C’était une promesse d’Emmanuel Macron. En février dernier, lors de la Conférence nationale du handicap, le président de la République annonçait le lancement en 2021 d’un numéro vert national à destination des personnes en situation de handicap. Mais la pandémie de coronavirus est venue bousculer le calendrier. Pour répondre aux difficultés causées par la crise et apporter du « soutien » aux aidants, la secrétaire d’Etat chargée des personnes handicapées, Sophie Cluzel a lancé, dès le 5 juin, dans 24 départements et six régions pilotes, le 0 800 360 360.
Ce nouveau numéro unique renvoie vers des équipes territoriales baptisées « communautés 360 » composées de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) et des différentes structures locales comme les associations gestionnaires, l’hôpital, le médecin de ville, les réseaux de solidarité… « L’idée, c’est que l’ensemble des acteurs sur un territoire donné mutualisent leur accueil, leurs infos et leurs services, détaille Jérémie Boroy, à la tête du CNCPH (Comité national consultatif des personnes handicapées), qui organise le suivi de ce déploiement. La crise a mis en lumière une capacité de réaction extrêmement rapide et un formidable travail en réseau. Nous voulons nous en inspirer pour mettre tout le monde autour de la table à l’échelle locale et faire coller besoins et réponses. »
Problème pour un certain nombre d’acteurs : les MDPH tiennent déjà ce rôle d’interlocuteur unique. « Je me demande à quoi serviront désormais les MDPH dont l’objectif est notamment de faciliter la prise en charge, en trouvant les services auxquels s’adresser, soulève Christine Meignien, présidente de la Fédération française Sésame Autisme. Ce nouveau dispositif fait craindre le démantèlement d’une partie de leurs missions. » « Cela vient ajouter une strate supplémentaire », dénonce de son côté Luc Gateau, président de l’Unapei (Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis), qui se demande comment ce nouveau numéro s’articulera aux systèmes existants, comme les pôles de compétences et de prestations externalisées (PCPE) et la réponse accompagnée pour tous (RAPT).
En filigrane, se dessine une autre inquiétude : celle de ne pas pouvoir répondre de manière satisfaisante aux personnes en situation de handicap et aux aidants. Si pendant la crise les travailleurs du médico-social ont su apporter des solutions d’urgence, les associations redoutent de se voir déléguer une multitude de demandes sans disposer de plus de moyens. « Le personnel va retrouver ses fonctions d’avant la crise et n’aura pas le temps de déployer plus de solutions », prévient Christine Meignien.
Pour que le dispositif ait un réel intérêt, il s’agit d’étoffer au maximum ces « communautés 360 », avance Geneviève Mannarino, vice-présidente du conseil départemental du Nord, qui fait partie des territoires pilotes. En charge de la MDPH, elle table sur « une porte d’entrée très généraliste ». « Si nous voulons toucher un public isolé, cette plateforme doit être en mesure d’apporter des réponses au-delà du handicap et d’aiguiller les usagers pour toutes leurs demandes, comme celles relatives à la recherche d’emploi ou aux prestations de la caisse d’allocations familiales », explique-t-elle avant d’ajouter : « Je pense que c’est au département de prendre cette responsabilité car nous disposons déjà de tous les réseaux. »