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Les syndicats en entreprise ou association

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Les syndicats en entreprise ou association

Crédit photo Alison Dahan, Clarisse Girard
Tout salarié peut défendre ses intérêts par l’action syndicale sein de son entreprise ou association. Ses droits et revendications peuvent être soutenus par des sections syndicales et des délégués syndicaux. Présentation de ces acteurs du dialogue social.

La liberté syndicale a été consacrée aux niveaux national et international. L’alinéa 6 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 dispose que « tout homme peut défendre ses droits et ses intérêts par l’action syndicale et adhère au syndicat de son choix ». Le Conseil constitutionnel a ensuite reconnu à cette liberté une valeur constitutionnelle en intégrant le préambule visé dans le bloc de constitutionnalité (C. const., 16 juillet 1971, n° 71-44 DC). De surcroît, cette liberté a également été reconnue au niveau européen par l’article 11 de la Convention européenne des droits de l’Homme qui dispose que « toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association, y compris le droit de fonder avec d’autres des syndicats et de s’affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts. »

En vue de comprendre les enjeux liés à ce droit constitutionnellement garanti, il convient d’en délimiter les contours. La liberté syndicale s’articule autour de trois principes distincts :

• les salariés peuvent librement adhérer à l’organisation syndicale de leur choix (code du travail [C. trav.], art. L. 2141-1). La Cour de cassation rappelle à ce titre que l’adhésion du salarié à un syndicat relève de sa vie personnelle et ne peut être divulguée sans son accord (voir notamment Cass. soc., 8 juillet 2009, nos 09-60011, 09-60031, 09-60032) ;

• l’employeur doit être neutre à l’égard des différents syndicats présents dans sa structure. En effet, selon l’article L. 2141-7 du code du travail, « il est interdit à l’employeur ou à ses représentants d’employer un moyen quelconque de pression en faveur ou à l’encontre d’une organisation syndicale ». A titre d’illustration, l’employeur doit veiller à assurer une égalité de traitement entre les organisations syndicales et ne peut pas verser une subvention annuelle au profit des seuls syndicats signataires ou adhérents d’un accord collectif qui tend à améliorer l’exercice du droit syndical dans l’entreprise (Cass. soc., 29 mai 2001, n° 98-23078) ;

• l’employeur ne peut pas prendre de décision discriminatoire à l’encontre des salariés du fait de leurs activités syndicales. Ainsi il ne peut se fonder sur l’appartenance à un syndicat ou l’exercice d’une activité syndicale pour arrêter des décisions liées notamment à l’embauche, à la conduite, à la répartition des horaires, aux formations professionnelles, à la rémunération ou encore à la rupture du contrat de travail (C. trav. art. L. L. 2141-5). Cette protection a un champ d’application large puisqu’elle concerne les salariés ayant dans l’entreprise ou dans l’association une activité syndicale mais également les salariés qui disposent d’un mandat représentatif. Il protège donc à la fois les délégués et les représentants syndicaux mais également les membres du comité social et économique (CSE), les conseillers prud’homaux et les salariés simplement syndiqués.

L’employeur qui méconnaît un des principes constitutifs de la liberté syndicale peut être sanctionné. Il peut par exemple être condamné pour délit d’entrave à l’exercice du droit syndical. Cette infraction est punie d’un maximum de 1 an d’emprisonnement et d’une amende de 3 750 € (C. trav., art. L. 2146-1). De surcroît, lorsque l’employeur exerce une pression en faveur ou à l’encontre d’un syndicat, les mesures prises seront considérées comme abusives et l’employeur pourra être condamné à des dommages et intérêts (C. trav., art. L. 2141-8). Par ailleurs, sur le plan pénal, le fait de méconnaître le principe de neutralité est puni d’une amende de 3 750 € (C. trav., art. L. 2146-2).

Ce dossier vient faire le point sur les sections syndicales et les délégués syndicaux, respectivement organes et acteurs du droit syndical dans les entreprises et les associations.

I. La section syndicale

La section syndicale est l’antenne du syndicat au sein de l’entreprise ou de l’association. Elle est soumise à des conditions de mise en place et dispose de prérogatives spécifiques. En outre, dans certaines hypothèses, elle peut désigner un représentant de la section syndicale.

