« EN FRANCE, 140 000 ENFANTS SONT CONFIES A L’AIDE SOCIALE A L’ENFANCE [ASE]. Pour eux comme pour tous, l’amour ne suffit pas, c’est entendu. Mais comme pour tous, il doit être le premier », considère Christian Allard, responsable d’un placement familial du conseil départemental du Val-de-Marne(1). « Par une organisation de nos services pensée à partir de techniques managériales adaptées du privé, copiée du monde de l’entreprise, par une méconnaissance grave des besoins d’un enfant et spécialement des soins nécessaires au traitement du traumatisme initialement vécu, par le mépris de ce que sont le travail social et son indispensable implication émotionnelle dans la relation à l’enfant, la désaffectivation des professionnels est en route. Celle-ci mène inévitablement à la réification des êtres accueillis », déplore-t-il. Christian Allard critique le fait que le personnel éducatif soit submergé de paperasses administratives et de travail de bureau et les injonctions faites aux professionnels telles que : « il ne faut pas s’attacher », « il faut prendre de la distance »…
La loi de 2007 réformant la protection de l’enfance a introduit le mot « affectif » et a ainsi permis de poser la question de la dimension affective en placement familial. La loi de mars 2016, en mettant l’enfant au cœur du dispositif, réactive et confirme cette nécessité de l’ » affectif » en protection de l’enfance. « L’adjectif “affectif” y est nommé cinq fois très exactement dans la loi de 2007 et cinq fois également dans la loi 2016 », précise Christian Allard. Par ailleurs, dans le code de l’action sociale et des familles, ce mot « affectif » figure dans l’article L. 221-1 qui définit le service de l’aide sociale de l’enfance et ses missions.
La première apparition du terme « affectif » figure dans la loi de 2005 réformant le statut des assistantes sociales : « Pour obtenir l’agrément […] d’assistant familial, le candidat doit présenter les garanties nécessaires pour accueillir des mineurs dans des conditions propres à assurer leur développement physique, intellectuel et affectif. » Dans la stratégie nationale de prévention et de protection de l’enfance 2020-2022, le secrétaire d’Etat à la protection de l’enfance a souhaité repenser le rôle de l’assistant familial pour permettre la construction d’un lien d’attachement avec l’enfant protégé, et mieux l’associer au parcours de l’enfant au sein de l’aide sociale à l’enfance.
(1) Auteur de L’affectif et la protection de l’enfance – ESF Editeur, 2019.