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Les pouvoirs du juge judiciaire sont insuffisants pour faire cesser des conditions de détention indignes

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Dans un arrêt rendu le 8 juillet 2020, la Cour de cassation avait jugé qu’une personne en détention provisoire dans des conditions indignes doit être libérée. A cette occasion, la Haute Juridiction avait également transmis une question prioritaire de constitutionnalité à laquelle le Conseil constitutionnel vient de répondre, dans une décision rendue le 2 octobre 2020.

Dans cette dernière, et en faisant référence à la jurisprudence de janvier 2020 de la Cour européenne des droits de l’Homme sans toutefois la nommer explicitement, les Sages de la rue Montpensier estiment que l’absence de recours devant le juge judiciaire pour obtenir la fin de conditions de détention indignes est contraire à la Constitution.

Le Conseil constitutionnel déduit, en effet, trois obligations de l’article 9 de la Déclaration des droits de l’Homme de 1789 et du Préambule de la Constitution de 1946 :

• d’abord qu’il « appartient aux autorités judiciaires ainsi qu’aux autorités administratives de veiller à ce que la privation de liberté des personnes placées en détention provisoire soit, en toutes circonstances, mise en œuvre dans le respect de la dignité de la personne » ;

• ensuite qu’il appartient « aux autorités et juridictions compétentes de prévenir et de réprimer les agissements portant atteinte à la dignité de la personne placée en détention provisoire et d’ordonner la réparation des préjudices subis » ;

• enfin qu’il « incombe au législateur de garantir aux personnes placées en détention provisoire la possibilité de saisir le juge de conditions de détention contraires à la dignité de la personne humaine, afin qu’il y soit mis fin ».

Le code de justice administrative (CJA) prévoit la possibilité de saisir le juge des référés si une personne placée en détention provisoire est exposée à des conditions de détention contraires à la dignité de la personne humaine (CJA, art. L. 521-2 et L. 521-3). Mais pour le Conseil constitutionnel, « les mesures que ce juge est susceptible de prononcer dans ce cadre, qui peuvent dépendre de la possibilité pour l’administration de les mettre en œuvre utilement et à très bref délai, ne garantissent pas, en toutes circonstances, qu’il soit mis fin à la détention indigne » (§ 15).

L’article 148 du code de procédure pénale prévoit aussi la possibilité de saisir le juge. Mais comme le relève le Conseil constitutionnel, il ne couvre que les cas où le placement en détention provisoire est abusif, soit dans la durée, soit parce qu’il ne remplit plus les critères imposés par l’article 144 dudit code. Pour rappel, la détention provisoire est censée être une mesure d’exception.

Deuxième possibilité : l’article 147-1 du code de procédure pénale, qui autorise le juge à ordonner la mise en liberté d’une personne placée en détention provisoire, mais dans la seule situation où une expertise médicale établit que cette personne est atteinte d’une pathologie engageant le pronostic vital ou que son état de santé physique ou mentale est incompatible avec le maintien en détention (§ 16).

Pour le Conseil constitutionnel, « aucun recours devant le juge judiciaire ne permet au justiciable d’obtenir qu’il soit mis fin aux atteintes à sa dignité résultant des conditions de sa détention provisoire ». L’alinéa 2 de l’article 144-1 du code est donc déclaré contraire à la Constitution. Il incombe désormais au législateur de prendre les mesures nécessaires pour garantir l’effectivité de ces droits.

Conseil constitutionnel, décision n° 2020-858/859 QPC du 2 octobre 2020.

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