A. La mise en place de la section syndicale

La création de la section syndicale dans une entreprise ou une association nécessite de remplir plusieurs conditions prévues par le code du travail. Pour une meilleure lisibilité, ces conditions peuvent se classer en différentes catégories.

1. Entreprises et associations concernées

Une section syndicale peut être créée dans toutes les structures puisque le législateur ne fixe aucun effectif minimal.

2. Syndicats habilités

Le législateur laisse la possibilité de constituer une section syndicale à plusieurs types de syndicats (C. trav., art. L. 2141-1) :

• les syndicats représentatifs au niveau de l’entreprise ou de l’association ;

• les syndicats affiliés à une organisation syndicale représentative au niveau national et interprofessionnel ;

• les organisations syndicales qui remplissent les critères de respect des valeurs républicaines et d’indépendance et légalement constituées depuis au moins 2 ans et dont les champs professionnel et géographique couvrent l’entreprise ou l’association

3. Nombre d’adhérents minimal

Les syndicats doivent avoir dans la structure concernée au moins deux adhérents (C. trav., art. L. 2142-1 ; voir notamment Cass. soc., 8 juillet 2009, nos 09-60011, 09-60031 et 09-60032).

4. Forme de la section syndicale

Le législateur ne prévoit aucune condition de forme. Néanmoins, il est conseillé aux syndicats qui ont créé une section syndicale d’en avertir l’employeur pour éviter toute contestation par la suite.

B. Le rôle et les moyens accordés à la section syndicale

La section syndicale a pour mission d’assurer la représentation des intérêts matériels et moraux de ses membres (C. trav., art. L. 2142-1). Elle ne dispose pas de la personnalité juridique et est seulement une « émanation » du syndicat dans la structure. Par conséquent, elle ne peut par exemple pas déposer de liste de candidatures aux élections professionnelles ou agir en justice.

Pour exercer son rôle, la section syndicale peut dans les structures d’au moins 200 salariés bénéficier d’un local. Ce local est commun aux différentes sections syndicales sauf si l’effectif de la structure est d’au moins 1 000 salariés (C. trav., art. L. 2142-8). Le code du travail ne prévoit pas de crédit mensuel d’heures pour la section syndicale. Néanmoins, chaque section syndicale dispose d’un crédit global supplémentaire d’heures de délégation en vue de la préparation et de la négociation d’un accord d’entreprise pour ses délégués syndicaux et les salariés de la structure appelés à négocier un accord d’entreprise. Ce crédit supplémentaire ne peut excéder 12 heures par an dans les entreprises ou associations d’au moins 500 salariés et 18 heures par an dans celles d’au moins 1 000 salariés. La section syndicale se voit ainsi confier un crédit qu’elle répartit comme elle le souhaite entre ses membres (C. trav., art. L. 2143-16).

De plus, la section syndicale dispose de la faculté de communiquer avec les salariés. Elle peut ainsi afficher sur les panneaux réservés à cet effet des communications syndicales à condition d’en remettre simultanément un exemplaire à l’employeur (C. trav., art. L. 2142-3). De même, elle a la possibilité de diffuser dans l’enceinte de la structure des publications et des tracts de nature syndicale aux heures d’entrée et de sortie du personnel (C. trav., art. L. 2142-4).

A noter : Les modalités de diffusion des informations syndicales par le biais d’outils numériques peuvent être déterminées par accord collectif. En l’absence d’accord, les syndicats qui respectent les critères de valeurs républicaines et d’indépendance, constitués depuis au minimum 2 ans peuvent mettre à la disposition des salariés des informations sur un site Internet syndical accessible par l’intermédiaire du site Internet de la structure si elle en dispose d’un (C. trav., art. L. 2142-6).

Par ailleurs, la section syndicale peut organiser une réunion avec ses adhérents au sein des locaux de l’entreprise ou de l’association une fois par mois dans les conditions fixées par accord avec l’employeur. Elle peut convier des personnalités syndicales extérieures ou, avec l’accord de l’employeur, des personnalités extérieures autres que syndicales (C. trav., art. L. 2142-10). Ces réunions se déroulent en dehors du temps de travail des participants sauf pour les représentants du personnel qui peuvent utiliser leurs heures de délégation (C. trav., art. L. 2142-11).

