avec la proposition définitive du projet de l’opérateur social, ce que ne permet pas la procédure de marchés publics. En effet, cette dernière induit de remplir un cahier des charges au début de la sélection du projet du contrat à impact social et fige le profil du projet, pouvant empêcher sa maturation et son adaptation au fil de l’évolution de sa construction.

Le second avantage, non négligeable, du cadre du service d’intérêt économique général est la dispense de notification préalable à la Commission européenne, contrairement aux marchés publics. La procédure est alors bien plus complexe et longue.

Pour bénéficier d’un contrat de subvention, le contrat à impact social doit satisfaire à deux conditions cumulatives :

• la personne publique ne doit pas être à l’initiative du projet. Ce qui est le cas dans la procédure de contrat à impact social pour laquelle la puissance publique lance un appel à projets, mais les candidats bénéficient d’une autonomie totale pour définir leur projet ;

• le contrat de ne pas avoir pour objet d’accorder une contrepartie directe au bénéfice de la puissance publique.

Ce n’est que dans l’hypothèse du respect de ces deux conditions cumulatives que le contrat à impact social pourra entrer dans le cadre communautaire du SIEG et dans le cadre national du contrat de subvention.

A. L’absence de contrepartie directe

La question de la contrepartie directe pose une réelle difficulté pour la mise en place du cadre du contrat à impact social. En effet, il convient que le dispositif contractuel s’attache à l’impact social qui sera recherché et qu’il ne prenne pas en considération la seconde partie, pourtant essentielle, du gain budgétaire qui sera attendu pour la personne publique instigatrice de l’appel à projets. Si le contrat à impact social a une vocation « sociale », la puissance publique met en place en réalité le contrat avec la volonté d’éviter un coût pour la collectivité et en conséquence attend un gain budgétaire du CIS.

L’appel à projets vise à répondre à un besoin que la puissance publique doit remplir en matière de prévention d’un problème social tel que :

• l’hypothèse de la baisse du taux de chômage avec le projet « Regain » pour le soutien à l’entrepreneuriat dans les territoires hyper-ruraux (voir page 21) ;

• ou encore l’abaissement du taux de récidive pénale sur le modèle du projet « One Service » (voir encadré page 23).

Le contrat a en conséquence pour objectif premier de faire financer un projet, certes social ou d’ordre environnemental, qui devrait relever de la sphère publique mais pour lequel l’Etat ne dispose pas des moyens financiers pour l’incarner.

Il faut cependant impérativement éviter toute référence dans l’objet de la convention au gain budgétaire et ne s’attacher qu’à mesurer les éventuelles économies qui pourront être réalisées par la personne publique pour garantir la condition d’absence de rémunération directement liée à la prestation individualisée (CE, avis 18 mai 2004, n° 370169).

Le recours au contrat à impact social doit en pratique être limité au stade de l’expérimentation ou éventuellement à celui du passage à une échelle supérieure. Dès lors que le contrat est destiné à sa réplication, on peut s’interroger sur le réel objet du dispositif et, par la suite, remettre en cause la condition d’absence de rémunération directement liée à la prestation individualisée. En effet, en aucun cas, l’objet du contrat ne doit permettre au partenaire public d’anticiper correctement le résultat et de viser un rendement de l’opération. Dans cette hypothèse, le risque en principe inhérent au concept de « contrat à impact social » doit être remis en cause.

C’est la question du caractère novateur du projet qui conditionnera la validité du contrat à impact social. La problématique principale est en définitive régulièrement relevée et c’est elle qui fait l’objet des principales critiques des détracteurs du contrat à impact social. En effet, si les projets sont portés par des associations ou entreprises sociales, il n’en demeure pas moins que l’aspect financier est pris en charge par des investisseurs à caractère privé. Or, l’obtention du financement peut être plus aisée dès lors que le porteur de projet parvient à démontrer à l’investisseur la rentabilité de ce dernier. Il en va de même du choix du candidat retenu par la puissance publique qui souhaitera, de manière évidente, que le contrat puisse générer des économies grâce à son aboutissement et une efficacité réelle de l’action engagée. Mais si le contrat à impact social permet au partenaire public d’envisager un gain économique lorsque le projet a un caractère novateur, la question doit être posée si ledit projet intervient avec un risque moindre. Dans cette hypothèse, le contrat à impact social pourrait n’avoir comme avantage que d’éviter à la personne publique d’engager les fonds avant d’obtenir un résultat satisfaisant. Mais, les taux d’intérêt étant élevés au regard du risque en principe inhérent au contrat à impact social, le coût définitif deviendrait bien plus important pour l’Etat ou la personne publique. De surcroît, le recours aux marchés publics dans des conditions classiques apparaîtrait bien plus adapté.

