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L’illettrisme, un fléau persistant au Maroc

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L’illettrisme, un fléau persistant au Maroc

Crédit photo Étienne Cassagne
L’important travail associatif peine à compenser les carences de l’Etat dans un pays où 66 % des enfants âgés de 10 ans s’avèrent incapables de lire et de comprendre un texte simple, selon un récent rapport de la Banque mondiale.

Le Maroc n’en a pas fini avec l’illettrisme, dont la lutte a pourtant été érigée au rang de priorité nationale par les autorités du royaume chérifien. Selon un rapport de la Banque mondiale publié à la fin du mois d’octobre, « en 2019, 66 % des enfants marocains âgés de 10 ans n’étaient pas capables de lire et comprendre un texte simple, soit un pourcentage inférieur de 2,5 points à la moyenne régionale du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord et de 10,7 points à la moyenne des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure. » Des chiffres qui témoignent de « l’urgence de résorber les lacunes du système éducatif », souligne l’étude, mais qui illustrent surtout l’échec du gouvernement à réaliser son objectif stratégique d’éradiquer l’illettrisme, initialement fixé à 2015 et désormais repoussé à 2030.

Les associations locales (Espace enfant Souiri, Cœur de gazelles, Afoulki…) et les ONG internationales investies dans des programmes d’aide aux enfants et aux adultes dans l’apprentissage de l’amazighe comme de l’arabe, les deux langues officielles, ou du français, ne manquent pourtant pas. Et la Banque mondiale vante son « prêt » de 500 millions de dollars au Maroc, censé « accompagner les efforts des autorités en s’attachant plus particulièrement à améliorer les acquis scolaires et la gouvernance du secteur ».

Un partenariat état-associations peu efficace

Une « gouvernance » qui a effectivement du plomb dans l’aile. Depuis la fin des années 1990, le gouvernement marocain a confié la mise en œuvre de ses programmes à une multitude d’acteurs publics (Promotion nationale, ministère des Affaires sociales, ministère de la Jeunesse et des Sports…), tout en autorisant la délégation de leur application à des associations et ONG censées compenser les carences du système éducatif. « Plusieurs facteurs ont considérablement réduit l’efficacité de ce partenariat Etat-associations », explique Mohammed Bougroum, professeur d’économie à l’université Cadi Ayyad de Marrakech(1) : « Un faible niveau de qualification et de compétences en matière de gestion financière et administrative, et le nombre d’inscrits aux programmes comme principal critère pour l’octroi de subventions publiques. Ceci favorise le développement de comportements opportunistes chez certaines associations pour qui les programmes d’alphabétisation ne sont qu’un support privilégié de leur activité principale, qui est la recherche de subventions. »

Si le Maroc part de très loin – le taux d’analphabétisme dans l’ensemble de la population est passé de 87 % en 1960 à 32 % en 2017, selon les statistiques officielles (36 % en 2018 selon la Banque mondiale) –, la crise du coronavirus et son impact sur le système éducatif pourrait encore ralentir l’éradication du fléau. Toujours selon la Banque mondiale, les mesures de confinement ont entraîné la perte d’au moins trois mois d’apprentissage chez environ 900 000 enfants d’âge préscolaire, 8 millions d’élèves du primaire et du secondaire, et un million d’étudiants du supérieur. Une fermeture des écoles d’autant plus préjudiciable « qu’elle touche de manière disproportionnée les élèves les plus vulnérables, en particulier ceux dépourvus du matériel numérique ou de la connexion Internet nécessaires pour bénéficier d’un enseignement à distance ».

Dans son état des lieux comme dans ses recommandations aux autorités, l’institution financière oublie tout de même un paramètre essentiel : ce sont ses propres directives, couplées à celles du Fonds monétaire international, appelées « programmes d’ajustement structurels », qui ont encouragé le gouvernement marocain à réduire de manière drastique les budgets alloués à la santé ou à l’éducation.

Notes

(1) « La politique d’alphabétisation au Maroc : quel rôle pour le secteur associatif ? », revue Mondes en développement, 2016.

… et d’ailleurs

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