C. Le représentant de la section syndicale

1. La désignation du représentant de la section syndicale

Un représentant de la section syndicale peut être désigné dans les entreprises ou associations dont l’effectif est au moins égal à 50 salariés par un syndicat non représentatif qui met en place une section syndicale (C. trav., art. L. 2142-1-1). De plus, le salarié désigné doit remplir les mêmes conditions que le délégué syndical (voir ci-contre) à l’exception de celle inhérente à l’audience électorale (C. trav. L. 2142-1-2).

A noter : Dans les structures de moins de 50 salariés, les syndicats non représentatifs qui mettent en place une section syndicale peuvent désigner un membre du comité social et économique comme représentant de la section syndicale (C. trav., art. L. 2142-1-4).

Par ailleurs, les modalités de désignation du représentant de la section syndicale sont identiques à celles du délégué syndical (voir ci-contre).

2. Le mandat de représentant de la section syndicale

Le représentant de la section syndicale a pour mission d’animer le syndicat dans l’entreprise ou l’association. En effet, plus le syndicat est actif, plus il augmente la possibilité d’obtenir un nombre de suffrages important aux prochaines élections professionnelles et de devenir représentatif afin d’être en capacité de désigner un délégué syndical. Il a les mêmes prérogatives que le délégué syndical, à l’exception du pouvoir de négocier des accords collectifs (C. trav., art. L. 2142-1-1) (voir page 27). En vue d’exercer son mandat, le représentant dispose, dans les structures d’au moins 50 salariés, au minimum de 4 heures de délégation par mois (C. trav., art. L. 2142-1-3). En outre, il bénéficie de la même protection que le délégué syndical face au licenciement et aux discriminations (C. trav., art. L. 2142-1-1) (voir page 27).

II. Le délégué syndical

Le délégué syndical est le représentant auprès de l’employeur d’un syndicat représentatif ayant créé dans la structure une section syndicale. Le salarié désigné délégué syndical dispose d’attributions spécifiques.

A. La désignation du délégué syndical

Pour désigner un délégué syndical, le syndicat doit choisir un salarié qui remplit l’ensemble des conditions légales et effectuer des formalités de publicités.

1. Les conditions de désignation

a) Entreprises et associations concernées

Par principe, les délégués syndicaux peuvent être désignés uniquement dans les structures d’au moins 50 salariés (C. trav., art. L. 2143-3).

A noter : L’effectif d’au moins 50 salariés doit avoir été atteint pendant 12 mois consécutifs (C. trav., art. L. 2143-3 ; Cass. soc., 29 mai 2019, n° 18-19890).

Par exception, les délégués syndicaux peuvent être nommés dans les structures dont le seuil est inférieur à 50 salariés :

• dès lors qu’un accord collectif de travail le prévoit (C. trav., art. L. 2141-10) ;

• par un syndicat représentatif en désignant un membre de la délégation du personnel au CSE comme délégué syndical (C. trav., art. L. 2143-6).

b) Syndicats habilités

Seules les organisations syndicales représentatives dans l’entreprise ou dans l’association qui ont constitué une section syndicale sont habilitées à désigner des délégués syndicaux (C. trav., art. L. 2143-3).

c) Salarié désigné

Conformément à l’article L. 2143-1 du code du travail, le délégué syndical doit avoir 18 ans révolus, travailler dans la structure depuis au minimum 1 an et ne faire l’objet d’aucune interdiction, déchéance ou incapacité relative à ses droits civiques. De plus, il ne doit pas exercer dans la structure des fonctions de représentant de l’employeur.

A noter : La condition d’ancienneté minimale de 1 an est réduite à 4 mois en cas d’ouverture d’établissement ou de création d’entreprise (C. trav. art. L. 2143-1).

De surcroît, le délégué syndical doit avoir été candidat aux dernière élections professionnelles et avoir recueilli à titre personnel et dans son collège électoral au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour, quel que soit le nombre de votants (C. trav., art. L. 2143-3).

A noter : Le législateur est venu préciser la situation lorsqu’au premier tour des élections professionnelles, aucun des candidats présentés par le syndicat ne remplit les critères ou lorsque plus aucun candidat ne répond aux conditions ou lorsque l’ensemble des personnes qui remplissent les conditions renoncent par écrit à la fonction de délégué syndical. Dans ces hypothèses, l’organisation syndicale représentative peut nommer un délégué syndical parmi les autres candidats ou à défaut parmi ses adhérents dans la structure (C. trav., art. L. 2143-3).

