« Dans mes cours, des étudiants semblent séduits par la possibilité d’exercer en libéral. Cela m’interroge car, historiquement, l’éducation spécialisée s’inscrit dans le collectif, elle est l’antithèse de la profession libérale. J’associe cette tendance au discours ambiant sur l’entreprenariat. Les étudiants baignent dans l’idée que le statut d’auto-entrepreneur est plus dynamique, plus moderne. A côté, le travailleur social passe pour un “vieux jojo”. Pourtant, il a une fonction sociale évidente de soutien et de protection des personnes. Heureusement, il y a des secteurs assez protégés des attaques marchandes comme la protection de l’enfance. Certaines informations sensibles ne peuvent pas être transmises à des financeurs qui veulent évaluer les bienfaits des actions qu’ils subventionnent. En revanche, dans le secteur des personnes âgées, du handicap ou de l’insertion professionnelle, on n’est plus dans la relation à la personne mais dans la relation de service. A Pôle emploi, il y a des coach en insertion, pas des travailleurs sociaux. »
(1) Docteur en sociologie, formateur en éducation spécialisée à l’IUT de Lille et coauteur de « Le travail social en quête de légitimité.