B. Les conditions relatives au service d’intérêt économique général

L’octroi d’une contribution publique à un opérateur social dans le cadre d’une mission particulière d’intérêt général doit répondre à des conditions spécifiques et le cadre du service d’intérêt économique général (SIEG) est d’une nature spécifique.

Pour prétendre à une aide d’Etat via le SIEG, l’opérateur social doit répondre à un des critères d’exigibilité suivants :

• être un service social ou un hôpital ;

• à défaut, justifier que le montant de la subvention accordée par l’Etat est inférieur à 15 millions d’euros. Au regard de la vocation du contrat à impact social comme des montants des projets d’ores et déjà exécutés, l’une au moins des conditions paraît être aisément remplie.

La difficulté porte sur l’objet du SIEG qui doit relever de la fourniture de prestations présentant un impact social avec trois conditions cumulatives :

• l’intégration de l’obligation pour l’opérateur social de bénéficier d’un montant très précis ;

• la fixation de modalités de récupération des « éventuelles surcompensations » ;

• le montant des compensations ne doit pas excéder la somme « nécessaire pour couvrir des coûts nets occasionnés par l’exécution des obligations de service public, y compris un bénéfice raisonnable »(1).

C’est cette dernière condition qui pose le plus de difficultés. Au-delà de l’objet social du contrat, il demeure une recherche de rationalité financière et de bénéfices. Le contrat à impact social devra donc s’attacher à encadrer tant la prime qui pourra être versée aux investisseurs en cas de succès que celle éventuellement versée à l’opérateur.

S’agissant du bénéfice raisonnable pour les investisseurs, il faudra de nouveau bien s’attacher à l’objet du contrat et surtout éviter que la prime destinée aux investisseurs soit directe. En effet, contrairement à l’opérateur, il ne sera pas envisageable de considérer que les investisseurs fournissent à titre principal des prestations présentant un impact social. S’agissant en revanche de la prime de succès qui pourra être versée à l’opérateur, c’est la notion de rentabilité de la part du porteur de projet qui devra être appréciée et limitée au regard du droit communautaire.

On relève à ce titre deux options :

• si le taux de rentabilité est raisonnable, la condition est réputée remplie et il s’agit ici du niveau de risque et du taux de rendement du capital ;

• si le taux de rentabilité net dépasse le plafond fixé pour reconnaître la prime de succès éventuelle comme raisonnable, le contrat à impact social devra alors être justifié au regard du risque engagé par le porteur de projet.

A noter : La notion de bénéfice raisonnable est déterminée par un taux de rendement du capital qui ne doit pas dépasser le taux de « Swap » applicable – contrat établi entre deux parties en vue d’échanger des flux financiers – majoré d’une prime de 100 points de base.

III. « Regain » : premier CIS français

En 2016, le secrétariat d’Etat général à l’économie sociale, solidaire et responsable a lancé un appel à projets financé par les CIS visant à développer l’activité professionnelle dans les zones rurales isolées et à abaisser le taux de chômage figurant alors parmi les taux les plus élevés de l’Union européenne.

L’expérimentation de ce premier CIS français avait pour objet de faire financer par des investisseurs de nature privée un projet permettant de donner accès au microcrédit à des bénéficiaires en situation défavorisée et leur apporter une aide au développement d’une activité professionnelle dans des zones rurales isolées en valorisant l’utilisation des outils digitaux. L’impact recherché, de nature sociale, devait être la réinsertion durable des bénéficiaires dans l’emploi.

Le projet de l’Association pour le droit à l’initiative économique (Adie) a été retenu et une convention de subvention signée le 24 novembre 2016 avec l’Etat.