A noter : Un candidat qui obtient 10 % des suffrages exprimés et qui est ensuite muté dans un autre établissement de l’entreprise peut devenir délégué syndical dans le nouvel établissement uniquement dans l’hypothèse où le syndicat ne dispose plus de candidats remplissant les conditions précitées (Cass. soc., 3 novembre 2016, n° 15-60203).

2. Les modalités de désignation

Les noms et prénoms des délégués syndicaux désignés doivent être portés à la connaissance de l’employeur (C. trav., art. L. 2143-7). La désignation prend effet à partir du moment où l’employeur reçoit la notification (voir notamment Cass. soc., 21 octobre 1998, n° 97-60041). Ces formalités sont réalisées par lettre recommandée avec accusé de réception ou par lettre remise contre récépissé (C. trav., art. D. 2143-4). Les documents sont ensuite affichés sur les panneaux réservés aux communications syndicales (C. trav., art. L. 2143-7). Dans le même temps, une copie de cette communication doit être adressée à l’inspection du travail (C. trav., art. L. 2143-7).

Les conditions de désignation des délégués syndicaux peuvent être contestées devant le tribunal judiciaire dans un délai de 15 jours à compter de l’accomplissement des formalités de publicité (C. trav., art. L. 2143-8). Une fois ce délai écoulé, la désignation ne peut plus faire l’objet de contestation et est ainsi « purgée de tout vice » (C. trav., art. L. 2143-8). La saisine du tribunal judiciaire se fait par requête. Il statue en dernier ressort et dans un délai de 10 jours (C. trav., art. R. 2143-5).

A noter : Le mandat de délégué syndical prend fin au plus tard « lors du premier tour des élections de l’institution représentative du personnel renouvelant l’institution dont l’élection avait permis de reconnaître la représentativité de l’organisation syndicale l’ayant désigné » (C. trav., art. L. 2143-11). Il peut également être mis un terme au mandat si le délégué quitte la structure ou par décision du syndicat par exemple.

B. Le mandat de délégué syndical

Le délégué syndical a notamment pour mission de représenter le syndicat auprès de l’employeur et de négocier les accords d’entreprise. Pour exercer ces différentes prérogatives, il dispose de moyens spécifiques.

1. Les attributions des délégués syndicaux

Le délégué syndical a pour mission de représenter l’organisation syndicale qui l’a désigné auprès de l’employeur (C. trav., art. L. 2143-3). Il fait ainsi connaître à l’employeur les revendications ainsi que les propositions de son syndicat. Il peut également lui faire remonter les contestations des salariés. En effet, les syndicats professionnels ont pour rôle la défense des droits et des intérêts des salariés dans les entreprises et les associations (C. trav., art. L. 2131-1).

Au surplus, dès lors qu’il existe des délégués syndicaux dans la structure, ils disposent d’un monopole pour la négociation des accords collectifs. Ils doivent être invités à l’ensemble des négociations organisées par l’employeur (C. trav., art. L. 2233-12 et s.).

Si l’ensemble des syndicats n’a pas été convoqué et que les négociations sont en cours, un des syndicats non convoqués peut saisir le juge des référés afin qu’il fasse cesser les négociations (Cass. soc., 13 juillet 1988, n° 86-16302). En outre, dès lors que toutes les organisations syndicales n’ont pas été convoquées aux négociations ou que des négociations séparées sont organisées, la nullité des accords collectifs est encourue (Cass. soc., 8 mars 2017, n° 15-18080).

2. Les moyens accordés au délégué syndical pour l’exercice de ses missions

a) Crédit d’heures

Le législateur accorde à chaque délégué syndical un crédit d’heures pour qu’il puisse exercer l’ensemble de ses fonctions. Le nombre d’heures est fixé de la façon suivante (C. trav., art. L. 2143-13) :

• 12 heures par mois dans les entreprises ou associations de 50 à 150 salariés ;

• 18 heures par mois dans les entreprises ou associations de 151 à 499 salariés ;

• 24 heures par mois dans les entreprises ou associations d’au moins 500 salariés.

A noter : Dans les entreprises ou associations de moins de 50 salariés, le mandat de délégué syndical n’ouvre pas droit à un crédit d’heures spécifique. Ainsi le salarié peut utiliser le temps dont il dispose en tant que membre du comité social et économique pour l’exercice de ses fonctions de délégué syndical (C. trav., art. L. 2143-6).

