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La RSE, un enjeu pour les établissements sociaux et médico-sociaux

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Face aux enjeux climatiques et environnementaux, les démarches de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) apparaissent comme une opportunité pour les structures sociales et médico-sociales. Cependant, ces stratégies sont complexes à mettre en place. Ce qui empêche leur généralisation.

CONCEPT NE DANS LES ANNEES 1960, LA RESPONSABILITE SOCIETALE DES ENTREPRISES (RSE) tarde à se généraliser. Pourtant, les enjeux sont énormes. Ainsi, la France se fixe des objectifs ambitieux en la matière. Par exemple, lors de la conférence pour le climat en 2015, la volonté des dirigeants était de réduire de 30 % la consommation d’énergie d’ici à 2020 et de 50 % d’ici à 2050. Des engagements ont aussi été pris concernant la réduction des déchets, la construction de bâtiments plus éco-responsables ou encore la lutte contre le gaspillage alimentaire. Plus globalement, les Nations unies ont dressé 17 objectifs « pour transformer le monde » – les ODD, pour objectifs de développement durable – en matière d’éducation, de santé, de protection sociale, de changement climatique ou encore de protection de l’environnement. Des injonctions que les établissements sociaux et médico-sociaux (ESMS) doivent aussi appréhender. « Où que l’on soit, partout sur la planète, quel que soit le secteur d’activité, à partir du moment où l’on choisit de mettre en place une démarche RSE, ce sont les mêmes exigences qui vont s’appliquer », assure ainsi Sandra Bertezene, professeure titulaire de la Chaire de gestion des services de santé au Cnam (Conservatoire national des arts et métiers) et co-auteure de l’étude « Changement et engagement dans une stratégie RSE : le cas des établissements sociaux et médico-sociaux français ».

Obtenir l’adhésion des différents acteurs

« La démarche RSE est la même que l’on travaille dans le secteur de la petite enfance, du handicap ou des personnes âgées, ajoute Laurence Mazé, directrice adjointe du pôle « Offre sociale et médico-sociale » chez Nexem. Les principes à respecter sont les mêmes. » « Mais, en fonction des secteurs, il y a des spécificités différentes, nuance-t-elle toutefois. Sur le terrain, on ne luttera pas forcément contre le gaspillage alimentaire, contre l’usage du plastique, contre l’émission de CO2 que l’on soit à la tête d’un Ehpad [établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes], d’un IME [institut médico-éducatif] ou d’une crèche. » Dans les faits, la RSE en établissement passe par la réduction des factures énergétiques, la suppression des risques chimiques, l’amélioration de la qualité de vie au travail, la mise en place d’une politique d’achats responsables… Comme pour n’importe quelle entreprise en somme.

Pour y parvenir, l’engagement du dirigeant est une condition sine qua non. L’autre facteur de réussite consiste à intégrer toutes les parties prenantes à la stratégie. Qu’elles soient internes (le dirigeant, le personnel, les partenaires sociaux, les résidents et éventuellement les familles) ou externes (la tutelle, les pouvoirs publics, les organismes de formation…). « Il y a de multiples manières d’y arriver, mais la meilleure est de se demander ce que l’on peut faire ensemble pour tendre vers l’objectif, appuie Sandra Bertezene. S’il s’agit uniquement de cocher des cases, cela n’a pas beaucoup d’importance. S’il s’agit de changer les manières de travailler ensemble, cela devient beaucoup plus intéressant. » Et de poursuivre : « Une démarche RSE ne consiste pas seulement à acheter des produits bio. Au fond, ça n’a d’ailleurs que peu d’intérêt. Dans une stratégie d’établissement, il faut viser beaucoup plus large. Que l’établissement achète des produits labellisés, certifiés bio c’est une chose. Mais cela n’aura pas de réelles conséquences. Alors que s’il travaille les menus des résidents avec les équipes, les prestataires, les fournisseurs locaux, les soignants et les diététiciens, cela aura un impact. »

