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Les dossiers « protection de l’enfance » et « familles » s’empilent

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Plans, stratégies, projets de lois… Sur le terrain, les professionnels de la famille et de la protection de l’enfance s’impatientent de voir le gouvernement passer à la phase opérationnelle des réformes annoncées par Adrien Taquet, secrétaire d’Etat à la protection de l’enfance et à la famille. D’autant que la crise sanitaire a aggravé les inégalités.
Gouvernance de l’ASE

En octobre 2019, Adrien Taquet présentait sa stratégie de prévention et de protection de l’enfance 2020-2022. Objectifs affichés : « garantir les droits des enfants à la santé, à l’éducation, à la sécurité affective, à l’autonomie après 18 ans » et améliorer, grâce au dialogue entre l’Etat et les départements, les pratiques et les prises en charge, car « le modèle de gouvernance est à bout de souffle » et les disparités territoriales apparaissent très importantes. Pour améliorer concrètement le sort des enfants, adapter l’accompagnement aux besoins de chacun et « remettre l’humain au centre », 30 départements ont signé une convention avec l’Etat. Une profonde réforme de l’aide sociale à l’enfance (ASE) et de sa gouvernance semble donc engagée (voir ce numéro page 38).

Justice pénale des mineurs

Le nouveau code de la justice pénale des mineurs, adopté par ordonnance, entrera en vigueur le 31 mars 2021. La précédente garde des Sceaux, Nicole Belloubet, souhaitait laisser un délai d’un an au Parlement, saisi du projet de loi de ratification, « pour en débattre, le modifier, préparer les juridictions et mettre en place les moyens ». Une promesse impossible à tenir pour le nouveau ministre de la Justice, Eric Dupont-Moretti, qui, même s’il souhaite mener cette réforme à bien, n’a pas encore fixé le calendrier des débats. Objectif de la reforme : réduire le délai de rendu du jugement de 18 à 12 mois maximum. Des délais impossibles à tenir dans les conditions actuelles d’après les syndicats, et qui pourraient donc conduire à des ruptures de suivi. Aujourd’hui, 45 % des affaires sont jugées après que le mineur a atteint ses 18 ans et, sur les 845 mineurs détenus en prison, près de 84 % sont en détention provisoire. Plusieurs associations de la protection de l’enfance et organisations plaident pour l’abandon pur et simple de ce nouveau code, qui ne remédiera pas aux « manques criants de la justice des mineurs ». Elles appellent, en outre, à un débat parlementaire avec tous les acteurs qui « remettrait l’enfant au centre » des discussions.

Violences faites aux enfants

Le 20 novembre dernier, Adrien Taquet présentait un plan triennal de mobilisation et de lutte contre les violences faites aux enfants, qui déclinait 22 mesures. Hormis le fait que les décrets et la mise en œuvre opérationnelle se font attendre, ils devraient néanmoins succéder aux états généraux de la lutte contre les violences faites aux enfants, annoncés pour cet automne. Une commission indépendante sur les violences sexuelles centrée pour l’essentiel sur le cercle familial – lequel concentre 80 % des agressions – sera lancée également lors de cet événement, et portera plus précisément sur l’inceste. Pour Arnaud Gallais, président de l’association Enfant présent, « il est essentiel que cette commission réunisse non seulement les acteurs associatifs, mais aussi des personnels de l’ASE, pour savoir comment appréhender également la question encore taboue des violences sexuelles entre enfants, notamment au sein des structures de placement ».

Mineurs non accompagnés (MNA)

Au début du confinement, le secrétaire d’Etat à la protection de l’enfance déclarait que, « mineur ou majeur, chaque jeune qui le demande sera mis à l’abri » et que « les services de l’Etat et des départements étaient mobilisés pour s’en assurer ». Pourtant, fin mai, des associations comme Médecins sans frontières et Médecins du monde notaient « l’abandon par les conseils départementaux des adolescents en procédure pour faire reconnaître leur minorité et leur isolement. L’hébergement, l’accès aux soins et à la nourriture de ces mineurs ont plus que jamais reposé sur l’engagement des associations et collectifs citoyens, sans qu’aucune protection adaptée ne leur soit proposée par les pouvoirs publics. » Trois mois plus tard, la situation des MNA reste inchangée.