Les heures de délégation correspondent à du temps de travail effectif et doivent être payées par l’employeur à l’échéance normale (C. trav., art. L. 2143-17). Le nombre d’heures fixé par le législateur peut être dépassé en cas de circonstances exceptionnelles (C. trav., art. L. 2143-13).

A noter : Les délégués syndicaux d’une même section syndicale peuvent se répartir entre eux les heures dont ils disposent à condition d’en informer l’employeur (C. trav., art. L. 2143-14). En outre, le temps passé en négociation des accords collectifs ainsi que les heures utilisées pour participer aux réunions qui ont lieu à l’initiative de l’employeur n’entrent pas dans le crédit d’heures et ne doivent pas être décomptées (C. trav., art. L. 2143-18 et L. 2232-18).

b) Liberté de déplacement et de circulation

Pendant leurs heures de délégation, les délégués syndicaux peuvent librement se déplacer en dehors de la structure pour exercer leurs attributions. De même, ils ont la possibilité de circuler dans la structure et de prendre contact avec les salariés, « sous réserve de ne pas apporter de gêne importante à l’accomplissement du travail des salariés » (C. trav., art. L. 2143-20).

c) Statut protecteur

Les délégués syndicaux sont protégés en cas de licenciement (C. trav., art. L. 2411-1). L’employeur doit, préalablement à tout licenciement, obtenir l’autorisation de l’inspecteur du travail. Cette protection débute à compter du moment où l’employeur a connaissance des fonctions du délégué et se poursuit pendant les 12 mois suivant la date de cessation de ses fonctions s’il les a exercées pendant au moins 1 an (C. trav., art. L. 2411-3).

En outre, de jurisprudence constance, la Cour de cassation rappelle qu’« aucune modification de son contrat de travail ou aucun changement de ses conditions de travail ne peut être imposé à un salarié protégé » (voir notamment Cass. soc., 19 juillet 2019, n° 18-14762). De cette façon, si le délégué syndical refuse une modification de son contrat de travail ou un changement de ses conditions de travail, il convient d’abandonner la procédure et de maintenir le contrat de travail du salarié dans ses conditions initiales ou de procéder à son licenciement. Dans cette dernière hypothèse, l’autorisation de l’inspecteur du travail sera requise.

Par ailleurs, les délégués syndicaux bénéficient d’une protection contre toute discrimination fondée sur leur appartenance syndicale. Ainsi l’employeur ne peut-il se fonder sur l’appartenance à un syndicat lorsqu’il prend des décisions en matière de rémunération, d’avancement ou de rupture du contrat de travail (C. trav., art. L. 2141-5).

A noter : Au cours de la négociation collective, chaque organisation représentative peut, à titre facultatif, compléter sa délégation par des salariés de l’entreprise ou de l’association qui ne disposent pas de mandat (C. trav., art. L. 2232-17). Ces salariés qui participent aux négociations ne bénéficient pas d’une protection particulière. On notera qu’ils pourraient toutefois soulever l’existence d’une discrimination s’ils s’estimaient lésés.

Qu’est-ce qu’un syndicat représentatif ?

Un syndicat sera considéré représentatif au niveau de l’entreprise ou de l’association s’il remplit plusieurs critères cumulatifs (C. trav., art. L. 2121-1).

Le respect des valeurs républicaines

Ce critère s’entend notamment du respect de la liberté politique, religieuse ou philosophique.

La Cour de cassation précise que les mentions figurant dans les statuts du syndicat importent peu et qu’il est important de se fonder sur la pratique du syndicat (Cass. soc., 13 octobre 2010, n° 10-60130). Ainsi une organisation syndicale défendant dans ses statuts l’indépendance du peuple corse et promouvant dans une profession de foi une priorité d’embauche à qualification égale pour les travailleurs locaux ne peut être écartée s’il n’existe aucune preuve qu’elle poursuit une action en opposition avec les valeurs républicaines (Cass. soc., 9 septembre 2016, n° 16-20605). En revanche, un syndicat qui prône des discriminations directes ou indirectes notamment en raison de l’origine des salariés méconnait les valeurs républicaines (voir notamment Cass. soc., 12 décembre 2016, n° 16-25793)

L’indépendance

L’organisation syndicale doit être indépendante moralement et financièrement de l’employeur.

