Alors que le procès des présumés complices des auteurs de l’attentat contre Charlie Hebdo bat son plein, un nouvel acte terroriste a été perpétré au même endroit, le 25 septembre dernier. Cinq ans après les frères Kouachi, c’est le consternant Zaheer Hassan Mehmood, armé d’un hachoir, qui s’est senti obligé d’attaquer deux innocents, les blessant gravement. Ne supportant pas la nouvelle publication des caricatures de Mahomet, il a avoué aux enquêteurs qu’il pensait viser des journalistes du magazine satirique. Le point commun entre ces trois assaillants ? Ils ont tous été pris en charge, de manière plus ou moins longue, par les services de l’aide sociale à l’enfance. Ce fait connu, certaines voix se sont élevées pour pointer les lacunes des services de la protection de l’enfance quant à la radicalisation des jeunes dont elle a la charge. Un bien mauvais procès.
C’est d’abord mal connaître la fonction de ces professionnels, dont le rôle premier consiste à donner des repères – et des valeurs – à des mineurs qui en manquent cruellement. C’est ignorer ensuite que les éducateurs sont de mieux en mieux formés à détecter tout signe de radicalisation. En cas de doute, les procédures auxquelles ils sont soumis les contraignent même à alerter la préfecture et à isoler ces jeunes de leurs camarades.
Mais si l’écrasante majorité de ces enfants ne tombent pas dans le terrorisme, le destin de ceux qui cèdent à la violence interroge forcément. Le basculement brutal dans l’indépendance lors de son passage à la majorité pour un jeune ayant bénéficié du statut de mineur non accompagné peut constituer un choc violent. Etre appelé « mon frère » par un prédicateur charismatique qui semble donner un sens à votre vie peut constituer un choix séduisant.
S’il ne s’agit évidemment pas d’excuser les auteurs de ces actes barbares, il convient aussi de ne pas les déshumaniser. Nier leur parcours chaotique et leurs blessures revient à les cantonner à la figure du monstre. Un procédé indigne d’une société mature, et inefficace d’un point de vue politique…