De Gaulle « n’a pas seulement la volonté de chasser l’occupant allemand du territoire de la patrie et d’effacer la défaite militaire de 1940, mais il veut aussi empêcher les égoïsmes, les injustices, les incompréhensions qui constituent au demeurant la cause profonde et lointaine du désastre ». C’est le témoignage de Raymond Offroy, un ambassadeur ayant rejoint Londres dès 1941, lequel ajoute que le père de la Ve République estimait que « la libération de l’homme, écrasé par les intérêts capitalistes et les dictatures, ne s’effectuera qu’à condition de donner aux plus modestes les mêmes chances qu’à ceux qui sont avantagés par leur hérédité, leur fortune, leur position sociale, leur influence politique ».
Alors que le paysage médiatique bruisse encore de nombreux hommages à l’homme de l’appel du 18 juin 1940, nous sommes bien peu à nous souvenir que c’est sous son égide que le Conseil national de la Résistance (CNR) avait fait preuve d’une audace stupéfiante au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.
Dans une France exsangue et ruinée par cinq ans de conflits – et sous la pression d’un très puissant Parti communiste français –, le CNR allait créer ex nihilo la sécurité sociale, nationaliser de nombreuses entreprises stratégiques et vivifier la démocratie sociale via les créations des comités d’entreprise.
Alors que nous connaissons la plus violente récession européenne depuis 1945, il y a urgence à prendre exemple sur le pragmatisme gaullien de l’époque. Un pragmatisme qui l’avait conduit à sentir que le peuple français avait irrémédiablement condamné l’affairisme et la corruption de la IIIe République, comme le décrivent Robert Vandenbussche, Jean-François Sirinelli et Marc Sadoun dans leur ouvrage intitulé La politique sociale du général de Gaulle.
Dans une France encore meurtrie par les conséquences de la pandémie du Covid-19, divisée socialement et de plus en plus ethniquement, enkystée par des inégalités territoriales jamais constatées jusqu’à présent, Emmanuel Macron se sait très attendu alors qu’il doit présenter le troisième et dernier temps de son quinquennat dans les jours qui viennent.
Un sursaut social empreint d’égalité. Ou une lente désagrégation sociale teintée de violences sporadiques de plus en plus marquées. C’est le choix qui s’offre au chef de l’Etat. Son discours, prévu début juillet, sera prononcé sous l’ombre tutélaire du général de Gaulle.