La Cour de cassation a retenu que le syndicat qui est le seul à recevoir une subvention de la direction de l’entreprise n’est pas indépendant (Cass. soc., 31 janvier 1973, n° 72-60076).

La transparence financière

Pour répondre à ce critère, il incombe au syndicat de prouver qu’il respecte les règles comptables. Ces règles sont différentes selon la taille du syndicat.

L’approbation des comptes par un expert-comptable et leur publication à la Direccte constituent un élément de preuve de la transparence financière (Cass. soc., 17 octobre 2018, n° 17-19732). En revanche, lorsque le syndicat ne peut justifier de la publication de ses comptes sur son site Internet ou par tout autre moyen, il ne respecte pas le critère de transparence financière (Cass. soc., 17 octobre 2018, n° 18-60030).

L’ancienneté

Une ancienneté minimale de 2 ans dans les champs professionnel et géographique couvrant le niveau de négociation qui s’apprécie à compter de la date de dépôt légal des statuts.

La Cour de cassation a précisé que lorsqu’un syndicat modifie son objet statutaire ou son caractère catégoriel ou intercatégoriel conformément à ses statuts, cela ne fait pas perdre l’ancienneté acquise antérieurement à la modification (Cass. soc., 14 mars 2018, n° 17-21434).

L’audience électorale

Lorsque la représentativité est appréciée au niveau de l’entreprise ou de l’association, le critère de l’audience électorale est rempli dès lors que l’organisation syndicale a recueilli « au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité social et économique (CSE), quel que soit le nombre de votants » (C. trav., art. L. 2122-1).

La représentativité se calcule donc lors des élections des membres du CSE.

La Cour de cassation précise que si un syndicat ne participe pas aux élections professionnelles, il ne peut pas ensuite se prévaloir des votes obtenus sous le sigle d’une confédération à laquelle il s’est affilié après les élections (Cass. soc., 4 juillet 2018, n° 17-20.710).

Si la représentativité est appréciée au niveau de la branche ou au niveau national et interprofessionnel, le score électoral est de 8 % des suffrages exprimés (pour plus de précisions sur ce point voir C. trav., art. L. 2122-5 et L. 2122-9).

L’influence

Le critère d’influence, prioritairement caractérisée par l’activité et l’expérience, prend en compte l’ensemble des actions menées par le syndicat et permet de vérifier qu’il a un certain dynamisme.

Les effectifs d’adhérents et les cotisations

Le code du travail ne fixe pas le nombre d’adhérents nécessaire. Ainsi l’importance des adhérents est appréciée par rapport à l’effectif de la structure. Il peut être effectué une comparaison avec les autres syndicats. De la même façon, il n’est pas fixé de seuil pour les cotisations. Toutefois, il est nécessaire que les cotisations soient suffisantes pour permettre au syndicat d’exercer des actions indépendantes.

Pour apprécier les critères de représentativité, la Cour de cassation effectue une distinction entre ceux qui doivent être satisfaits de manière autonome et permanente (par exemple, le respect des valeurs républicaines, l’indépendance et la transparence financière) et ceux qui doivent faire l’objet d’une appréciation souple et globale pour toute la durée du cycle électoral (par exemple, l’influence, l’effectif, les cotisations) dès lors que l’ancienneté est au minimum égale à 2 ans et que l’audience est au moins égale à 10 % des suffrages exprimés (voir notamment Cass. soc., 29 février 2012, n° 11-13748 ; Cass. soc., 14 novembre 2013, n° 12-29984).

Nombre de délégués syndicaux

Le nombre de délégués syndicaux est fixé par l’article R. 2143-2 du code du travail :

• de 50 à 999 salariés : 1 délégué ;

• de 1 000 à 1 999 salariés : 2 délégués ;

• de 2 000 à 3 999 salariés : 3 délégués ;

• de 4 000 à 9 999 salariés : 4 délégués ;

• à partir de 10 000 salariés : 5 délégués.

Dans les structures d’au moins 500 salariés, les syndicats représentatifs qui ont obtenu un ou plusieurs élus dans le collège des ouvriers et employés et qui disposent d’au moins un élu dans l’un des deux autres collèges peuvent désigner un délégué syndical supplémentaire. Il est alors désigné parmi les candidats aux dernières élections professionnelles qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour (C. trav., art. L. 2143-4).