Contrat jeunes majeurs

Un quart des jeunes de moins de 25 ans qui vivent aujourd’hui dans la rue sont passés par l’ASE. Les contrats jeunes majeurs, qui pouvaient pallier cette transition délicate jusqu’à l’âge de 21 ans, ont été drastiquement réduits en nombre et en durée par les départements ces dernières années. Depuis septembre 2018, la question de la fin des « sorties sèches » est un engagement du président de la République dans la stratégie de lutte contre la pauvreté. Pourtant, malgré le déblocage en urgence de 50 millions d’euros pour leur venir en aide en juillet dernier, peu de choses ont changé et les associations continuent à en appeler à un système national obligatoire et pérenne pour les soutenir de 18 à 25 ans. « Il faut leur accorder le temps nécessaire pour qu’ils se réalisent, sans pression du risque de l’échec ou de l’urgence à trouver une solution. Et respecter leur propre projet, les aider à le concevoir sans pour autant se substituer à eux pour décider de ce qu’ils doivent faire ou ne pas faire. Il faut avoir de l’ambition pour eux et croire en eux », soutient Fabienne Quiriau, directrice générale de la Cnape, la fédération des associations de protection de l’enfant.

Soutien à la parentalité

Le rapport de la commission des 1 000 premiers jours de l’enfant, présidée par le pédopsychiatre Boris Cyrulnik, devrait être remis officiellement à Emmanuel Macron dans les prochains jours. L’idée Construire une nouvelle politique publique de prévention et de soutien à la parentalité favorable au développement de l’enfant. Parmi les premières mesures annoncées : l’allongement du congé de paternité, le développement du soutien à la parentalité et la refonte des centres de PMI (protection maternelle et infantile), délaissés ces dernières années(1), qui deviendront les piliers de la mise en œuvre du « parcours des 1 000 jours ».

Lutte contre les inégalités

La stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté « porte l’ambition d’améliorer la qualité affective, éducative et sociale des modes d’accueil de la petite enfance », au travers d’un plan de formation continue à destination des 600 000 professionnels du secteur. Sylviane Giampino, vice-présidente du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA), a remis en avril 2019 un rapport contenant les propositions et recommandations permettant de mettre en place dès 2020 des formations continues communes à l’ensemble des professionnels de la petite enfance. Pour l’heure, elles n’ont pas été suivies d’effet. Autre point important, l’aggravation de la pauvreté des enfants. « La crise sanitaire a accentué et rendu davantage “visible” la pauvreté des enfants. Il y a urgence à venir en aide aux familles qui ne parviennent pas à se nourrir, souligne Arnaud Gallais. Et pourtant, la délégation interministérielle de lutte contre la pauvreté a été totalement silencieuse depuis la nomination de Marine Jeantet en mars dernier. »

Statut des professionnels

Les assistants familiaux ou « familles d’accueil », dont beaucoup vont partir à la retraite prochainement et qui peinent à être remplacés, ont été reçus le 3 septembre par Adrien Taquet pour discuter de l’évolution de leur statut. Une question qui ne se limite pas à leur cas. « La crise de recrutement touche l’ensemble des professionnels de la protection de l’enfance, mal rémunérés et aux conditions de travail peu satisfaisantes, souligne Fabienne Quiriau. Elle se double d’une crise de reconnaissance de leurs métiers. Ils n’ont pas eu la ’prime Covid“, alors qu’ils ont poursuivi leurs activités dans des conditions très difficiles. Ce sont eux qui ont, malgré tout, permis au système de protection de l’enfance de tenir tant bien que mal. Ils attendent tous une revalorisation de leur statut. »

Notes

(1) Voir ASH n° 3115 du 14-06-19, p. 15.

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