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APF France handicap : une stratégie progressive et participative

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Après avoir mené de front deux expérimentations, l’une locale, l’autre sectorielle, l’association entend inscrire l’ensemble de ses projets et structures dans le cadre d’une démarche responsable. Avec de premiers succès, même si des marges de progrès subsistent, en particulier en matière de mesure d’impact. D’abord réticents, les professionnels semblent aujourd’hui davantage convaincus par la démarche.

LES MURS EN BOIS ET TORCHIS, UNE ÉTUDE D’AUTOCONSOMMATION D’ÉNERGIE FINANCÉE GRÂCE À UN PARTENARIAT AVEC ENEDIS, des bornes de recharge des véhicules électriques à destination du personnel… Le foyer de vie APF France handicap Les Salines, à Dunkerque, comme désormais l’ensemble des bâtiments rénovés par l’association dans la région Hauts-de-France, le sera de façon à réduire son impact sur l’environnement. Et, sans attendre le bâtiment flambant neuf, s’est mise en place une politique de pesée des déchets pour lutter contre les gaspillages alimentaires. Les documents de travail soumis aux financeurs, que nous avons pu consulter, témoignent d’une approche systémique des enjeux de responsabilité sociale et environnementale. A Calais, dans l’établissement et service d’aide par le travail (Esat) des Terres d’Opale, se retrouve le même souhait de déployer une politique de responsabilité sociale des entreprises (RSE) globale, avec l’ouverture d’une ferme d’élevage d’insectes. Ils serviront d’abord à fabriquer des engrais biologiques pour l’agriculture, puis des farines alimentaires, animales d’abord, à destination des hommes lorsque les autorisations européennes seront données. Le projet revendique de développer les circuits courts, d’assurer une « logistique de livraison verte », et annonce un « emballage durable ». Le souci d’évaluer les impacts sociaux, économiques, sociétaux et environnementaux des actions de l’établissement est clairement indiqué.

Les Hauts-de-France sont pionniers en matière de déploiement des actions RSE au sein d’APF France handicap. Avec près de 2 000 salariés et une soixantaine d’établissements, c’est aussi la région qui pèse le plus en termes d’effectifs au sein de cette association nationale. Dès 2013, cette direction locale a répondu à l’appel du conseil régional, qui voulait réfléchir à ce que pourrait être la troisième révolution industrielle sur son territoire. Non sans réticences au sein des équipes de l’association au départ, se souvient Hervé Lherbier, directeur régional : « Le E d’entreprise faisait peur. Nous devions parler de RSO : responsabilité sociale des organisations. »

Pour convaincre, il a choisi une démarche fédératrice et participative, de ne rien imposer d’en haut. Fin 2016, un comité de pilotage était mis en place. Il regroupait une vingtaine de personnes, des directeurs de pôle ou des adjoints de direction volontaires. Des personnalités extérieures y ont été reçues, venant notamment du conseil régional. Après une phase de diagnostic, cinq axes de développement de la politique RSE ont été coconstruits : l’innovation sociale, la qualité de vie au travail, la diminution de l’empreinte environnementale, le développement d’une alimentation responsable, et le déploiement de l’utilité sociale des structures gérées par l’association. Il aura fallu moins d’un an pour parvenir à ce résultat théorique. Mais en pratique, il a fallu aussi laisser un temps d’appropriation aux établissements et services locaux avant qu’ils n’inscrivent leurs projets et actions dans ce cadre. Un accompagnement de la direction régionale, projet par projet, pour la réduction des gaspillages alimentaires dans un institut d’éducation motrice, par exemple, s’est avéré nécessaire.

Au-delà des actions de façade

Simultanément, aux côtés de la direction régionale des Hauts-de-France, une autre entité d’APF France handicap s’est montrée précurseur : celle qui gère les entreprises adaptées et les Esat de l’association. Cela a commencé, pour APF Entreprises, par une opération de communication et de sensibilisation des entreprises clientes au fait que le recours au travail adapté pouvait s’inscrire dans leur politique de RSE. Ce seront les « Nuits de la RSE », des soirées annuelles de débats et de remises de prix. Mais, très vite, il a fallu proposer des déclinaisons concrètes : « La plupart des donneurs d’ordre demandent un engagement social, sociétal et écologique, souligne Alexis Hubert, responsable du pôle qualité, performance et développement durable de l’association. Donc il n’est pas question de se contenter d’actions de façade. D’autre part, à force de parler de RSE, cela a imprégné toutes les structures d’APF Entreprises, qui se sont approprié le sujet. Depuis deux à trois ans, cela structure l’organisation de chaque entreprise adaptée mais aussi celle des services support. »

Une démarche inscrite dans le projet associatif

Ces deux terrains internes d’expérimentation ont été perçus comme concluants. Au point que la politique RSE s’est vue inscrite dans le dernier projet associatif, adopté en 2018 lors du dernier congrès de l’association. « Il y a quelques années, certains pensaient que nous faisions de la RSE sans le savoir. Mais en réalité, non. Il ne suffit pas d’avoir un objet social comme le nôtre. Nous n’avons pas le droit de le faire sans nous soucier des impacts sur les autres volets de la RSE », estime Alexis Hubert. Il revendique qu’au sein d’APF France handicap, la stratégie de déploiement de la RSE soit étendue à tout le territoire mais de façon participative, progressive. Et aussi incarnée, puisqu’une cheffe de projet RSE vient d’être recrutée pour « outiller » les directeurs des structures. Vaste mission, dans une association qui compte 15 000 salariés et regroupe 428 établissements et services médico-sociaux. En outre, un référentiel national a été produit par les groupes de travail mis en place pour garantir l’implication de tous. Il regroupe des bonnes pratiques, et donne des orientations.

Concrètement, par exemple, l’association gère 1 million de mètres carrés de bâti. Elle choisit, en cas de rénovation, de dépasser les normes réglementaires, pour viser un impact carbone réduit à zéro. Elle développe ses achats responsables, et a en particulier basculé 100 % de sa consommation énergétique en énergie verte. Elle développe une politique d’achats responsables. Ainsi, chaque année, elle investit 15 millions d’euros dans la restauration collective, dont à terme 25 % de produits locaux. Quant au volet social, un vaste plan de formation et de prévention des risques au travail a été élaboré. Alexis Hubert concède une marge de progrès importante, en matière de mesure d’impact : « Je ne sais pas actuellement chiffrer l’ensemble de notre dépense énergétique. Or j’aimerais pouvoir dire à la direction générale et au conseil d’administration : aujourd’hui on dépense tant, et en 2025 on peut le réduire de tel pourcentage. »

En attendant, des effets directs semblent se manifester, en termes d’image et d’attractivité. Ainsi des municipalités sollicitent-elles la direction régionale Hauts-de-France pour que l’association soit aide à la maîtrise d’ouvrage de la rénovation de quartiers. Et Hervé Lherbier se félicite que, par ailleurs, de telles actions apportent à l’association d’autres sources de financement, que les habituels soutiens du secteur médico-social.

« Notre projet associatif prévoit qu’en 2023, à son terme, une stratégie RSE claire et lisible imprègne l’ensemble du mouvement, pas uniquement les établissements médico-sociaux », souligne Alexis Hubert. A mi-parcours, le challenge semble bien sur les rails : « Aujourd’hui, cela ne fait plus débat, se réjouit-il, et la crise du Covid n’a fait que renforcer cette évidence. »

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