Comme pour tout contrat à impact social, quatre types d’acteurs principaux étaient regroupés au sein des relations contractuelles :

• le ministère de l’Economie et des Finances ;

• l’Adie, porteuse de projet ;

• des investisseurs sociaux tels que BNP Paribas, La Caisse des dépôts, la Fondation Avril, la Banque des territoires, AG2R La Mondiale et Renault Mobiliz Invest ;

• KPMG France, cabinet d’audit et d’expertise, évaluateur externe, chargé de mesurer la réussite du contrat à impact social, d’évaluer le programme dans son ensemble et de son avancement.

Le projet de l’Adie, spécialisée dans le microcrédit alloué aux créateurs d’entreprise dans l’incapacité d’obtenir un crédit bancaire, devait permettre de répondre à la problématique de désertification de l’emploi dans les zones rurales, leur revitalisation et la baisse du taux de chômage dans ces territoires.

Le financement du projet proposé par l’association étant issu du système de contrat à impact social, différents critères cumulatifs devaient être réunis. Ces derniers incluaient le fait de « […] se situer dans une optique de prévention grâce à un projet innovant ciblant une population définie ou définissable, d’être mesurable et en capacité de définir des objectifs de résultat à moyen terme grâce à un nombre limité d’indicateurs et le fait de générer des économies pour la collectivité à hauteur d’un niveau au moins égal au coût total du projet » (contrat à impact social de l’Adie)(1). L’association avait déjà réalisé une étude d’impact au cours des années 2015 et 2016 pour des projets relativement similaires.

Dans le cadre du contrat à impact social de l’Adie, un comité de pilotage – composé d’un représentant du porteur de projet, d’un représentant de chaque investisseur, de l’évaluateur externe et de l’autorité publique – a été chargé de rendre compte de l’avancée du projet, d’analyser l’évaluation et de suivre et garantir la bonne utilisation des fonds.

Le directeur général de l’association précisait ainsi l’importance du dispositif d’évaluation : « Le choix des indicateurs et des objectifs, par exemple, est le résultat d’une concertation au cours de laquelle toute une série de propositions faites par l’évaluateur [ont été] passées en revue. Nous avons fait le choix d’indicateurs mesurables, simples, en nombre limité, et qui répondaient à l’objectif social du programme, ni plus, ni moins. Ce dernier point est essentiel : le programme opérationnel ne doit pas être ajusté pour répondre aux besoins du contrat à impact social, mais c’est bien le dispositif d’évaluation qui doit être au service du programme » (contrat à impact social de l’Adie).

Afin de déclencher le remboursement par l’Etat des investissements, le contrat à impact social fixait les notions de bénéficiaires « financés » et de bénéficiaires « insérés ». L’intervention de l’Etat en qualité de payeur final étant réservée à l’évaluation de la situation des bénéficiaires insérés.

La qualité de bénéficiaire financé est octroyée à toute personne ayant participé au programme. Le bénéficiaire inséré est quant à lui défini comme un bénéficiaire financé toujours en activité, dans le cadre d’une entreprise, au jour de la réalisation de l’enquête, occupant un emploi salarié incluant contrat à durée indéterminée, contrat à durée déterminée ou mission d’intérim de 2 mois ou plus, à temps partiel ou temps complet, au jour de la réalisation de l’enquête, devant occuper un emploi salarié tel que précédemment défini dans un délai de 30 jours après le jour de la réalisation de l’enquête ou ayant été en situation d’emploi salarié dans les conditions précédemment définies également au cours de l’un au moins des 60 jours précédant le jour de la réalisation de l’enquête (contrat à impact social de l’Adie).

S’agissant du point de seuil permettant d’envisager le remboursement des investisseurs au contrat, la réinsertion durable de 172 personnes devait permettre d’obtenir restitution de 50 % du capital investi. Le capital restant dû devait être remboursé dans l’hypothèse d’une réinsertion durable de 270 personnes, intégrant des paliers et un plafond au-delà du nombre de personnes précité.

Des primes de succès, ou rendements sur investissement ont également été intégrées dans le contrat dans l’hypothèse d’une surperformance de l’association tant pour l’Adie en qualité de porteur du projet que pour les investisseurs. Figuraientt également au contrat des plafonds devant permettre à l’Etat de bénéficier de gains économiques réservés à compter de la réinsertion durable de la 407e personne visée par le projet.

