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« Considérer les résidents comme des adultes »

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Dans son livre, Jack Messy, psychanalyste spécialisé en gérontologie, propose un projet original de fonctionnement d’un Ehpad basé sur une relation d’aide inspirée de la psychothérapie institutionnelle. Un concept qui repose sur le fait que le soin n’est pas seulement médical.
En quoi consiste la psychothérapie institutionnelle que vous prônez ?

Je constate, comme bien d’autres, que le modèle de l’Ehpad est à bout de souffle. Pour changer la donne, il faut se baser sur la psychothérapie institutionnelle, appelée aussi « thérapie par le milieu ». L’idée est que tous les intervenants, du soignant au personnel d’entretien, du directeur au jardinier, soient en lien avec les résidents. Cette simple relation est soignante. Il n’y a pas que le sanitaire qui soigne. La parole, les gestes… sont aussi thérapeutiques. Cela nécessite un travail en équipe. Aujourd’hui, le personnel médical est de plus en plus souvent séparé du personnel hôtelier ou de restauration. Or ils ont tous un rôle à jouer dans l’accompagnement et l’aide.

En quoi cela va-t-il « révolutionner » l’Ehpad ?

Au lieu de se préoccuper des tâches à accomplir, on va se préoccuper du résident. Dans sa singularité et dans les problèmes qu’il peut rencontrer. Chaque moment de sa vie doit être l’occasion d’une relation de soins. C’est ce qui peut se produire, par exemple, lors d’une toilette quand une attention est portée par un simple temps d’écoute. Il faut humaniser les Ehpad, mettre du social, de la vie au cœur de ces structures. L’essentiel dans cette thérapie par le milieu est de considérer les résidents comme des adultes avant tout, quelle que soit leur déficience. D’ailleurs, je préfère parler d’adultes âgés que de seniors, retraités ou personnes âgées.

Concrètement, qu’est-ce que cela change pour un professionnel ?

« Etre plus à l’écoute des résidents. » Cette phrase, j’ai dû l’entendre un millier de fois. Cela tombe bien puisque les fondements de la psychothérapie institutionnelle sont justement l’écoute et la réunion d’équipe. J’ai élaboré un mode de fonctionnement qui répond mieux aux attentes des personnes âgées en imaginant l’organisation du travail des équipes sur une journée (lever, toilette, repas…) et pour la nuit, ainsi que les différents moyens d’intervenir. Pour que le résident soit au cœur du projet, le personnel doit fonctionner en binôme. La prise en charge globale de la personne – le service médical s’occupant du physique, la psychologue du psychique et l’animateur du social – est une erreur. Selon moi, une meilleure communication entre ces trois pôles améliore l’accompagnement du résident. J’ai déjà observé des transformations. Ainsi, dans beaucoup de maisons de retraite, on ne commence plus les toilettes du matin par un bout du couloir pour finir par l’autre. De même, il est plus judicieux de fonctionner comme un restaurant plutôt que d’attendre que la salle à manger soit pleine pour commencer à servir le repas. Ces petites choses n’exigent pas de moyens supplémentaires mais facilitent le quotidien des résidents comme celui des professionnels. Parmi ces derniers, les aides médico-psychologiques semblent mieux préparés à cette approche que les aides-soignantes ou les infirmières.

Comment les familles s’intègrent-elles dans cette démarche ?

Il faut leur permettre d’être associées aux projets thérapeutiques, leur expliquer que si une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer est allongée par terre, ce n’est pas un problème. La participation des familles à la prise en charge du soin doit être développée et accompagnée. Elles ne doivent pas se décharger de leurs difficultés en mettant l’accent essentiellement sur la sécurité de la personne âgée. Evidemment, c’est à la direction des établissements de favoriser cette démarche et elle doit y être formée. Mais c’est à contre-courant des orientations actuelles basées sur la médicalisation à tout crin et la recherche du profit. Les personnes qui entrent en établissement sont de plus en plus dépendantes mais elles souffrent essentiellement de troubles du comportement. Aucune thérapie médicale, dans le sens chimiothérapique, ne peut permettre d’améliorer leur situation. D’où l’importance de la psychothérapie institutionnelle où le milieu est moteur. Si une équipe ne va pas bien, les résidents vont mal. Si elle est soudée, ils vont mieux. C’est prouvé. Soigner l’Ehpad permet de soigner les personnes âgées.

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