Le Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière souhaitait la transmission d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur la procédure disciplinaire en cas de grève des agents de la pénitentiaire. Le Conseil d’Etat a refusé de transmettre cette demande dans une décision rendue le 5 novembre 2020.
L’interdiction d’exercice du droit de grève dans l’administration pénitentiaire est justifiée, juge le Conseil d’Etat dans une décision rendue le 5 novembre 2020.
Le Syndicat national pénitentiaire Force ouvrière (SNP-FO) demandait à la Haute Juridiction administrative de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur l’article 3 de l’ordonnance du 6 août 1958 relative au statut spécial des fonctionnaires des services déconcentrés de l’administration pénitentiaire.
Cet article, modifié par la récente loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019, interdit « toute cessation concertée du service, tout acte collectif d’indiscipline caractérisée de la part des personnels des services extérieurs de l’administration pénitentiaire ». Tout personnel qui braverait cette interdiction est passible d’une sanction en conseil de discipline.
Pour SNP-FO, ces dispositions apparaissent contraires au droit de grève garanti par l’alinéa 7 du préambule de la Constitution de 1946, qui dispose que « le droit de grève s’exerce dans le cadre des lois qui le réglementent ».
Le Conseil d’Etat rappelle d’abord que « si le droit de grève est un principe de valeur constitutionnelle, il appartient au législateur d’en tracer les limites en opérant la conciliation nécessaire entre la défense des intérêts professionnels, dont la grève est un moyen, et la sauvegarde de l’intérêt général auquel la grève peut être de nature à porter atteinte ».
Il ajoute que la reconnaissance du droit de grève ne peut priver le législateur de la prérogative d’y apporter des limitations pour assurer la continuité du service public qui a, comme le droit de grève, « le caractère d’un principe de valeur constitutionnelle ». « Ces limitations peuvent aller jusqu’à l’interdiction du droit de grève aux agents dont la présence est indispensable pour assurer le fonctionnement des éléments du service dont l’interruption porterait atteinte aux besoins essentiels du pays », précise ensuite le Conseil d’Etat. L’interdiction du droit de grève pour les personnels pénitentiaires est permise car l’interruption de leur service est « de nature à porter atteinte aux besoins essentiels du pays ».
S’agissant de la procédure de sanction disciplinaire, le Conseil d’Etat juge qu’elle est conforme, puisqu’en permettant aux intéressés de présenter leurs observations sur les faits reprochés, le législateur a respecté le droit à un procès équitable. Le Conseil d’Etat semble répondre lui-même à la question posée, sans la transmettre au Conseil constitutionnel.
Conseil d’Etat, 5 novembre 2020, n° 439211.