Un investissement et des économies

D’autant que mettre en place une démarche RSE permet de faire des économies. C’est un investissement. « Si vous savez que vous pouvez réduire de 20 % votre énergie, de 30 % vos déchets et de 40 % vos troubles musculo-squelettiques et vos arrêts maladie, c’est rentable », certifie ainsi Olivier Toma, fondateur de Primum Non Nocere et du Comité pour le développement durable en santé (C2DS). Et celui-ci de donner des exemples concrets : un Ehpad a réussi à diviser par sept sa facture de lessive en se lançant dans la fabrication de lessive maison avec les résidents. Un autre a fait 40 000 € d’économies par an en diminuant de 50 % le gaspillage alimentaire en travaillant sur la qualité des denrées achetées. Une autre structure a vu sa consommation d’énergie baisser de 34 % en l’espace de trois ans. Une dernière a réussi à diminuer de sept tonnes ses émissions de CO2 grâce à la pose de panneaux solaires photovoltaïques. Si cette démarche est si bénéfique pour les établissements sociaux et médico-sociaux, comment expliquer qu’elle ne soit pas encore généralisée ?

Les freins sont de différents ordres. Il y a d’abord un défaut d’information. Les bienfaits d’une telle stratégie ne sont que peu mis en avant. De plus, alors que les établissements sont déjà soumis à bon nombre de contraintes (organisationnelles, réglementaires…), ils doivent faire face à un manque de temps. « S’engager dans une stratégie RSE suppose un effort collectif, de monter un comité de pilotage, des groupes de projets, des groupes de travail… Il faut consacrer du temps à cette action. Soit du temps en moins pour l’accompagnement des usagers. Cela peut constituer un frein pour bon nombre d’établissements », estime Sandra Bertezene. Hugues Carlier, directeur associé de la société « Des enjeux et des hommes » spécialisée dans la construction et la mise en œuvre de la démarche de RSE, avance une autre raison : la résistance aux changements. « Il existe un paradoxe sur la RSE : tout le monde est favorable à une telle démarche mais le jour où il faut la mettre en place (ce qui veut dire modifier sa manière de travailler) il y a moins de motivés, déplore-t-il. Cela veut dire qu’il y a tout un travail d’accompagnement au changement à faire. Il faut expliquer les raisons de cette stratégie, les bienfaits que cela va apporter… Cela nécessite beaucoup d’énergie, une ténacité très forte pendant un à deux ans avant que cela soit totalement intégré et qu’il y ait les premiers retours sur investissements. »

Il existe pourtant quelques motifs d’espérer. Tout d’abord la Commission européenne qui impose des normes environnementale, sociale et de gouvernance à la France. De même, l’Etat a des exigences vis-à-vis des agences régionales de santé ou des conseils départementaux. Désormais, les établissements ont un certain nombre d’objectifs à remplir en matière d’économie, d’amélioration des pratiques. Ils ont de plus en plus de contraintes environnementales à respecter. « Les exigences RSE, de critères à respecter pour remporter les appels à projets se multiplient, confirme Laurence Mazé. Cela montre bien que les choses avancent dans le bon sens ».

Du côté du domicile

Si la RSE dans les établissements sociaux et médico-sociaux tarde à se développer, elle part d’encore plus loin dans le secteur des services à la personne. Pourtant, elle existe. Mieux, « la démarche est la même. Il suffit de la contextualiser », assure Sandra Bertezene. Toutefois, il est important de noter que cette stratégie ne concerne pas le domicile du résident, l’accompagnement de l’usager mais seulement l’organisation interne du service. « La structure ne s’occupe que de sa démarche RSE en tant que telle mais ne se préoccupe pas de savoir si son usager entreprend une démarche RSE, une démarche de développement durable chez lui », confirme-t-elle. Si Olivier Toma estime, lui aussi, qu’il est possible de faire de la RSE dans les services à la personne, il ajoute une nuance : « Bien évidemment, la dynamique n’est pas la même à domicile que dans un Ehpad de 5 000 m2. »

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