Le coût du projet, via le contrat à impact social, peut apparaître très majoré, car il doit intégrer également le rendement attendu par les investisseurs, le coût de l’évaluation et celui de la structuration du projet.

En effet, on rappellera qu’il est nécessaire de prendre en considération le coût du projet mais également celui de l’intervention de l’évaluateur externe et de l’accompagnement juridique, indispensable au regard du caractère très spécifique des contrats à impact social. Dans ces conditions, le montant global du contrat peut être très largement supérieur à celui du simple projet. C’est à ce stade que doit se poser la question de la légitimité du choix du CIS par rapport à d’autres types de financement et du recours à un investisseur privé pour mener une action relevant des politiques publiques.

Le relancement des contrats à impact, dorénavant social et environnemental, en septembre par le gouvernement, pourra conduire de nouveau à s’interroger sur les modalités de mise en œuvre de ces partenariats publics-privés et également sur leur légitimité.

Du contrat à impact social au contrat à impact

Le contrat à impact social est né de la loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire (loi « Hamon ») qui a défini pour la première fois le périmètre du secteur. Ce texte a intégré de nouvelles formes de financement, et notamment celles visant le contrat à impact social. Aujourd’hui, on ne parle plus cependant des « contrats à impact social » mais des « contrats à impact » qui regroupent, dans leur nouvelle version, tant le secteur social que celui de l’écologie.

Le nouveau dispositif est donc destiné à financer des programmes sociaux et environnementaux et a fait l’objet d’une rénovation au mois de septembre 2020.

A noter : L’appel à projets du 23 septembre 2020, lancé par le secrétaire d’Etat à l’économie sociale, solidaire et responsable, vise le réemploi, la réduction des déchets et le gaspillage. La date limite de candidature est fixée au 23 décembre 2020. L’Etat annonce par ailleurs le lancement prochain de nouveaux appels à projets du ministère du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion sur l’inclusion de l’emploi et du ministère de la Cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales s’agissant des personnes sans abri.

Genèse du contrat à impact social : les « social impact bonds »

Si les contrats à impact social sont entrés tardivement dans le paysage français, le dispositif est né au Royaume-Uni dans le cadre d’un projet pilote mené en 2010.

Le programme « One Service »

Le premier projet « social impact bonds » (« obligations à impact social ») a ainsi été mené dans la prison de Peterborough (est de l’Angleterre), et visait à diminuer le taux de récidive des personnes condamnées à de courtes peines de prison (inférieures à 12 mois). Le ministre britannique de la Justice, à l’initiative du projet, constatait une problématique de récidive très élevée dans le cadre des emprisonnements inférieurs à 12 mois : environ 60 % des personnes condamnées à des peines d’emprisonnement de cette durée maximale récidivaient dans l’année suivant leur sortie de prison. Le dispositif visait ainsi à diminuer ce taux de récidive.

C’est l’établissement pénitentiaire de Peterborough qui fut choisi pour la mise en œuvre de cette première expérimentation. Dénommé « One Service », un programme de soutien individualisé aux détenus de l’établissement de Peterborough fut mis en place. L’objectif étant d’accompagner depuis leur incarcération jusqu’à leur sortie de prison des hommes de plus de 18 ans.

Les détenus éligibles à cette première expérimentation étaient libres d’intégrer ou non ce programme. Initialement fixé pour une durée de 7 ans (de 2010 à 2017), le programme a pris fin en 2015.

Trois cohortes

Ce dernier prévoyait une expérimentation reposant sur trois cohortes de 1 000 personnes purgeant leur peine à Peterborough. L’objectif de « One service » et des associations porteuses du programme était la diminution du taux de récidive d’au moins 10 % par cohorte ou une baisse globale minimale supérieure à 7,5 %. En conséquence, le paiement des investisseurs ne devait intervenir que dans l’hypothèse où, dans les trois cohortes de 1 000 personnes condamnées à des peines de moins de 1 an d’emprisonnement, une réduction d’au moins 10 % de la récidive était constatée pour une ou plusieurs des trois cohortes, ou à la fin du programme, une baisse relative constatée sur les trois cohortes en moyenne supérieure à 7,5 %.