Conditions de validation d’un accord collectif dans les structures pourvues d’au moins un délégué syndical

Les règles de validation exposées ci-après sont d’ordre public absolu et ne peuvent être remises en cause par accord entre les parties (voir tableau récapitulatif ci-contre).

Négociation avec une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés

Par principe, la validité de l’accord sera subordonnée à la signature par l’employeur ou son représentant, d’une part, et par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives de salariés qui auront recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires au CSE, d’autre part, quel que soit le nombre de votant.

Il est donc nécessaire pour l’employeur qui envisage une négociation collective et la signature d’un accord de vérifier le poids électoral de chaque délégué syndical signataire. A ce titre, il conviendra de s’attacher aux procès-verbaux du premier tour des titulaires aux dernières élections professionnelles.

Pour obtenir un accord valable, la signature devra être effectuée par un ou plusieurs délégués syndicaux qui auront obtenu au total plus de 50 % des suffrages exprimés et ce quel que soit le nombre de votants (il n’est pas nécessaire de s’attacher au quorum).

Négociation avec une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés

Afin de ne pas bloquer totalement les négociations, l’article L. 2232-12 du code du travail prévoit ce que l’on peut nommer une « voie de rattrapage ». Si l’employeur parvient à faire signer l’accord à une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant obtenu plus de 30 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations syndicales représentatives aux dernières élections dans les conditions précédemment explicitées, des formalités supplémentaires sont obligatoires.

Si l’accord d’entreprise est signé par des syndicats ayant obtenu moins de 30 % des suffrages exprimés, il ne pourra pas être validé et trouver application. Dans cette hypothèse, une ou plusieurs de ces organisations, sous la réserve d’avoir recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés, disposent d’un délai de 1 mois à compter de la signature de l’accord pour indiquer qu’elles souhaitent obtenir une consultation des salariés pour valider l’accord. Elles notifient alors par écrit leur demande à l’employeur et aux autres syndicats représentatifs (C. trav., art. D. 2232-6).

Très récemment, la Cour de cassation a précisé que la régularité de la demande formulée par un ou plusieurs syndicats pour organiser une consultation des salariés afin de valider un accord d’entreprise n’est pas subordonnée à sa notification aux autres organisations syndicales représentatives. En conséquence, la demande de consultation n’est pas irrégulière au seul motif qu’elle n’a pas été notifiée aux autres organisations (Cass. soc., 9 octobre 2019, n° 19-10816).

Au terme d’un délai de 1 mois à compter de la signature de l’accord, l’employeur peut solliciter lui-même l’organisation de cette consultation dès lors qu’il n’y a aucune opposition de l’ensemble des organisations précitées.

Lors de la demande par une ou plusieurs organisations syndicales ou par l’employeur de la consultation, les autres organisations syndicales représentatives ont la faculté pendant un délai de 8 jours de signer le projet d’accord afin de permettre d’atteindre le taux de 50 %. Si tel est le cas, l’accord sera validé. A défaut, la consultation des salariés devra être organisée dans un délai de 2 mois à compter de la demande de consultation.

Certains accords ne peuvent être pris par accord minoritaire. Il s’agit des accords conclus dans les conditions de l’article L. 2232-12, alinéa 1er, du code du travail, comme la mise en place des représentants de proximité ou les modalités de mise en place de la commission « santé, sécurité et conditions de travail ».

Frais engagés par les délégués syndicaux pendant la négociation collective

Temps de négociation et de trajet

Le temps passé à la négociation des accords d’entreprise est rémunéré comme du temps de travail à échéance normale (C. trav., art. L. 2232-18).

En outre, de jurisprudence constante, la Cour de cassation retient que « le temps de trajet, pris en dehors de l’horaire normal de travail et effectué en exécution des fonctions représentatives, doit être rémunéré comme du temps de travail effectif pour la part excédant le temps normal de déplacement entre le domicile et le lieu de travail » (voir notamment Cass. soc., 12 juin 2013, n° 12-12806).

Frais de trajet et d’hébergement

Les frais engagés par les délégués pour le trajet et éventuellement l’hébergement pour se rendre aux réunions organisées à l’initiative de l’employeur sont à la charge de ce dernier et ne peuvent être imputés sur le budget de fonctionnement de la structure représentative (voir notamment Cass. soc., 28 mai 1996, n° 94-18797).

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