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Ecarté, le secteur du domicile gronde

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Le Ségur de la santé, lancé à la suite de la crise sanitaire, a rendu ses conclusions le 21 juillet. Si les Ehpad ont été quelque peu considérés, principalement par une revalorisation salariale de 183 ¤, les problématiques du domicile n’ont pas été traitées. Ce qui inquiète les acteurs du secteur.

Après l’accord sur les revalorisations salariales des soignants, acté le 15 juillet avec les syndicats, le Ségur de la santé s’est achevé le 21 juillet avec la remise des conclusions et la présentation, par le ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran, de quelques-unes des 33 propositions « fortes » retenues pour « remettre de l’humain, des moyens et du sens » dans le fonctionnement et l’organisation du système de santé.

Des accords loin de satisfaire les acteurs du médico-social. Et plus précisément ceux du domicile. Pourtant, le 19 mai, à quelques jours du lancement de ce grand raout, le ministre avait assuré qu’« il est juste de reconnaître le travail et les missions exercées par les aides à domicile durant la crise ». Affirmant ensuite qu’elles « seront au cœur de nos réflexions ». Mais cela n’a pas été le cas, comme le déplore Dafna Mouchenik, présidente de Synerpa Domicile (Syndicat national des établissements et résidences privés pour personnes âgées). « Pendant le confinement, nous avions le sentiment que la Nation prenait enfin conscience de l’importance de notre travail. Et que, certes, nous travaillons dans des conditions extrêmement compliquées mais que c’était “un mal pour un bien” parce que, à l’issue de cette crise sanitaire épouvantable, les choses changeraient. Or je me rends compte que ça ne change pas du tout », regrette celle qui est aussi directrice d’un service d’aide à domicile. Et d’ajouter : « Dans le Ségur de la santé, rien n’a été dit sur le médico-social. Cela a été très hospitalo-centré, très sanitaire. Mais sur la partie “prendre soin”, accompagnement, il n’y a pas eu de proposition. »

« Déçus et en colère »

La meilleure illustration de ce propos est à chercher dans la remise des conclusions de ce Ségur, le 21 juillet, au ministère de la Santé : le domicile n’y a jamais été évoqué. Pourtant, au sein des parties prenantes, figuraient la Fehap (Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne privés non lucratifs), le Synerpa, l’ADMR (services à la personne) ou encore UNA (Union nationale de l’aide, des soins et des services aux domiciles). Pas suffisant pour peser dans les conclusions. « Nous étions méfiants avant même l’issue de ce Ségur, assure Marie-Reine Tillon, présidente d’UNA. Nous avions fait des contributions et pensions que la crise sanitaire avait montré à quel point l’enjeu du domicile était fort par rapport à l’ensemble des problématiques sanitaires. Nous nous sommes trompés. Nous sommes déçus et en colère. »

Pour sa part, Thierry d’Aboville, secrétaire général de l’ADMR, regrette : « Nous avons été totalement mis à l’écart. Nous avons été écoutés. Nous avons même rencontré Nicole Notat[1]. La question du domicile a été évoquée. Mais il n’en est rien ressorti. Le domicile a été totalement absent des conclusions alors que c’est clairement un des piliers de la politique de santé. Peut-être qu’on ne parle pas assez fort… » Et Dafna Mouchenik de surenchérir : « On pensait que nos tutelles allaient comprendre que le travail du domicile ne se jouait pas uniquement dans le face-à-face, uniquement chez les personnes aidées. Les professionnels ont besoin de temps pour bien faire les choses, pour être dans la concertation, dans la coordination, dans la transmission. Or, rien n’a été annoncé… »

En attente d’un autre sommet social

En réalité, il a été rapidement signifié aux acteurs du domicile que leurs problématiques ne seraient pas traitées au cours de ce Ségur de la santé. Rendez-vous leur a été donné pour un autre sommet social. « Le ministre a dit que les mesures concernant les salariés du domicile seraient prises dans le cadre de la loi “grand âge et autonomie” », soupire Antoine Perrin, directeur général de la Fehap. Et de poursuivre, quelque peu abattu : « J’aurais quand même aimé qu’il y ait une visibilité plus claire en termes de calendrier et de contenus. Nous ne l’avons pas. On sait simplement que cela sera abordé mais on ne connaît pas les conditions de l’atterrissage. »

Car le plus grand flou règne autour de cette future loi. Annoncée depuis des années, sans cesse repoussée en raison de la crise des « gilets jaunes », de la réforme des retraites puis de la crise sanitaire, elle devrait être présentée en conseil des ministres à la fin de l’année ou au début de la prochaine. Mais le calendrier n’est pas définitivement arrêté pour autant. « La seule garantie que l’on a, c’est que le sujet sera pris en compte dans cette loi. Mais nous n’en savons pas plus », renseigne Antoine Perrin qui se montre même plus évasif sur le calendrier. « On nous a seulement assurés que cela serait avant la fin du quinquennat. Nous attendons donc de voir. Nous restons cependant très vigilants. »

Si les acteurs de terrain ne peuvent s’appuyer sur aucune certitude, ils ont toutefois accueilli avec satisfaction l’arrivée de Brigitte Bourguignon au poste de ministre déléguée à l’autonomie. « Signe fort », selon eux, de la volonté du gouvernement de faire cette loi « grand âge et autonomie ». En tout cas, les relations ne sont pas rompues et les échanges perdurent. « Je suis d’un naturel optimiste et je pense qu’il y a une prise de conscience sur la nécessité de faire la loi, confesse Thierry d’Aboville. Nous fondons en tout cas tous nos espoirs dessus. Car cela va au-delà du social et du médico-social, c’est un projet de société. » Marie-Reine Tillon prévient déjà : « Nous ne lâcherons pas. Il est absolument nécessaire de revaloriser les salaires. Le Ségur de la santé aurait pu servir à cela, espérons que cela soit le cas dans la loi “grand âge et autonomie”. S’il n’y a pas un signe fort, d’urgence, du gouvernement, je ne suis pas sûre que les acteurs du domicile seront présents en cas de seconde vague ! Il faut que les pouvoirs publics en soient conscients. »

Notes

(1) Qui a piloté le Ségur de la santé.

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