Comment les établissements de formation en travail social se sont-ils adaptés à Parcoursup et à l’organisation de la sélection dans un contexte d’épidémie ? « La sélection a été plus arbitraire que les autres années », reconnaît Laurence Boudy, directrice de la filière sociale de l’IRFSS Nouvelle-Aquitaine. De fait, si avec Parcoursup il n’y a plus d’épreuve d’admission écrite, l’entretien oral subsiste. Une opportunité pour certains candidats de se révéler particulièrement motivés. Mais, cette année, la plupart des oraux ont été supprimés en raison du Covid-19. « Un étudiant peut avoir un très bon dossier sans être vraiment motivé et peut arrêter sa formation en milieu de parcours, alors que d’autres peuvent avoir un moins bon dossier mais se montrer très motivés à l’oral », pointe Marine Dufour, vice-présidente de la Fédération nationale des étudiants en milieu social (Fnems) qui regrette cette situation. Les établissements ont dû se familiariser aussi avec l’outil d’aide à la décision de la plateforme « relativement complexe », souligne Valérie Robberechts, chef de service à l’IRTS Nouvelle-Aquitaine.
La plateforme d’admission dans l’enseignement supérieur se compose de trois blocs : « évaluation quantitative », soit les notes de première et de terminale (1er et 2e trimestres), la « fiche avenir » et « l’évaluation qualitative », c’est-à-dire le projet, le parcours, les activités bénévoles. « Nous mettons le curseur sur les sciences humaines », précise Abdel Belbouche, membre du comité de direction de l’IRTS Ile-de-France de Montrouge à Neuilly-sur-Marne. « Je pondère ceux qui ont fait un service civique ou des études supérieures », reconnaît Laurence Boudy. Et d’ajouter que les profils ont changé : « J’ai davantage de candidats bacheliers. » Mais pas facile de s’y retrouver dans la procédure.
Parcoursup demande un travail administratif plus important aux instituts de formation : « Il faut analyser les dossiers, valoriser l’expérience professionnelle en lien avec le social, affecter des coefficients », explique Valérie Robberechts.
Pour les étudiants, ce n’est plus la pression des concours mais la rédaction de la lettre de motivation qui accompagne leur candidature et, surtout, l’attente des propositions. « J’allais toutes les heures sur la plateforme, je ne me voyais pas avancer dans la liste d’attente », indique Charlotte Fournier, 18 ans, en terminale ES. Les lycées subissent les inquiétudes des jeunes et des parents pour que les appréciations soient particulièrement soignées même si sur Parcoursup les établissements scolaires d’origine sont anonymisés. Charlotte a obtenu la réponse tant attendue le 19 mai, en plein déconfinement. Sur les neuf centres de formation de travail social où elle a postulé, deux l’ont acceptée.
Les instituts préparant aux métiers du social notent toutefois que Parcoursup a donné de la visibilité à leurs formations : « Avant, il fallait que les centres d’information et d’orientation soient bien informés pour faire connaître nos enseignements aux jeunes », se souvient Laurence Boudy, qui observe une baisse du nombre de candidats cette année, lesquels auraient mieux ciblés leurs vœux. Autre élément positif : le réseau de l’Unaforis (Union nationale des associations de formation et de recherche en intervention sociale)(1) a préconisé que les frais de dossier sur Parcoursup ne dépassent pas les 80 € par centre de formation afin de ne pas pénaliser les jeunes en difficultés financières.
Chaque établissement devra, à l’issue de la procédure nationale de préinscription, établir un rapport précisant les critères en fonction desquels les candidatures ont été examinées. Reste à savoir comment la réforme du bac 2021 et ses différentes options influenceront les critères de sélection des jurys l’année prochaine.
(1) Voir l’interview de sa déléguée générale Diane Bossière, ASH n° 3163 du 5-06-20, p. 10.