Au-delà du paiement des investisseurs (c’est-à-dire du remboursement du capital investi) des intérêts étaient fixés qui s’élevaient à 2 % au minimum, avec un maximum de 13 %.

Afin de définir la réussite ou non du projet, un évaluateur externe devait mettre en place des critères et une méthodologie d’évaluation. Les évaluateurs indépendants retenus étaient l’université de Leicester et l’université de Greenwich. La société privée QinetiQ, dont l’activité était centrée sur la défense, l’aérospatiale et la sécurité, était également intégrée aux évaluateurs.

Méthodes retenues

Deux types de méthodes peuvent habituellement être retenus : d’une part, l’évaluation randomisée qui se base sur une répartition délibérée et aléatoire des groupes de contrôle ou d’intervention ; d’autre part, l’évaluation quasi expérimentale, qui connaît un développement bien plus restreint.

Le second procédé apparaît plus approprié au « social impact bond » et à son caractère novateur. Il a pu être défini notamment dans le secteur de la santé comme « une expérimentation avec une intervention donnée, des résultats de santé mesurés et au moins deux unités expérimentales (groupe recevant l’intervention et groupe contrôle), mais sans recours à la randomisation pour créer les conditions d’inférence causale »(1).

La méthode d’évaluation retenue afin de déterminer si le programme avait amélioré le taux de récidive ou non grâce au « social impact bond » était celle de la méthode quasi expérimentale. Contrairement à la méthode d’évaluation randomisée, la méthode d’appariement sur score de propension prévoyait la comparaison entre le groupe bénéficiant du Social Impact Bond et d’un second groupe témoin constitué de prisonniers condamnés également à des peines inférieures à 12 mois d’emprisonnement incarcérés dans l’ensemble des prisons du Royaume-Uni. Afin de garantir le résultat de l’évaluation, pour chaque détenu des cohortes de Peterborough, dix profils comparables intégraient le groupe témoin. Le caractère comparable des profils était issu de données extraites des informations détenues par la police britannique et l’ensemble des établissements pénitentiaires du Royaume-Uni.

Les résultats

Au terme du contrat à impact social, les évaluateurs externes constataient 1 330 nouvelles condamnations pour des faits commis dans les 12 mois suivants la remise en liberté au sein de la cohorte globale de 3 000 personnes de Peterborough contre 14 523 condamnations pour 9 360 personnes sélectionnées dans la cohorte témoin. Le taux de récidive connaissait ainsi un abaissement de 8,39 % après suivi du programme « One Service ». Toutefois, le seuil minimal de 10 % pour les trois cohortes de Peterborough subdivisées en trois catégories n’était atteint dans aucune des cohortes et ne permettait pas aux investisseurs d’obtenir le remboursement à la fin du contrat. En revanche, le contrat initial prévoyait également que la baisse pouvait être calculée à titre alternatif sur les trois cohortes au terme du programme si cette baisse était en moyenne supérieure à 7,5 %. En conséquence, grâce à ce second critère, les investisseurs du « social impact bond » ont obtenu, de la part du ministère de la Justice et du « Big Lottery Fund », le remboursement des sommes investies.

Notes

(1) Rapport « Lavenir » : « Pour un développement du contrat à impact social au service des politiques publiques » – 30 juin 2019. https://bit.ly/2VeFBKC.

(1) Rapport « Lavenir » : « Pour un développement du contrat à impact social au service des politiques publiques ».

(1) « Le contrat à impact social de l’Adie, étude de cas d’un contrat à impact social » – Impact Invest Lab – Janvier 2020.

(1) T. Benmarhnia et D. Fuller – « Les méthodes quasi expérimentales. L’effet de l’âge légal minimum sur la consommation d’alcool chez les jeunes aux Etats-Unis », in « Evaluation des interventions de santé mentale » – IRD Ed., 2019.

Voir également : A. Nicholls et E. Tomkinson, « The Peterborough Pilot Social Impact Bond », Université d’Oxford, oct. 2013 ; Ministry of Justice, « Interim re-conviction figures for Peterborough and Doncaster Payment by Results pilots », Ministry of Justice Statistics Bulletin, 2014.

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